Après McFly et Carlito, le président répond aux questions de Pif Gadget. Et pour la loi immigration, il va parler à OK Podium ou aux Télétubbies? Le macronisme, c’est l’infini du mépris à portée de bac à sable, selon notre chroniqueuse.
Pif paf pouf … on a d’abord cru que c’était une blague fraichement sortie du Gorafi, tant le nom du président de la République accolé au titre de ce magazine pour enfants apparaissait inimaginable, totalement impossible car tellement inapproprié. Mais, aussi grotesque que cela puisse paraître, Emmanuel Macron a bien donné une interview à l’ancien magazine communiste repris par l’ex secrétaire d’Etat chargé du Commerce et de l’Artisanat sous Nicolas Sarkozy, Frédéric Lefebvre !
L’interview a eu lieu le 20 février, c’est-à-dire après la fin des débats sur la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, mais avant le 49.3. Le jour de cette interview, cinq manifestations avaient déjà eu lieu depuis le début de l’année, le mouvement de contestation était déjà massivement soutenu par les Français, et la menace d’une France à l’arrêt commençait à se faire entendre.
Niveau cour de récré
Mais dans ce climat de gronde sociale inquiétante, Emmanuel Macron s’est dit que la meilleure façon de renouer le dialogue et de désamorcer la crise, c’était de s’adresser aux lecteurs de 10 ans de Pif Gadget ! Peut-être qu’à ce moment-là, le chef de l’Etat s’est dit qu’à défaut avoir pu convaincre les adultes des bienfaits de sa réforme, il fallait déployer ses capacités de grand pédagogue auprès de leurs enfants, futurs électeurs – et surtout plus crédules… Au lieu d’arrêter de voir dans le refus de la réforme un manque de compréhension des Français, Emmanuel Macron a continué à prêcher dans la cour de récré.
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On mesure le chemin parcouru depuis le général De Gaulle, qui, lors du Putsch d’Alger d’avril 1961 ou lors des évènements de 1968 s’était exprimé à la télévision à travers un discours bref et solennel aux Français, comme lui seul en avait la maitrise. A défaut de jouer dans la cour des Grands Hommes, Emmanuel Macron s’agite dans le bac à sable des petits.
La com de Macron ? Pas glop pas glop
Reconnaissons que le président nous a maintenant habitués à ces bouffonneries jupitériennes, enfin, vulcaniennes ! Apres Mcfly et Carlito faisant des galipettes sur la pelouse de l’Elysée, les affiches de campagnes en mode séries Netflix, voici la communication version Pif Gadget pour séduire non plus la génération Z, mais celle d’après. Les marketeux la nomment alpha !
Mais comment ne pas rire jaune devant cette opération de com’ qui ne peut être considérée que comme du mépris, et qui rappelle cet épisode fâcheux au cours duquel Elisabeth Borne avait reçu un maillot de foot flanqué de son numéro fétiche, le 49-3, et s’était faite photographier complètement hilare ? C’est certain qu’avec onze emplois de l’article maudit de la Constitution au compteur, il y avait de quoi pleurer de rire !
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Quand, en réponse à la question sur ce qu’il aime dans son métier, le président dit que c’est « l’échange, la rencontre », comment ne pas comprendre les syndicats, et pardonner le langage fleuri du chef à moustache de la CGT ? « Il se fout de nous » ! Dans la bouche de celui qui a raillé les gaulois réfractaires, qui a méprisé « les gens qui ne sont rien », qui a pris un malin plaisir à « emmerder » les non-vaccinés et qui aujourd’hui s’obstine à maintenir cette réforme des retraites malgré l’absence de vote au parlement et le rejet du peuple, ces mots sonnent comme de la provocation. Mais ce qui est finalement le plus révélateur, c’est donc moins le fond que la forme, c’est moins la litanie de formules hypocrites que la symbolique à laquelle renvoie le titre de ce magazine.
S’exprimer dans un magazine comme Pif Gadget, fondé en 1969 et vendu avec l’Humanité, quotidien fondé par Jaurès qui se voulait être le représentant le mouvement ouvrier syndical, revient encore une fois à offenser ce peuple d’ouvriers et d’employés qui se retrouvent pénalisés par cette réforme des retraites mal faite et injuste pour ceux qui ont commencé à travailler tôt ou qui ont exercé des métiers physiquement pénibles. Cette pénibilité que le chef de l’Etat a d’ailleurs foulée au pied en supprimant quatre de ces critères sous son précèdent mandat… Et, bien sûr, rappellons que Pif Gadget a fait toute sa réputation à travers son principal attrait commercial : le gadget vendu avec ! Et l’on peut se demander si la France n’est pas pour Emmanuel Macron autre chose qu’un divertissement pour passer le temps, un gadget qu’on utilise pour se faire valoir à l’étranger… et qu’on jette quand on a fini de faire mumuse.
Pour la prochaine interview du chef de l’État, je propose les Télétubbies !