L’édito politique de rentrée de Jérôme Leroy
L’été a été étrange. Sous nos climats jadis tempérés, l’histoire décidait autrefois de s’y reposer un peu. On ne peut pas dire qu’il y ait eu cette espèce de suspension habituelle du temps en juillet et en août. Au contraire, le temps de cerveau disponible que nous laissent les vacances, derniers moments où l’on échappe au rythme imposé par le mode de production, n’a pas cessé d’être sollicité par des inquiétudes de tout ordre.
Bientôt Soleil Vert
Des épisodes climatiques meurtriers, totalement anormaux, viennent encore une fois nous indiquer qu’on est à une ou deux générations de Soleil vert. Bien sûr, il reste un carré de climatosceptiques qui seront dans le déni jusqu’au jour où ils se battront autour des derniers points d’eau en Île-de-France à disputer leur nourriture aux chiens des zones pavillonnaires.
Et encore, comme je ne connais pas de climatosceptiques jeunes car le jeune sait ce que cela signifiera pour lui et pour ses enfants une planète avec des températures à plus de 50°, ceux-là échapperont-ils à l’horreur, déjà morts dans une bienheureuse ignorance repue. Je suis assez heureux de voir que le candidat du PCF, Fabien Roussel, vient encore une fois de répéter que le nucléaire est la seule solution pour décarboner l’économie et pallier l’urgence du problème.
La folie antivax
Il y a aussi eu cette épidémie qui rôde toujours, jugulée par la vaccination et le passe sanitaire. Ah ce passe sanitaire qui aura été un nouveau clivage ! Les manifs inspirées par des complotistes antisémites rejoints par l’ultragauche libérale-libertaire, nous auront offert le plaisir de voir défiler les enfants de Cohn-Bendit aux côtés de ceux de Soral ou de Monseigneur Lefebvre.
C’est drôle, la France, parfois, c’est le seul pays où on se croit atteint dans ses libertés pour aller boire une bière et où on le déclare sur les réseaux sociaux qui sont le rêve des services de renseignement : une population qui se fiche elle-même. Le seul pays où l’on s’indigne de ne pas pouvoir aller au cinéma (ou d’ailleurs on ne va pas si souvent que ça) sans montrer un QR code mais où on ne s’indigne pas de l’envahissement de la vidéosurveillance « parce qu’on n’a rien à se reprocher. »
À mes amis de gauche qui se sont égarés dans ces défilés, je rappellerai que la colère contre Macron ne doit pas nous égarer et qu’un gouvernement de gauche soucieux de santé publique aurait pris la même mesure. Aux catholiques tradis, qui restent mes frères, je rappellerai que le pape François lui-même a déclaré « «Être vacciné est un acte d’amour» avant d’appeler à « un esprit de justice qui nous mobilise afin d’assurer un accès universel aux vaccins et la suspension temporaire des droits de propriété intellectuelle». Aux complotistes antisémites qui par ailleurs cumulent à la folie antivax, le déni climatique et autre visions délirantes sur le platisme ou le pédosatanisme, je n’ai évidemment rien à dire sinon de rester cantonnés à leur soue numérique.
La dernière défaite des néocons
L’image qui restera de la déroute occidentale, assez hussarde dans son genre, c’est celle du dernier général qui monte dans le dernier avion, le M16 à la main dans les lueurs d’un appareil photo thermique. On liquide et on s’en va. Elle ne cachera pas l’incroyable rapidité d’un effondrement américain en Afghanistan.
L’idéologie néoconservatrice, que l’on trouve également partagée chez les Républicains et les Démocrates, a prouvé encore une fois, après la deuxième guerre d’Irak, ou celle de Libye sous-traitée par le tandem Sarkozy-Cameron, qu’elle ne générait que des échecs sanglants.
Importer à coup de missiles une démocratie à l’occidentale au nom d’un universalisme marchand qui amènerait la paix avec « le doux commerce » cher à Montesquieu, ça ne marche pas. Au contraire, ça fait prospérer un islamisme radical qu’on a de plus en plus de mal à contenir depuis le 11 septembre 2001 où il nous a déclaré une guerre que nous somme en train de perdre, sauf peut-être au Mali où le redéploiement des forces françaises semble faire preuve d’un pragmatisme qui pourra éviter ce genre de catastrophe.
Bref, une guerre mondiale à bas bruit, le recul de la raison dans la nation de Descartes et l’attente de la prochaine catastrophe climatique, vous reconnaîtrez qu’il va être difficile de s’intéresser à la primaire de la droite ou à l’université d’été d’EELV…
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