Il y a des vérités qui dérangent, il y en a d’autres qui m’arrangent. Par exemple, je partage avec mes compatriotes les plus lucides l’idée que l’atlanto-libéralisme est l’avenir de l’homme. Seules quelques sectes marxistes qui se maintiennent sur les béquilles de leur mauvaise foi refusent encore de voir la lumière. Mais ce n’est qu’une question de temps.
Si, en politique, la franchise est jubilatoire, en amour la prudence s’impose. Dans la conquête des femmes, toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire et la séduction exige une subtile maîtrise du mensonge ou, au moins, de la dissimulation. Il est vivement conseillé dès la première rencontre de laisser dans l’ombre ses arrière-pensées les plus arriérées et les moins pensées. On vous pardonnera d’être un hypocrite, pas d’être une brute (sauf dans le feu de l’action).
[access capability= »lire_inedits »]Il faut bien le reconnaître, le mensonge est le compagnon de route de l’homme dans sa vie sentimentalo-sexuelle. On ment pour séduire une femme, on ment pour la garder et on finit par mentir pour abréger la conversation. Evidemment, de telles pratiques finissent par faire naître dans les cerveaux mâles les plus fragiles un sentiment connu de tous : la culpabilité.
Difficile de vivre avec, deux solutions permettent de s’en délivrer : l’ablation sans anesthésie – « Même pas mal ! » – et l’expiation par le mariage. Pourtant, jusqu’à une époque assez récente, la volatilité du sentiment amoureux masculin demeurait plutôt mal vécue (par les femmes) et très peu assumée (par les hommes). Mais peut-on reprocher à l’individu le comportement de l’espèce ?
Heureusement, les progrès de la science, dont l’objectif est de nous faciliter la vie, notamment ceux de la neurobiologie, sont venus réparer une grande injustice. Les sciences les plus exactes, les expériences les plus incontestables l’affirment : nous sommes innocents des turpitudes que nous commettons. La mort prématurée du sentiment, la pratique de l’adultère, nous n’y sommes pour rien ou presque. Nous sommes programmés pour : c’est chimique, neuronal, moléculaire, et même génétique.
De la naissance du désir par les phéromones à l’amour qui dure trente mois, tout devient clair. Tout rentre dans l’ordre naturel des choses, des hommes et des femmes. Les expériences sur l’attraction des sexes sont troublantes. Dans une salle d’attente, plusieurs chaises vides. Sur l’une d’elles, une odeur mâle a été pulvérisée. Des femmes se succèdent et préfèrent invariablement la chaise mâle aux chaises asexuées. On n’est pas dans un roman de Marc Lévy : la science, elle, ne ment pas.
Pour l’amour, cette religion qui dure trente mois, l’explication est désarmante de simplicité. Lors d’une rencontre amoureuse, le corps libère je ne sais quelle molécule qui laisse des traces visibles dans le sang pendant trente mois. Quand je pense à tout ce qu’on a entendu, les uns et les autres, sur l’air de « T’as pas de cœur » ou « Tu t’es bien foutu de moi ! », les questions en avalanche au moment de rompre pour lesquelles nous n’avons pas la queue d’une réponse, je me dis que nous pouvons rendre hommage aux chercheurs pour cette issue de secours inespérée. Nous sommes esclaves de nos chairs, aux ordres de l’infiniment petit qui circule dans nos veines.
Le discours amoureux, de Julien Sorel à Julien Clerc, est renvoyé aux contes et légendes de la mythologie féminine par un cours de physique-chimie. Une fois admises par les esprits traditionnellement accrochés au mythe de l’amour-toujours, ces découvertes prodigieuses seront à l’origine d’un homme nouveau, décomplexé, déculpabilisé, qui pourra enfin vivre une sexualité libre et épanouie.
Il nous faut répandre la bonne nouvelle. Je m’y emploie.[/access]
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !