Eric Ciotti, qui récupérerait bien cette présidence des LR que Laurent Wauquiez ne veut finalement pas, part en guerre contre les tenues vestimentaires relâchées de ses collègues d’extrême gauche. Trop contente de pouvoir faire du potin, à peu de frais, sur les réseaux sociaux, une troupe facétieuse de députées de LFI, conduite par Clémentine Autain, s’est ramenée à l’Assemblée nationale en cravate, mardi. Causeur a trouvé une solution pour mettre enfin tout le monde d’accord.
Le 17 juillet, via Facebook, Laurent Wauquiez a annoncé sa non-candidature à la présidence des Républicains. Il a ainsi fait le choix de « prendre de la distance avec le combat politicien, parce que le jeu des petites phrases et des polémiques stériles ne permet plus d’entendre la voix des Français. » Retiré sur son Aventin auvergnat, il prépare donc 2027 : « Il y a un génie français depuis du Bellay jusqu’à Houellebecq qui sait que la fin de l’histoire n’est jamais écrite ». Autrement dit, Laurent Wauquiez refuse de nous la jouer Soumission en grenouillant avec la bande de loosers que sont devenus les Républicains. Il attend en déclamant les Antiquités de Rome que le vent tourne en sa faveur :
Car si le temps finit chose si dure,
Il finira la peine que j’endure.
Les Républicains, marris, doivent maintenant se retrouver un chef de file. Comment choisir entre les jeunes lions et les vieux cadors ? Dès septembre, ça va finir par devenir un marronnier, les Républicains vont s’abîmer dans la question du leadership et celle du blason du parti qu’il convient de redorer. Et ça va durer jusqu’en décembre.
Les LR hésitent entre Pradié et Ciotti
Comment faire ? Les jeunes recrues s’inquiètent. Julien Dive, député de l’Aisne, est terrorisé: « J’ai peur que les gens ne nous calculent tout simplement plus. On risque d’être plongé dedans et de n’intéresser que nous-mêmes. » Annie Genevard, députée du Doubs et présidente de LR par intérim, réfléchit: « Si le parti n’est pas l’incubateur d’un présidentiable, ça veut dire qu’il doit faire autrement, être le support du travail parlementaire et de la réflexion idéologique. »
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Depuis le retrait de Laurent Wauquiez, les déclarations d’intention de personnalités briguant la présidence du parti abondent. Alors que Bruno Retailleau, patron des sénateurs LR, met en garde: « la marque LR est très abîmée par des années de petites lâchetés et de grands renoncements, de guerre des clans et de paresse intellectuelle. Notre passé va être très clairement un passif ». Deux figures émergent de ce panier de crabes. Aurélien Pradié, député du Lot, et Éric Ciotti, député des Alpes-Maritimes: deux hommes aux sensibilités et aux visions très différentes.
Aurélien Pradié, élu de 36 ans, souhaite incarner un changement (selon lui) très attendu à droite et « pas uniquement un projet porté par les jeunes ». Il s’agirait d’adopter une ligne plus sociale, différente, qui permettrait de renouer avec les classes populaires. Le député, très engagé, se réjouit d’avoir installé à droite des thématiques qui lui tiennent à cœur, comme celle du handicap: «Aux adhérents, nous voulons dire: voulez-vous refaire le match des primaires ou ne voulez-vous pas plutôt tourner la page de l’époque Sarkozy? Nous saurons être ce changement, tant voulu». Vanité pour qui a gardé en tête ce que dit Proust à la fin de La Recherche: «(…) nous avançons et c’est bientôt nous-même qui sommes à l’horizon pour les générations qui sont derrière nous; cependant l’horizon recule, et le monde, qui, semblait fini, recommence».
Éric Ciotti, 56 ans, sur une ligne beaucoup plus à droite, ne se serait pas déclaré si Laurent Wauquiez s’était embarqué dans cette galère. Du reste, il précise d’emblée ne pas être candidat en 2027 et se propose de «faire le diagnostic de la gravité de la situation, faire une évaluation de notre organisation». Il se veut optimiste tout en refusant le bain tiède proposé par l’aile molle du parti: «Si on fait de notre formation un véritable laboratoire d’idées, sur une ligne claire, sans tabou, on peut y arriver (…) Quand la droite est de droite, il n’y plus de place pour les autres», précise-t-il. Marine Le Pen en tremble déjà.
Retenez Ciotti ou il fait un malheur !
Notre valeureux guerrier, questeur de l’Assemblée nationale, n’a d’ailleurs pas hésité à se jeter dans l’arène, il y a peu, montrant ainsi de quel bois il se chauffe: «Je demande à la présidente de l’Assemblée nationale, l’obligation du port de la cravate au sein de l’hémicycle du Palais Bourbon pour empêcher que certains députés notamment de la France Insoumise se permettent de porter des tenues de plus en plus relâchées».
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Aussitôt les Oies du Palais Bourbon ont sonné l’alerte face au danger, ici réactionnaire, tout comme le firent leurs antiques sœurs du Capitole quand elles prévinrent jadis les Romains d’une attaque nocturne gauloise. Nos inénarrables nupettes, heureuses d’avoir un nouveau prétexte pour faire le show et ambiancer l’Assemblée, sont en effet arrivées toutes cravatées dans l’hémicycle, mardi 27 juillet. Conduite par la facétieuse Clémentine Autain, la joyeuse bande entendait, au-delà de «ce pied de nez à Éric Ciotti», alerter sur la misogynie rampante qui sévit au Palais Bourbon: « Derrière l’obligation du port de la cravate dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, l’exclusion des femmes ! Notre pied de nez à Éric Ciotti et ses amis qui ont peut-être des tenues bienséantes et propres mais de bien sales idées ». Carnaval un jour, carnaval, toujours. Au passage, puisque la question a l’air d’importance (la Guillotière peut attendre), on rappelle que la cravate est aussi portée par les femmes, on pense à certains uniformes, notamment dans la restauration ou les compagnies aériennes.
Je propose donc à Éric Ciotti, devenu l’arbitre des élégances, de faire contre mauvaise fortune bon cœur et d’engager ses partisans à adopter la Lavallière [1]. Voici qui serait un beau symbole pour son parti: inventée par l’une des favorites de Louis XIV, la Lavallière fut l’ornement favori des artistes bohème du XIXe siècle. Ça vous aurait une certaine gueule et serait le gage d’une permanence non dénuée d’audace ni d’un certain panache.
[1] La lavallière est une cravate proche du nœud papillon portée aussi bien par les hommes que par les femmes, dont l’usage est tombé en désuétude NDLR.
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