En cette rentrée scolaire, nous invitons le futur ministre de l’Éducation nationale à prendre la mesure de la détresse des naufragés de l’institution qu’il aura à charge de piloter pendant quelques mois : la détresse des élèves, celle de leurs parents, celles des enseignants, des personnels administratifs et des agents techniques (qu’on oublie trop souvent), et, au-delà, celle de la nation tout entière qui, privée de ce qui la soude et la fait vivre, est vouée à une atrophie lente et progressive et au dégoût de la liberté qui l’accompagne. Il n’est pas digne, en effet, d’un commandant, quand le navire commence à sombrer, de ne pas avertir l’équipage pour lui permettre d’affronter la situation d’urgence et de sauver ceux qui peuvent encore l’être.
C’est un vaisseau troué de part en part sous sa coque. Ses voies d’eau sont connues :
- illettrisme,
- chute du niveau de performances depuis trente ans,
- baisse de la qualité des enseignants et augmentation des contractuels,
- inégalité des chances record parmi les pays de l’OCDE, un scandale pour une école qui se dit « républicaine » et qui ne profite qu’aux plus nantis en capital culturel,
- détérioration de la santé mentale des jeunes,
- aggravation du harcèlement scolaire,
- multiplication des agressions verbales ou physiques contre les enseignants et le personnel administratif par les élèves ou les parents,
- contestation des règles scolaires et de l’autorité,
- discriminations et intimidations antisémites contre des élèves aussi bien que des enseignants juifs,
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- pression islamiste pour s’attaquer à la laïcité, aux mœurs et aux normes de la société française (comme celles liées à l’égalité des sexes ou à la mixité, à la liberté de croire ou de s’habiller comme on veut), pour imposer les lois de la charia en classe, contester les savoirs et les humanités, intimider, menacer et tuer les enseignants,
- incapacité de l’institution à intégrer une masse de plus en plus grande d’enfants immigrés dont l’histoire et l’environnement s’avèrent souvent chaotiques et dont les normes culturelles s’opposent parfois vigoureusement aux nôtres,
- consumérisme des élèves et des parents,
- angoisse devant un parcours scolaire qui paraît souvent hasardeux,
- perte du sens de la transmission,
- coût moyen de l’élève exorbitant au regard des résultats – 10 700 € par an en secondaire –, un gâchis phénoménal qui oblitère l’investissement dans d’autres services publics.
Certes, l’institution semble encore flotter hors de l’eau, grâce à la volonté inébranlable de ceux qui la servent et qui savent ce qu’ils lui doivent. Mais elle n’est plus en mesure de remplir sa fonction émancipatrice par la transmission de notre héritage humaniste. Elle entraîne déjà avec elle l’université vers le même fond de bêtise et d’indifférence à ce que nous sommes. Avant de pouvoir refonder une école réellement au service de tous, nous demandons au prochain ministre de ne pas ajouter son nom à la longue liste des « capitaines couards » qui, au lieu de donner l’alarme en plein naufrage, ordonnent de réparer une panne d’électricité.