Jusqu’au 1er septembre, et durant toute la période des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, le Musée Marmottan Monet consacre une exposition aux liens entre les artistes et le sport, de 1870 à 1930.
Je compatis. Sincèrement. Pour tous ceux qui détestent le sport et la Mairie de Paris, les JO seront une épreuve particulièrement rude, un été sous tension sécuritaire et overdose médiatique. Seul l’exil ardéchois ou creusois vous permettra d’échapper à la fantasia des anneaux, aux retransmissions télé en flux tendu, à la sous-location abusive, à la billetterie prohibitive, à la parade de nos gouvernants et à la course aux médailles, suscitant son lot de polémiques et de désillusions, alimentant débats et tourmentes propres à notre pays qui se complaît dans les sujets d’autodénigrement permanent. En France, il y a un plaisir à se flageller et à intégrer la défaite avant le combat. Paris sera-t-elle une fête gâchée ? Certains l’assurent et s’en délectent d’avance, considérant que notre nation diminuée n’a plus les moyens, ni l’autorité pour organiser un tel événement planétaire, notre déclassement nous obligeant à revoir nos ambitions sportives sérieusement à la baisse. Nous serions à peine capables d’assurer le fonctionnement d’un Euro de foot, alors des JO, n’y pensez pas !
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Optimistes et défaitistes
D’autres plus optimistes, sans être aveugles sur les points d’achoppement nombreux de notre dossier à moins de 100 jours de l’événement, estiment qu’une fois la partie lancée, dans l’euphorie des compétitions, on oubliera tous ces désagréments. La vague nous submergera, qu’on le veuille ou non. De bonne ou de mauvaise grâce, les JO se dérouleront comme les quinquennats poussifs et le recul des libertés publiques. Au forceps et sous les hourras des foules ahuries. Cette grosse machinerie perfusée de dollars et de droits télé, sponsorisée à outrance, boîte à fric et à records physiques, n’a que faire des villes et des pistes cyclables qui l’accueillent, des sites aux normes ou non, des droits humains ou des bilans « carbone ». Elle déploie son gigantisme et écrase tout sur son passage. Le coût est accessoire, la force de l’image reste quoiqu’il arrive. Un seul gagnant à la fin, ni le pays hôte, ni les athlètes, la tentacule olympique nous aura tous collectivement aspirés.
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Qui se soucie des infrastructures à l’abandon que nos confrères de Géo Histoire (Numéro73) ont magnifié dans leur reportage « Urbex » ? Le stade de beach-volley d’Athènes 2004, avec sa passerelle d’acier en déshérence, n’empêche personne de dormir depuis vingt ans. À ceux qui ne vibrent pas aux exploits des décathloniens et aux arpèges des sauteurs en hauteur, la pilule du sport peut passer par une autre voie, celle des arts. Aux réfractaires de l’effort et des larmes, je conseille toujours de lire Les deux visages de l’Italie (Coppi et Bartali) de Curzio Malaparte et les reportages de haute volée littéraire de Gay Talese dans Sinatra a un rhume, notamment celui consacré au boxeur Floyd Patterson, du grand art pour le noble art. À défaut d’aller voir le BMX à la Concorde ou le tir à l’arc aux Invalides, sans risquer un claquage et une abondante suée, le musée Marmottan Monet propose son exposition « En jeu ! » qui réunit 160 œuvres en provenance de collections publiques et privées du monde entier (Peggy Guggenheim de Venise, Yale University Art Gallery de New Haven, Philadelphia Museum of Art, musée Fabre de Montpellier, Centre Pompidou, musée Bourdelle à Paris, musée d’Ordrupgaard au Danemark, Staatsgalerie de Stuttgart, etc.).
Corps en mouvement
Vous y verrez de la lutte, de l’aviron, de l’équitation, de l’escrime, du tennis, du cyclisme, du croquet et même des patineurs à Giverny en plein été (Claude Monet/1899), vous y verrez surtout des corps en mouvement, des élans cubiques et des prouesses impressionnistes, des compositions exécutées par des mains expertes, des champions de leur discipline qui s’appellent Rodin, Sisley, Renoir, Van Dongen, Bonnard, Daumier, Delaunay ou Toulouse-Lautrec.
J’ai un faible pour la sculpture de style art-déco signée Pierre Toulgouat représentant un passage de haie, à l’équilibre symétrique et aux arêtes tranchantes. Vive le sport en bronze !
2, rue Louis-Boilly 75016 Paris. 14€ l’entrée.
Plus d’informations sur le site web du musée.
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