De la censure


De la censure

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C’est reparti, tout le monde s’insurge contre la censure de La Vie d’Adèle… mais il faudrait savoir de quoi l’on parle. Il y a la censure officielle, celle qui vient de s’exercer à l’encontre du film de Kechiche. Censure qui passe par une demande légale et une décision de justice. Censure contestable effectivement, et d’autant plus contestée, si j’ai bien compris, que la demande émane d’un groupe catholique traditionaliste, c’est-à-dire du Diable en personne.

Et puis il y a l’Autre censure, celle dont on ne parle jamais, qu’on ne voit pas parce que son cheminement complexe, mélange d’intérêts financiers et de militantisme reste hors de portée.

Et surtout, parce que notre conformisme nous empêche de nous poser la question.

Imagine t-on par exemple voir en France un film positif ou même tout simplement neutre, sur le parcours d’un(e) jeune militant FN ? Avec les difficultés que ses convictions lui posent dans la vie quotidienne, avec sa famille, ses amis, ses camarades de lycée, de fac, de travail ?  La discrimination dont subitement il est l’objet après son « coming out ». La réponse est non.

A la place, on a un film, tout à fait regardable certes, mais militant, à savoir « un Français » qui est une caricature où le mot FN n’est pas prononcé mais où tout le monde aura compris de quoi il s’agit.

Un film évoquant de manière positive une famille catholique traditionnaliste ? Que nenni. Ou alors dans la dérision, la dénonciation haineuse.

Un film évoquant les doutes et les remords d’un médecin obligé par la loi de pratiquer des avortements qui le révulsent philosophiquement ?  Inenvisageable… il ne peut être qu’un monstrueux salopard.

Bien qu’ayant fait des recherches et consulté une liste de films sur la guerre d’Algérie, je n’ai personnellement jamais vu, ni eu connaissance de l’existence d’un film positif sur les « soldats perdus » de l’Algérie Française, ni sur un membre civil de l’OAS et ses motivations. Rien.

Rien qui évoque de façon positive les raisons pour lesquelles d’anciens résistants ont cru devoir passer dans une seconde résistance en s’insurgeant contre le pouvoir gaulliste.

Par contre les films valorisant la partie adverse (le FLN) sont légion, balayant sous le tapis les enfants égorgés, les familles de Harkis torturées et autres horreurs que la bienséance et l’argent Algérien empêchent sans doute d’aborder. Les sujets tabous sont nombreux.

Par contre, le cinéma a abordé de manière positive tous les grands sujets militants de notre époque, militants de gauche cela va de soi  (et de droite complexée).

La censure s’exerce donc de façon détournée, elle passe par l’argent, les opinions des producteurs, et par les opinions dominantes du moment.

Ce n’est pas la réalisatrice Cheyenne Carron qui dira le contraire. Pour son film L’Apôtre, le CNC n’a pas daigné lui donner un centime en raison du thème évoqué : un jeune musulman se convertissant au catholicisme, motivé par l’attitude du prêtre du village. Ce dernier, malgré sa douleur, tendant la main a la famille musulmane de l’assassin de sa sœur. La réalisatrice a réussi à trouver des financements privés mais pas de chance, elle a vu son film déprogrammé en raison des risques d’attentat en ce début 2015, et ce à la demande de la DGSI.

Faites peur, c’est comme ça que vous gagnerez !

Alors ? Alors, je précise pour ceux qui pratiquent l’interprétation mal intentionnée de manière obsessionnelle que je ne décris pas ici mon dépit de ne pas voir mes héros valorisés.

C’est un simple constat : le monde du cinéma lui même exerce une censure, qu’on ne s’étonne donc pas que les thèmes qu’il aborde de manière militante soient contestés de temps à autre, de manière légale par ceux qui n’ont ni le pouvoir de l’argent, ni celui des idées dominantes, ni celui des relations dans ce milieu endogamique.

Quant à la télévision, on pourrait parler longuement des innombrables et souvent très médiocres téléfilms qui n’ont de toute évidence pour objet que de servir de support aux grandes idées du moment : métissage, homosexualité, réinterprétation de l’Histoire à des fins politiques et j’en passe.

Le fleuron du genre étant le feuilleton de la 3 « plus belle la vie » dont les créateurs, ont voulu faire rentrer subrepticement dans le crane de la jeunesse toutes les idées dont elle sommée de maitriser la dialectique à la perfection.

Pari moyennement réussi si j’en crois les sondages sur l’âge moyen de l’électeur FN.

*Image : wikicommons.



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