L’ère froide de l’après littérature, dans laquelle nous nous enfonçons, nous prive de précieux outils permettant d’élucider l’existence ou d’aimer.
Qu’est-ce que l’ère de « l’après-littérature » que décrit Alain Finkielkraut dans son nouvel essai paru chez Stock ? C’est l’ère du militantisme et de la certitude, l’ère qui hait la nuance, qui ne s’embarrasse pas du doute et conçoit mal la controverse. « Pour la pensée post-tragique et postlittéraire, il n’y a pas de brouillard. Tout, toujours, est clair », déplore le philosophe dans son nouveau livre. Certains croyaient naïvement que la destruction du Mur de Berlin coïnciderait avec la fin des idéologies vitupérantes : voilà que trois décennies plus tard, elle contamine tout et conduit à un appauvrissement intellectuel global. Il ne s’agit de penser le monde qu’à travers un seul prisme. « Quand la vision littéraire s’éloigne, l’idéologie prend toute la place, et on en crève », explique-t-il.
Défenseur des zones grises
Le philosophe s’émeut de la disparition progressive de « l’approche littéraire de l’existence », qui par sa finesse, accorde une place au doute, à la complexité, au tâtonnement. Non que les œuvres littéraires ne soient pas dépositaires d’une vision du monde, mais elles ne peuvent s’y réduire : on y trouve tout autant des études sociologiques que des récits individuels, elles conjuguent l’universel au singulier sans rien renoncer de l’un ou de l’autre. De même, l’ère littéraire – plutôt derrière
