Déjà à l’oeuvre en Syrie, le président turc Recep Tayyip Erdogan fait grimper la tension en Méditerranée entre l’Egypte, la Grèce et la Turquie.
En politique étrangère, il est de bon ton de ne pas dire la vérité sur les protagonistes et même de ne pas tirer des conséquences du réel politique non-dit. C’est ainsi qu’on laissa faire Hitler, Staline, Mao, Ceaucescu, Bokassa, Pol Pot, les Kim, Kadhafi… Les médias se sont trouvé avec le président Trump une tête de Turc, mais les diplomaties, notamment européennes, ne font rien contre Recep Tayyip Erdogan qui, lui, devient de plus en plus dangereux. Mythomane, totalitaire, islamiste ambigu, grossier et guerrier, il vient de créer de nouveaux foyers de tension : non seulement en envahissant le nord de la Syrie (n’a-t-il pas dit vouloir chasser Bachar El Assad ?), mais depuis peu avec la Grèce et l’Égypte.
Batailles navales en Méditerranée
Depuis une dizaine de jours, la marine turque a entrepris des manœuvres, sur fond d’enjeux gaziers, dans le sous sol méditerranéen. Un navire garde-côte grec (autre pays de l’OTAN…) a été éperonné et un navire italien de prospection gazière forcé, sous menace de canonnage, de partir. Les marines égyptiennes et turques se font face et les vaisseaux italiens et grecs ne sont pas loin. La question des gisements gaziers près de Chypre, mais aussi l’interdiction des Frères musulmans par le pouvoir égyptien en 2013 ont envenimé les relations. De surcroît, le basculement encore instable des alliances (Russie-Iran-Turquie vs Etats-Unis-Arabie saoudite-Israël) crée une incertitude supplémentaire.
Les Frères musulmans ont été chassés en 2013 du pouvoir par l’actuel président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, alors ministre de la Défense. Recep Tayyip Erdogan dénonce sans cesse depuis lors « le coup d’État militaire » et a offert l’asile politique à de nombreux responsables de ce mouvement islamiste, considéré comme « terroriste » et réprimé en Égypte.
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Les médias égyptiens accusent le président Erdogan de menées subversives contre l’Égypte ; notamment par le transfert de centaines de djihadistes fuyant la Syrie vers la Libye, pour déstabiliser l’ouest égyptien, et s’infiltrer au nord Sinaï où la guérilla terroriste attaque violemment l’armée et les civils. Et, de fait, les chaînes de télévision turques donnent la parole aux Frères musulmans qui appellent au renversement, de « la dictature militaire de Sissi ».
De l’eau dans le gaz
La crise a, en plus de ces raisons historiques et politiques, un motif économique. Entre Chypre et Syrie se trouvent de grands gisements gaziers off shore. La Grèce, l’Égypte et Chypre ont conclu un accord pour la mise en valeur de ce gisement. Or, la Turquie prétend qu’elle aurait un droit sur celui-ci, en prétextant de son occupation militaire illégale sur le nord de Chypre. Cette enclave est supposée être un état : la prétendue République turque de Chypre du Nord, entité mafieuse, reconnue par le seul Erdogan.
Face à l’agressivité de la marine turque, le porte-hélicoptère Mistral « Anouar el Sadate » et plusieurs autres bâtiments, dont des sous-marins, ont quitté leur base d’Alexandrie pour défendre le gisement gazier de Zohr. En Turquie, en Syrie, en Méditerranée, le pire est possible. Il est temps d’en empêcher Erdogan.
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