
« Nous et les autres. Des préjugés au racisme » : le titre de la première exposition temporaire du musée de l’Homme depuis sa réouverture en 2015 pouvait laisser craindre un engluement dans le politiquement correct. En réalité, les organisateurs se sont plutôt bien tirés de cet exercice de haute voltige. Pas de bien-pensance ni de moraline, sinon à travers quelques constats issus des études de l’Ined, démentis par l’expérience sensible de la plupart d’entre nous, une malheureuse intervention filmée de Rokhaya Diallo et une définition de l’« islamophobie », qui a failli coûter une syncope à Élisabeth Lévy. Des erreurs de parcours généreusement compensées par une nouvelle inattendue : la tolérance augmente en France et les actes racistes sont en baisse en 2016, d’après le sondage annuel de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme.
Il faut d’autant plus s’en réjouir qu’on tente de faire accroire le contraire à coups de dénonciations et autres sommations. Évelyne Heyer, qui assure avec Carole Reynaud-Paligot le commissariat scientifique de l’exposition, l’explique par le « paradoxe de Tocqueville », ou paradoxe de l’insatisfaction croissante selon lequel plus on se rapproche de l’idéal, plus le moindre écart qui nous en sépare paraît insupportable. Courageusement, les deux commissaires ont fait le choix de ne pas donner la parole aux associations antiracistes pour nous rappeler le long chemin qu’il nous reste à parcourir avant d’embrasser pleinement la religion de l’Autre. Leur volonté de départ était de renouer avec le principe fondateur du musée de l’Homme, qui était également celui de son premier directeur, l’ethnologue Paul Rivet, de la non-hiérarchisation des « races », laquelle n’empêche pas de mesurer la différenciation culturelle entre les peuples. Instrument d’éducation populaire dès son origine dans les années 1930, l’institution maintient ainsi l’ambition de s’intéresser aux questions de société, en présentant des données scientifiques qui font appel tant aux sciences biologiques qu’aux sciences humaines. L’organisation de l’itinéraire
