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« L’Europe va s’africaniser, c’est inexorable »

L'essayiste Stephen Smith prévoit de grands bouleversements démographiques


« L’Europe va s’africaniser, c’est inexorable »
Stephen Smith, 2018. ©Hannah Assouline

L’essayiste, Stephen Smith, prévoit de grands bouleversements démographiques: en 2050, 450 millions d’Européens feront face à 2,5 milliards d’Africains. Malgré le possible développement économique de l’Afrique, l’attrait du Vieux Continent va attirer des millions de migrants en quête d’une vie meilleure. Et les Européens devront bien s’y adapter.


Causeur. Vous écrivez : « Nous sommes tous partie prenante dans le grand repeuplement en cours, soit comme des gens qui s’installent ailleurs, soit comme des gens qui reçoivent des étrangers. » Assistons-nous au « déménagement du monde », pour reprendre l’expression de Jean-Luc Mélenchon ?

Stephen Smith. Le monde déménage depuis longtemps, et l’Europe l’a fait la première. La nouveauté est que la généralisation de ce mouvement met fin à l’opposition entre les migrants, d’un côté, et, de l’autre, les sédentaires ou, si vous voulez, les autochtones. Maintenant, nous sommes tous des migrants. Même sans bouger d’un pouce, tout simplement parce que le quartier ou la ville où nous vivons change si vite et si profondément que l’on peut avoir l’impression de s’être installé ailleurs. Sur le plan politique, cela veut dire que dresser les uns contre les autres n’a pas de sens. C’est de la démagogie.

Mais il y a une grande différence : le migrant choisit de partir, alors qu’on ne demande pas son avis à celui qui accueille et qui, très souvent, subit le processus. 

Je ne vois pas cela ainsi. Les privilégiés de ce monde voyagent, ils ne migrent pas. Ils vont quelque part puis rentrent chez eux. Voilà la globalisation heureuse. D’autres partent dans des circonstances dramatiques ou parce qu’ils cherchent de meilleures chances de vie, pour eux-mêmes et leurs enfants. Du point de vue de ceux qui les accueillent, la question est de savoir dans quelles conditions l’immigration se produit, acceptables ou inacceptables. Je suis très clair sur un principe : « On ne fait pas le compte sans l’hôte », c’est-à-dire que les nationaux – tous ceux qui sont liés à un État par un contrat de citoyenneté, quels que soient leurs aïeux ou leur couleur de peau – décident qui s’installent chez eux.

En 1983, il y avait environ 80 000 demandeurs d’asile en Europe de l’Ouest ; en 2016, 1,2 million.

Mais, à vous lire, les migrations massives sont un fait inéluctable : peu importe la raison – survivre ou mieux vivre – les Africains sont en train de bouger et nous sommes obligés de les accueillir.  

Oui, dans la mesure où – et c’est le deuxième principe sur lequel j’insiste – la frontière n’est pas une barrière baissée ou levée, mais un espace de négociation entre voisins qui ne peuvent pas se désintéresser des problèmes de l’autre. Non, dans la mesure où l’Europe n’est pas condamnée à accepter une migration dont l’acte inaugural est un abus de confiance. En 1983, il y avait environ 80 000 demandeurs d’asile en Europe de l’Ouest ; en 2016, 1,2 million. La situation du monde a-t-elle si dramatiquement empiré entre-temps ? L’Afrique est-elle plus malheureuse aujourd’hui, après une


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Mars 2018 – #55

Article extrait du Magazine Causeur




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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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