Il y a soixante ans, André Malraux a fait recouvrir par Marc Chagall le plafond peint par Jules Lenepveu à l’Opéra de Paris, sans doute le plus beau de la capital. A Angers, une exposition rend hommage à ce peintre admiré par Charles Garnier et oublié par la modernité.
Nous sommes en 1960. Malraux accompagne de Gaulle à une soirée de gala à l’Opéra. Le ministre s’ennuie à mourir. Ce n’est pas son truc, l’art lyrique. Il regarde le plafond, œuvre de Lenepveu, et c’est une nouvelle déception. Pouah ! C’est « académique », c’est de l’« art officiel ». Il lui vient alors l’idée de rafraîchir ce décor comme on change un vieux papier peint. À l’époque, la charte de Venise[1] n’existe pas et le ministre chargé du patrimoine peut librement vandaliser ce patrimoine ancien pour le remplacer par des œuvres modernes, plus à son goût.
Crinoline ou robe d’été ?
Dès l’entracte, Malraux téléphone à Chagall. Ils sont amis et se sont déjà rendu des services. Le ministre veut que le peintre repeigne par-dessus ces vieilleries quelque chose de « nouveau ». Chagall accepte sans états d’âme, mais le projet suscite une tempête de protestations internationales. Malraux n’a cure des grincheux et autres passéistes. Cependant, il consent à ce que Chagall ne peigne pas directement sur la toile existante, mais sur une
