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Philippe emporté par la vague verte?

Attention à ne pas boire la tasse!


Philippe emporté par la vague verte?
Louis de Funes / Capture YouTube

La séquence électorale des municipales à peine terminée, le gouvernement Philippe démissionne. La reconduction du Premier ministre est très incertaine. En plus de se couper des Français des champs, les Français des villes qui ont élu des maires Verts vont vite déchanter ! Les obsessions idéologiques du mouvement EELV transforment la vie de citadins rêveurs en cauchemar. S’il est satisfait de sa performance électorale, le parti écolo ne doit pas trop se bercer d’illusions sur son avenir lui non plus. Chronique des derniers jours.


Ils s’appellent Grégory Doucet (Lyon), Pierre Hurmic (Bordeaux), Michèle Rubirola (Marseille), Jeanne Barseghian (Strasbourg), Emmanuel Denis (Tours) ou Anne Vignot (Besançon). Peu connus, tous ces écolos vont s’installer dans le fauteuil de maire. Comme Edouard Philippe au Havre ?

Le soir des résultats, à la télévision, les sourires étaient de sortie chez la plupart des commentateurs. Le gentil vote vert, en adéquation avec toutes les lubies dont se repaissent les journalistes, n’est pas tous les soirs à la fête. Notre collaboratrice Céline Pina a gentiment raillé ce vote : “Ces électeurs votent petits oiseaux et jolies fleurs, cela les met dans le camp du bien. Personne ne les agresse dans les dîners de famille et personne ne leur demande de justifier ce type de vote !” Le vote EELV : un vote faussement dégagiste, prêt-à-penser et facile à porter.

Les élus des villes évoquées plus haut ont vite reconnu une ombre au tableau : la faible participation au scrutin. Seulement 41,6% au niveau national. La crise civique devient une préoccupation pour tous les partis, jusqu’au RN. Dimanche, Marine Le Pen se lamentait : “J’ose espérer que cette abstention est liée exclusivement à la crise sanitaire. Mais je crains que cela ne soit pas obligatoirement le cas.” Seuls les Insoumis avancent une solution au problème, en proposant de passer à leur angoissante VIe République. 

Jadot se voit déjà à l’Élysée

La “vague verte” est donc à relativiser. Seul un tiers du corps électoral était appelé aux urnes (essentiellement l’électorat urbain), et la période estivale approchant, de nombreux citoyens ne savaient tout simplement pas qu’on votait. L’abstention ne permet pas de tirer un quelconque enseignement politique quant aux rapports de force nationaux. Mais pourtant, on nous garantit que les Français ont soif d’écologie.

A lire aussi, du même auteur: L’arrêt-maladie qui a gâché la campagne de Michèle Rubirola à Marseille

Dimanche soir, invité de la deuxième chaîne, le patron des Verts Yannick Jadot était sur un petit nuage. Il passait visiblement une excellente soirée. La réalisation proposait régulièrement des plans de coupe sur ce grand costaud qui exultait, alors que les résultats tombaient. À n’en pas douter, il imaginait que l’Élysée lui était promis. Olivier Faure, le patron des socialistes, également présent, a confirmé que la gauche devait proposer une candidature unique en 2022. Voilà qui ne pouvait que conforter Jadot dans sa rêverie.

Sur France 2, le signal de Besançon 

Jolies fleurs, jolies pensées, lubies du moment et donc bien sûr : féminisme ! Les premiers mots de la maire de Besançon sont assez savoureux. Après que Laurent Delahousse ait écorché le nom d’Anne Vignot, la journaliste de France 2 lui demande en duplex “C’est une grande joie, une grande satisfaction, je suppose ?” La nouvelle édile confirme tout ce bonheur. Dans cette campagne, la Franc-comtoise a joué la carte de la “féminitude” : “Non seulement je suis une femme, écologiste. Je l’ai senti pendant toute la campagne. Le fait de lancer cette idée qu’une femme à Besançon, c’est quelque chose de tout à fait nouveau, c’est un signal très important” a-t-elle péniblement avancé. 

Macron est tenté par un grand virage écolo. Il pourrait par conséquent ne pas reconduire le très populaire Philippe

Puis, elle a promis de solutionner les problèmes du quartier de Planoise. Alors que son rival de droite lançait “énormément de signaux sécuritaires” (ce fou, il ne s’agit que de fusillades!), elle a proposé sa méthode : “Les femmes se rassemblent autour de moi (…) J’espère que ce sera le signal d’une politique qui se fera autrement à Besançon et plus une question de virilité, mais de plus d’intelligence auprès des familles…” Vivement les travaux pratiques.

Sur France inter, des maires mutiques

Le lendemain matin, sur France inter, malgré la complaisance de Nicolas Demorand et Léa Salamé pour leurs invités, Grégory Doucet, Pierre Hurmic et Jeanne Barseghian, eux, n’étaient pas bien bavards. “Il va falloir retenir leurs noms !” s’enthousiasme Demorand auprès de ses auditeurs. Il salue ensuite les stars du jour. “Bonjour à tous les trois ! Bah alors, il y en a qu’un que j’entends?” commence-t-il, hilare. 

Comme les invités avaient des petites voix, Léa Salamé a posé ses questions les plus difficiles : “Monsieur Doucet, vous n’êtes donc pas cet ayatollah de l’écologie, ce khmer vert que dénonçaient vos adversaires à Lyon?” Scoop: l’humanitaire ne le serait pas. Grande professionnelle, exemplaire de neutralité, Salamé poursuit : “Est-ce que vous pensez que les Verts sont prêts aujourd’hui pour 2022 ?”… De son côté, incapable de répondre quand Demorand lui demande quelles seront les premières mesures qu’elle compte prendre, Jeanne Barseghian indique qu’elle va “déclarer l’état d’urgence climatique à Strasbourg”, tout en “renouvelant les pratiques” et en espérant que ledit état d’urgence “irrigue l’ensemble des politiques publiques municipales”. Elle rappellera également le slogan de sa campagne victorieuse : “Demain commence aujourd’hui.” Les Alsaciens, quels audacieux.

Inquiétudes

On peut mettre l’absence totale de faconde des élus sur le compte d’une longue nuit de fête. Mais leur manque d’expérience politique pour gérer de grandes villes (ou simplement un conseil municipal houleux !) et ce progressisme fou qui gagne les villes peuvent aussi inquiéter. À la droite de la droite, Julien Rochedy persifle et caricature : “Je vous résume le programme des écologistes pour la France : plus d’éoliennes et plus de mosquées. Et parfois, ça s’embrouille même entre eux pour savoir quelle est la priorité entre les deux.”

À Grenoble, le bilan d’Eric Piolle, réélu, est décrié : situation sécuritaire alarmante, trafics de drogue, budget maintenu dans le rouge et attractivité de la ville pour les entreprises négligée. « Ceux qui sont dans un mode croissantiste se leurrent » affirme l’élu de la capitale des Alpes, qui s’enorgueillit en outre de ne pas avoir d’adjoint à l’économie.

A lire aussi, Céline Pina: Municipales: EELV vainqueur par K.-O. démocratique

Pendant son premier mandat, il a préféré multiplier rues piétonnes, limitations de vitesse et autoroutes à vélo. La pollution a cependant fait la grève de la décroissance, et la ville est passée de la 7e à la 4e place parmi les villes les plus embouteillées de France. Peu importe, les maires élus à Lyon, Bordeaux ou Strasbourg ne tarissent pas d’éloges sur le Grenoblois. Il est inutile de dire que le communautarisme rampant ne les préoccupe nullement. Et si le feuilleton des burqini dans les piscines a passionné les lecteurs de Causeur l’été dernier, le maire de Grenoble n’y voyait pas vraiment un problème.

Pour l’avenir de Philippe, Macron est-il plutôt Le Figaro ou France inter ?

Après cette vague verte, attention aux lunettes déformantes. 

Comme le dit Jérôme Sainte-Marie, le succès d’EELV dans un nombre significatif de grandes villes peut certes avoir un “effet performatif sur la vie politique des prochains mois” et porter les Verts vers d’autres succès (peu mérités). Mais le politologue invite aussi à la mesure. 

Il déclare au Figaro que ces élections ont surtout “constitué un moment d’apesanteur dans la crise multiforme que traverse le pays, n’en résolvant aucun des termes et aggravant le hiatus entre les préoccupations populaires et la politique instituée.” 

Au lendemain de ces municipales, Macron est tenté par un grand virage écolo. Il pourrait par conséquent ne pas reconduire le très populaire Philippe. S’il ne veut pas se couper davantage d’une majorité de Français et sauf à ce que la mésentente soit consommée entre les deux hommes forts de l’exécutif, le président serait bien inspiré d’éviter cette erreur. Espérons qu’il ait privilégié la lecture du Figaro à l’écoute imprudente des médias publics cette semaine !

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