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Énergie : comment l’UE compte remplacer le gaz russe

La situation est tendue, au moins jusqu'au printemps prochain.


Énergie : comment l’UE compte remplacer le gaz russe
Bateau méthanier (en vert et jaune), Loire Atlantique, Pays de la Loire France, 17/04/2019// PHOTO : GILE MICHEL/SIPA / 00918216_000001

L’Union européenne multiplie les sources d’approvisionnement et accélère le déploiement des énergies renouvelables, mais la situation restera difficile jusqu’en 2023.


L’invasion de l’Ukraine par la Russie a profondément réorienté la politique énergétique en Europe. Quelles mesures les gouvernements de l’Union européenne ont-ils prises pour faire face à la crise ? Un nouvel ensemble de données préparé par le ThinkTank Bruegel (un centre de réflexion pro-européen basé à Bruxelles et présidé par Jean-Claude Trichet) fournit un premier aperçu des réponses : promouvoir la diversification des sources d’approvisionnement du gaz, le changement de combustibles, les économies d’énergie, l’encouragement d’énergies renouvelables et des mesures d’efficacité énergétique.

Regazéification à tous les étages

Pour l’approvisionnement en gaz, l’Italie est de loin le pays qui a signé le plus de nouveaux contrats, notamment grâce à ses réseaux établis avec plusieurs fournisseurs africains. D’autres pays, en particulier l’Allemagne, n’ont pas encore conclu d’accords substantiels. En revanche, concernant les infrastructures gazières, l’Allemagne est en tête pour les ajouts de capacité de FSRU. Il s’agit des Unités flottantes de stockage et de regazéification (en anglais : Floating Storage and Regasification Unit, terminal méthanier flottant). Un navire amarré joue le rôle d’un petit port méthanier dont la fonction est de recevoir du GNL (gaz naturel liquéfié) transbordé depuis des méthaniers, de le stocker, de le ramener à l’état gazeux, et de l’injecter dans le réseau de transport et gaz. D’ici fin 2023, ces infrastructures temporaires et souples fourniront à l’Europe un total environ de 50 milliards de mètres cubes par an et de nouvelles capacités de regazéification. Pour avoir un ordre de grandeur, l’Union européenne consommait 400 milliards de mètres cubes de gaz en 2021, et donc sans être une panacée, 50 milliards de mètres cubes représentent une capacité non négligeable. Plusieurs pays font également évoluer les gazoducs, avec de nouvelles interconnexions dont certaines déjà mises en opération en 2022. C’est notamment le cas du gaz d’origine azerbaïdjanaise acheminé via la Turquie vers l’Italie et la Grèce.  

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L’utilisation du charbon dans la production d’électricité en Europe a quant à elle augmenté de plus de 37 térawatt-heure (en année pleine) au cours des neuf premiers mois de 2022. Sans remplacer le gaz russe, le charbon a essentiellement contribué à compenser des productions hydroélectriques et nucléaires nettement plus faibles – surtout en France à cause des raisons climatiques (un été particulièrement sec) et des problèmes de maintenance aggravés par un mouvement de grève.

Report de la fermeture de réacteurs nucléaires

Par ailleurs, l’Allemagne vient de décider de maintenir trois (en non pas deux) réacteurs nucléaires en fonctionnement jusqu’en avril 2023 et la Belgique a décidé de reporter la fermeture de deux réacteurs. L’ensemble de ces mesures pourraient conduire à des économies potentielles de gaz d’environ 7 milliards de mètres cubes par an. Autrement dit, même pas la consommation d’une semaine hivernale.

Concernant l’économie d’énergie, les pays de l’Union européenne se sont mis d’accord sur des objectifs de réduction de la demande de gaz et d’électricité, avec quelques dérogations et certaines obligations. C’est sur ce levier que les gouvernements pourraient agir à court et à très court terme. Chaque pays prépare sa liste de mesures, de bâtons et de carottes.

Les Etats-membres de l’Union européenne ont également accéléré le déploiement des énergies renouvelables, notamment en assouplissant les règles liées à leur extension et en simplifiant les procédures d’appel d’offres pour accélérer les processus d’autorisation. Première conséquence quasi immédiate : l’importation de panneaux photovoltaïques fabriqués en Chine explose… tous les pays ont accéléré la mise en œuvre des mesures d’efficacité énergétique souvent focalisées sur les secteurs du bâtiment et de l’industrie. C’est un gisement intéressant, car ces mesures pourraient permettre de réaliser d’importantes économies de gaz de 36 milliards de mètres cubes d’ici fin 2023 et jusqu’à 120 milliards de mètres cubes par an d’ici 2030. La situation est donc tendue, au moins jusqu’au printemps prochain, voire fin 2023.  




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est historien et directeur de la publication de Causeur.

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