Accueil Politique Fillon Copé : le serpent et le pitbull

Fillon Copé : le serpent et le pitbull


A droite, la guerre des chefs a commencé. Les cendres de la présidentielle sont à peine tièdes qu’on se bat déjà pour l’héritage, à toi la commode de mémé, à moi le service à café. Mais tu as piqué des nappes brodées et toi, là-bas, rapporte immédiatement les Jules Verne en édition Hetzel. J’exagère ? A peine… A l’UMP, on avait dit de serrer les rangs, de rester propre et digne pour éviter une France toute rose, livrée aux socialistes des mairies au Sénat, en passant par l’Assemblée nationale, Matignon et l’Elysée.

Jean François Copé, le secrétaire général du parti, avait passé le message et obtenu, lui semblait-il, un pacte tacite de non-agression jusqu’à l’automne. Après quoi, il n’aurait pas été hostile à ce qu’un nouveau congrès le réélise pour incarner l’opposition jusqu’à sa propre candidature en 2017. Ça c’est le plan, mûri dans son esprit et parmi ses partisans les plus féroces. Et le pire, c’est que ça ne bronchait pas : sous-entendu, le premier qui dégaine, appelle à tirer sur l’ambulance, s’écarte de la ligne du parti, sera responsable de la défaite, de la mise au chômage de braves députés, de la ruine de la France, de l’échec à l’Eurovision et du réchauffement climatique.

Sauf que François Fillon se fout de la montée des eaux aux Seychelles. Voilà-t’y pas que dans Le Fig mag de la semaine passée, il assène ce coup droit terrible : « il n’y a plus de leader naturel à l’UMP ». Tiens prends ça Copé, voilà ce que j’en pense de ton OPA déjà réalisée.

Curieux, car, à y regarder de plus près, la déclaration de guerre est à l’image de l’ancien Premier ministre : bien peignée. Evidemment, ça a mis la presse en émoi, à droite ceux qui restaient à bonne distance de l’un et de l’autre -histoire de ne pas choisir, on ne sait jamais qui pourrait gagner- se sont torturés les méninges 24 heures pour choisir leur champion. Et puis ? Et puis rien. Le serpent Fillon est reparti siffler de loin dans les herbes hautes, quand le pitbull Copé, sous couvert de « Je suis blessé, je suis pour l’unité, les militants trancheront » s’est frotté les mains de la néo, ou pseudo sortie de celui qu’il n’aime pas (c’est vrai, mais qui aime-t-il ?) et a recommencé à montrer les dents avant d’aboyer sur la gauche (et sur le retour de la droite la plus bête du monde).

Il faut être sérieux : que risque Copé ? Que Fillon mette vraiment les mains dans le cambouis pour gagner un parti qui l’emmerde, avec les emmerdements qui vont avec : les fédérations, les députés, les élus qui pleurent, ceux qui veulent se faire élire, les militants et un ancien président pour l’instant en vacances. Osons un pari : Fillon ne prendra l’UMP que si on lui offre sans bagarre, sur un plateau et sans avoir à gérer la boutique.

En 1999 il s’était cassé les dents sur le RPR. Echaudé, il a préféré prospérer dans l’ombre. Même Premier ministre il est resté dans l’ombre, en faisant mine de s’en plaindre. Moyennant quoi il a ménagé sa cote de popularité pendant 5 ans, ce qui explique que dans le désastre post-présidentiel (dont on ne jugera l’ampleur exacte qu’au lendemain du second tour des législatives) il a l’air de sauver ses billes. Fillon le serpent innocent joue la victime, qui veut bien rendre service si la bagarre consiste à piquer et à fuir dans l’herbe.

Certes, Copé a lui aussi des cotés vipérins, mais il la joue plutôt pittbull : allez on se bagarre, allez on gueule, allez on assume. Allez on se vautre. N’empêche, la sortie de son meilleur ennemi (après Xavier Bertrand puis d’autres, merci de compléter la liste…) fait ses affaires.
La tectonique de la droite est certes plus complexe que cette simple opposition médiatique, mais elle va structurer les débats pendant plusieurs semaines, voire quelques mois. Avec, en guest star, Alain Juppé disponible pour sauver son pays. Non pardon, son parti.

Fillon verra de quel côté ça tombe. Si ça se présente bien, il sortira de son trou pour vaincre à l’applaudimètre. Sinon, il fera député de la 2ème circonscription de Paris, là où on n’est pas obligé de serrer des mains et d’embrasser des vieilles pour se faire élire. Et Copé continuera d’aboyer à sa gloire personnelle, jusqu’à 2017 au moins.

*Photo : UMP



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