On connaît tous la Camorra, la mafia russe, les yakuzas japonais et d’autres groupes mafieux. On connaît moins le Gang d’Erdogan : le président turc flanqué de ses commissaires européens. La machine est bien huilée, la manœuvre passe inaperçue. En tant que candidate à l’Union européenne, la Turquie perçoit des subventions de l’Union européenne. Entre 2002 et 2006, cette aide s’est élevée à 1,249 milliard d’euros. Pour la période 2007-2013, la dotation a été généreusement revalorisée pour atteindre 4,9 milliards d’euros. Le même montant est prévu pour la période 2014-2020. Sauf que personne ne croit à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Alors pourquoi continuer à financer son adhésion ? Que se passera-t-il si ce jeu de dupe dure cent ans ? Les contribuables européens auront transféré 100 milliards d’euros à la Turquie sans aucune contrepartie.
Le processus d’adhésion de la Turquie a en effet débuté en 1999, il y a déjà dix-sept ans. Sur les trente-cinq chapitres à négocier pour l’adhésion, un seul a abouti. Un seul dossier en dix-sept années ! Combien de temps pour les trente-quatre restants ? Et combien de dizaines de milliards en attendant que les négociations s’achèvent ? Le statut de candidat éternel est une belle affaire : elle génère des milliards pour la Turquie mais l’exonère des contraintes liées au statut d’État membre.
Même les Turcs ne veulent pas adhérer !
Or, personne ne croit à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Même les Turcs n’en veulent pas et les plus béats des Européens admettent qu’elle devient de moins en moins probable. Comment en effet accepter un État qui ne reconnaît même pas un membre de l’Union européenne (Chypre) ? Comment accepter un État classé 149e sur 180 pour la liberté de presse par Reporters sans Frontières ? Pour moins que cela, Bruxelles a ouvert une procédure de « sauvegarde de l’État de droit et des valeurs européennes » à l’encontre du gouvernement polonais. Il faut dire que Varsovie (classée 18e sur 180 par Reporters sans Frontières) a eu la mauvaise idée de modifier le mode de nomination des présidents des chaînes de télé et radios publiques. Un crime aux yeux de Bruxelles. Pendant ce temps, Erdogan condamne des journalistes à la prison à vie sans que l’UE ne songe même à suspendre le versement des milliards au titre d’une candidature qui s’éternise et qui n’aboutira probablement jamais.
Cette situation absurde n’est pas propre au processus d’adhésion. Dès qu’il s’agit de la Turquie, l’argent des Européens coule à flot. Ainsi, en octobre 2015, Mme Merkel avait offert à la Turquie un chèque de 3 milliards d’euros afin qu’elle maintienne les migrants chez elle. Résultat : le nombre de migrants arrivés sur les côtes européennes a explosé. D’après l’Organisation internationale pour les migrants (OIM), 45 000 migrants sont arrivés en Grèce via la Turquie en janvier 2016, soit 21 fois plus que les 1 500 enregistrés en janvier 2015. Et c’est la Grèce qui est menacée de sanction par l’Europe. La Turquie s’empare du magot et c’est la Grèce qui se fait tancer. Dans l’histoire du crime, rarement un casse aura été mené avec autant de brio.
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