Accueil Monde «Empoisonnement d’Arafat» : Et maintenant, la piste Mahmoud Abbas ?

«Empoisonnement d’Arafat» : Et maintenant, la piste Mahmoud Abbas ?


«Empoisonnement d’Arafat» : Et maintenant, la piste Mahmoud Abbas ?

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Panique à Ramallah ! Sitôt en possession des résultats du rapport de l’Institut de radiophysique  de Lausanne sur l’analyse toxicologique des restes de Yasser Arafat, sa veuve Souha, née Tawill, les a communiqués à la chaine qatarie Al-Jazira, qui soutient ouvertement le Hamas contre Mahmoud Abbas. Ce rapport, mis dans son intégralité en ligne sur le site d’Al-Jazira, conclut que ses investigations « soutiennent modérément l’hypothèse du polonium comme cause de la mort ». Les scientifiques helvètes fondent leur conviction « modérée » (???) sur la découverte de doses de polonium environ vingt fois supérieures à la normale dans quelques os du leader palestinien décédé à Paris en novembre 2004.  La hâte avec laquelle Suha Arafat a rendu public ce rapport, qui est également parvenu à son commanditaire, l’Autorité palestinienne, relève d’une opération de communication destinée à mettre Mahmoud Abbas et son clan dans l’embarras. En conflit avec l’Autorité palestinienne pour de sordides histoires d’argent, la veuve d’Arafat veut préempter à son profit l’opinion arabe et mondiale : ce serait grâce à elle, et en dépit de la réticence des dirigeants palestiniens, que la « vérité » sur la mort du Raïs aurait été établie.

Il fallait que le rapport suisse fasse la Une de la presse mondiale avant que les résultats des deux autres laboratoires, missionnés par l’Autorité palestinienne et la justice française, ne soient rendus publics. Or, il se trouve que le rapport russe, selon des informations publiées par l’agence moscovite Interfax, lui aussi transmis à Ramallah, ne confirme pas la thèse de l’empoisonnement au polonium. L’investigation du laboratoire français, qui n’est pas encore achevée,  n’est pas destinée à être rendue publique, mais doit servir aux juges d’instruction traitant de la plainte contre X pour assassinat déposée devant le procureur de Paris par Souha Arafat à prendre une décision : poursuivre l’enquête ou classer le dossier. Quelles qu’en soient les conclusions, Souha Arafat a gagné : le label  suisse de l’expertise qui conforte (modérément !) sa thèse est un argument de poids face à des contradicteurs scientifiques que l’on soupçonnera d’être soumis à la raison d’Etat des pays dont ils sont les ressortissants, la Russie et la France. Jacques Chirac et ses successeurs n’ont-ils pas mis et gardé sous clé le rapport établi par les médecins militaires de l’hôpital Percy de Clamart sur les circonstances de l’agonie et la mort de Yasser Arafat ? Et quel crédit accorder à des scientifiques dont le laboratoire dépend exclusivement des crédits de Poutine ?

Dans l’affaire, c’est moins Israël qui est visé que les dirigeants de Ramallah. L’Etat juif a appris à vivre avec le soupçon récurrent d’avoir voulu, par tous les moyens, la peau de Yasser Arafat, une accusation qui emporte la conviction de la majorité de la « rue arabe », de l’Atlantique au Golfe persique. Or, le rapport suisse implique que seul un très proche d’Arafat aurait pu être en mesure de lui administrer, à son insu, les doses mortelles d’un poison aussi délicat à manier que le polonium. Comme, à l’époque, Mahmoud Abbas était en conflit ouvert avec Yasser Arafat au sujet de la « militarisation » de la seconde Intifada, on voit assez bien à qui, aujourd’hui, le battage médiatique de Souha peut causer du tort…

La vengeance d’une veuve qui s’estime spoliée, lorsqu’elle est menée avec habileté et persévérance, peut renverser des montagnes et ébranler des trônes. On en regrette d’autant plus la disparition de Gérard de Villiers, qui aurait pu nous mijoter un SAS aux petits oignons sur les dessous d’une affaire où la « grande politique » fait bon (ou mauvais) ménage avec les querelles de sérail.

*Photo : Nasser Ishtayeh/AP/SIPA. AP21332725_000001.



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