Attention, il ne faut pas confondre l’épaulard ou orque (Orcinus orca) avec le pacifique dauphin commun (qui sert essentiellement à illustrer des posters qui ornent les chambres d’adolescentes) ou la baleine banale débonnaire (que le courageux pêcheur islandais des estampes anciennes ramenait jadis à son Islandaise, grâce à un harpon). Non, l’orque, c’est autre chose. On l’appelle vulgairement « baleine tueuse » ou encore « baleine à dents ». Il peut mesurer jusqu’à 10 mètres de long et peser 11 tonnes. Et ses dents acérées, précisément, peuvent mesurer 8 centimètres. Cela dresse tout de suite un portrait assez parlant du personnage ; c’est un animal avec lequel il convient de ne pas trop badiner. Et l’homme l’aime tellement qu’il en garde quelques spécimens en captivité dans des parcs d’attractions, afin de les regarder de près et toucher du doigt leur inquiétante grâce aquatique.
On apprend que l’association de défense des animaux PETA a porté une hallucinante plainte devant le tribunal fédéral de San Diego (Californie) au nom de cinq de ces épais cétacés, baptisées Tilikum, Katina, Corky, Kasatka et Ulises qui interprètent des numéros acrobatiques dans des parcs d’attractions SeaWorld, pour la distraction et l’agrément d’humains américains adultes et de leurs enfants du même métal. L’association voudrait – rapporte l’AFP – que le tribunal reconnaisse que les orques sont « soumises à l’esclavage et/ou à la servitude involontaire en violation du 13ème amendement de la constitution des États-Unis », et donc, puissent elles-mêmes porter plainte. Pour l’association « l’esclavage ne dépend pas plus de l’espèce de l’esclave que de la race, du sexe ou de l’ethnie ». On aimerait dire : c’est assez !
La semaine dernière, la justice fédérale a finalement débouté les Peta et écarté ses élucubrations antispécistes. Les orques ne pourront pas porter plainte contre leurs employeurs. Pas de syndicats pour Orcinus orca ! Ivre d’un lyrisme angoissant le porte-parole de l’association, David Perle, a cependant assuré que cette plainte n’était que le premier pas vers « le jour inévitable où tous les animaux seraient libérés de l’esclavagisme pour l’amusement des humains ». Un jour radieux où, comme dans La Ferme des animaux de George Orwell, les opprimés à poils, plumes et écailles, prendront leur liberté sur leurs infâmes oppresseurs humains ? On sait pourtant comment se termine la pessimiste fable de l’écrivain anglais : les animaux deviennent aussi chiens que les hommes, et les cochons finissent par se vouloir « plus égaux » que les autres… Quant aux orques Tilikum, Katina, Corky, Kasatka et Ulises, avec qui il convient de ne pas badiner, n’ont-elles pas eu le sentiment diffus, dans cette affaire, de se faire instrumentaliser ? Il faudrait interroger à ce sujet leur déléguée du personnel, quand elle aura terminé sa ration quotidienne de chair de phoque.
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