Les heures les plus sombres, les vraies


Le résultat des élections européennes ne pouvait en aucun cas constituer une surprise. L’ordre d’arrivée et les pourcentages respectifs avaient été annoncés, et n’importe quel sondeur amateur utilisant le doigt mouillé savait ce qui allait arriver. Par ailleurs, il s’agit d’un scrutin dont chacun sait qu’il ne sert à rien puisque la politique européenne est ossifiée dans les traités et par conséquent intangible. Qu’au cœur du désastre hollandien, il ne se soit trouvé qu’un électeur inscrit sur dix pour aller se défouler en votant pour le parti « des heures les plus sombres », est –à la limite- presque rassurant.

Mais, ce matin, on rivalise. « Gueule de bois, catastrophe, choc terrible ». On échappe d’extrême justesse au « danger fasciste », mais pas au «Le score du FN est un choc à l’échelle du monde… » (Un ban pour Ségolène !). D’ailleurs, un signe qui ne trompe pas, une rumeur court sur les réseaux, que la chaîne de télévision « Histoire », vous savez celle du sulfureux Patrick Buisson, a programmé un film de Leni Riefenstahl.

Soyons sérieux. Et regardons France 3 ce soir. Un docu fiction sur « les Français du jour J ». Les 177 Français Libres qui avaient bravé tous les dangers pour rejoindre Londres et qui ont remis ça en intégrant le Commando Kieffer afin d’être sûr d’être en première ligne. De vrais antifascistes qui combattaient le vrai fascisme. En chantant la Marseillaise, Monsieur Wilson.

On y retrouvera René Rossey, pied-noir de 17 ans, qui ne connaissait pas la France et dont le premier contact avec la terre de celle-ci fut le 6 juin 1944 à 7h30 du matin sur la plage de Sword Beach. Il semble que cela l’ait marqué[1. Histoire de faire connaissance avec René Rossey avant ce soir, on peut regarder un premier et très beau documentaire d’il y a une douzaine d’années. Le commando était accompagné d’un cinéaste. Sur les images, on voit et reconnaît les protagonistes pendant la bataille.].

De Gaulle, qui n’aimait pas que l’on soit intégré à l’armée britannique, les a snobés, et il a eu tort. Ces 177-là considéraient que leur appartenance au peuple français leur imposait le devoir de combattre pour sa Libération, fut-ce au prix de leur vie. Et leur première récompense fut la phrase de leur colonel anglais après la bataille, celle de l’honneur retrouvé : « Vous avez fait du bon travail, vous les Français. » Les vieillards survivants le racontent, avec émotion, mais sans regret. C’est rafraîchissant. Et encourageant.



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