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Égalitarisme contre élitisme

À choisir, prenons l’élitisme!


Égalitarisme contre élitisme
Le champion Kevin Mayer, JO de Tokyo, 5 août 2021 © Matthias Schrader/AP/SIPA Numéro de reportage : AP22593213_000934

Les années 1970 auront été décisives pour l’École. Le collège unique, le regroupement familial, des programmes revus partout à la baisse, l’Histoire-Géographie devenue matière d’« éveil », et la baisse de l’horaire obligatoire, cela ne suffisait pas. On inventa la « massification », corollaire du collège unique. Et pour sanctifier ce melting pot pédagogique, on instaura un égalitarisme forcé…


Un phénomène parallèle se fit alors jour à l’université. Nombre d’enseignants qui savaient bien qu’ils ne brilleraient jamais dans leur discipline glissèrent vers la didactique de cette discipline. Vous êtes « philosophe » (ainsi appelle-t-on en France, très abusivement, les profs de philo), vous savez que vous n’êtes pas Kant et que vous ne serez jamais Alexis Philonenko, sans doute l’un de ses plus brillants commentateurs : il vous est encore possible de devenir didacticien de la philosophie — ou comment enseigner ce que vous ne maîtrisez que de façon médiocre. Il en fut de même en Lettres, en Maths, en Langues, en Histoire. On créa, pour satisfaire la demande, une foule de postes de pédagogie qui greva lourdement les capacités de renouvellement des autres disciplines. 

À la source de ce mouvement réside une haine de l’élitisme. Les pédagogues sont, en très grande majorité, des gens qui ont échoué aux divers concours qui jalonnent la carrière — de l’entrée à l’ENS à l’Agrégation. Ils se sont rabattus sur des « recherches » parées d’une aura scientifique usurpée.

Nous avons tellement baissé la barre qu’elle est désormais au ras des pâquerettes — et nous persistons à distribuer des médailles en chocolat — le Brevet ou le Bac, par exemple — à des culs-de-jatte du cerveau, atrophiés par nos soins — et sur ordre…

Ils ont donc une grande méfiance pour les gens trop doués. La médiocrité — au sens de meden agan delphien : rien de trop — est leur tasse de thé. 

Il fallait donc nécessairement baisser la barre, et cette métaphore empruntée au saut en hauteur fait pleinement sens. C’est par l’Éducation Physique et Sportive (EPS) que le pédagogisme est entré à l’école.

Tous ceux dont les dispositions à l’envie et à la jalousie l’emportent sur leur propension à admirer comprendront mon propos. Il y a, pour un sous-doué du muscle, quelque chose d’insultant dans la facilité avec laquelle un camarade de classe saute 1m80 en hauteur en Troisième ou court, à la même époque, le 80 m en 9 secondes. Les anciens classements de l’EPS se fondaient sur la performance — anti-égalitaire par essence. On changea cela en appréciant désormais la cohérence entre le projet de l’élève et sa réalisation : j’envisage


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Normalien et agrégé de lettres, Jean-Paul Brighelli a parcouru l'essentiel du paysage éducatif français, du collège à l'université. Il anime le blog "Bonnet d'âne" hébergé par Causeur.

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