Et vogue le vacancier sur les routes de France, à la recherche du bien-être estival ! On ne va pas seulement se vider la tête des tracas de l’année et des vicissitudes de l’époque, on va aussi se remplir la panse de denrées du plaisir et de boissons du bonheur. Les vacances, c’est fait pour se changer les idées et l’appétit, sortir des sentiers battus du boulot et des allées de la grande distribution. Et c’est là que le bât blesse, car les marchands d’illusion attendent justement le touriste au coin du bois. Juillet et août sont les meilleures périodes de chasse pour les prédateurs du portefeuille néophyte. Petit, petit, petit…[access capability= »lire_inedits »]
Ah, les fruits de mer du bistrot de la Marée ! Ah, les abricots de la cabane du paysan sur le bord de la route ! Ah, le fromage fermier au marché du village ! Ah, la terrine de grand-mère à l’étal du charcutier ambulant ! En été, du côté de la malbouffe, l’habit fait le moine et les margoulins passent maîtres dans l’art de vous entendre en confession : braves étrangers ignorants des coutumes du cru, venez vous faire plumer à la mode de chez nous ! Au grand dam des vrais indigènes, furieux de se faire damer le pion par les saltimbanques du bluff. La saison chaude est la pire de toutes pour les huîtres et autres coquillages car ils sont en période de frai, c’est-à-dire laiteux et décharnés. Méfiez-vous des revendeurs qui proposent, dans des cagettes semblant sortir du verger local, des fruits espagnols ou marocains tirés des frigos du grossiste importateur. Attention à ces marchés du terroir où de braves escrocs déguisés en bouseux, blouse bleue et chapeau noir, font goûter des produits « élaborés à la ferme » en provenance d’une conserverie industrielle. Gare à ces artisans de bouche qui viennent de démouler le pâté de campagne acheté une heure avant à l’hypermarché voisin ! Un vacancier averti en vaut deux et peut manger comme quatre au prix de trois.
Si le séjour est côtier, il y a de fortes chances que le port le plus proche ait sa petite criée où les pêcheurs de petits bateaux débarquent leur marée. Cette vente dite « à la pierre du quai », très réglementée, est la garantie de goûter à du poisson de mer pris à l’aube. Et quel régal ! Quant à la vente des fruits, des fromages ou des volailles de la ferme, la pratique est réelle, et parfaitement fiable, si l’on prend la peine et la joie d’aller les chercher chez le producteur. Une revente sur la voie publique présente toujours un risque si l’on ne sait rien du fournisseur. Pour ceux qui le peuvent, une fois n’est pas coutume, si l’huître n’est pas au sommet de sa performance, le crustacé, lui, l’est, notamment le homard, à sa meilleure période, plein et charnu, dans son prix le plus bas de l’année. On peut en trouver du bien bleu à 15 euros le kilo sur certains étals ou mareyeurs de Bretagne ou de Normandie, une aubaine ! À déguster juste grillé. Quant aux marchés paysans, de plus en plus nombreux, ils doivent être patentés comme tels et signalés, dans les communes où ils se tiennent, sur des espaces réservés. Insouciance et nonchalance sont les maîtres maux d’un été indigeste et ruineux. Exigence et vigilance sont les maîtres mots d’un été gourmand et bien arrosé. La France est le pays où tout est possible, et la belle saison permet d’aller découvrir des terroirs insoupçonnés.
Faire sa propre police pour goûter aux délices. Consommons citoyen ![/access]
*Photo: Soleil
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