Vive la droite dure!


Vive la droite dure!

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Je sais que la phrase que je vais écrire pourra être retenue contre moi, surtout si on l’isole de son contexte mais enfin il faut que ça sorte. J’en arrive à trouver Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen et Laurent Wauquiez sympathiques. Enfin, sympathique est peut-être un bien grand mot, mais je les trouve cohérents, au moins avec eux-mêmes, ce qui est un minimum et avec leurs électeurs, ce qui est plus  rare puisque les promesses, c’est bien connu dans nos post =démocraties depuis Chirac, n’engagent que ceux qui les croient. Wauquiez, MLP et Sarkozy sont de droite. Ils sont de droite dure, voire un peu plus. Et ils le disent. Ils ne trompent pas sur la marchandise, contrairement à leurs adversaires.

Les socialistes, par exemple, ne sont plus socialistes depuis belle lurette, disons le virage de la rigueur en 83. On dit qu’ils sont devenus sociaux-démocrates, ce qui est un abus de langage. La social-démocratie avait encore l’intention de changer un peu la vie en encadrant sévèrement le capitalisme et en redistribuant les profits pour éviter que ne se creusent les inégalités. Désormais, pour eux, il ne s’agit même plus de contrer le libéralisme, mais de l’accompagner, de lui faciliter la vie et de gommer, quand c’est possible, c’est-à-dire pas très souvent, quelques aspects trop criants de ce réaménagement total de nos vies sous le signe de la concurrence libre et non faussée, de la responsabilité, de la précarité repeinte aux couleurs de l’autonomie nomade, façon auto-entrepreneur.

Et encore, s’il n’y avait que les socialistes. Mais il y a le centre. Le centre, en France, c’est un peu comme Dieu dans sa création : il est présent partout même si on ne le voit nulle part. Croire qu’il est circonscrit à l’UDI serait une erreur. Le centre recouvre un prisme très large qui va de Juppé à Cambadélis, en passant par NKM, Valls ou même François Hollande. La différence entre les centristes et les socialistes est assez simple, en fait : un jour lointain, les socialistes ont été de gauche tandis que les centristes ont toujours été centristes.

Comment s’étonner, dans un tel contexte, que tous ces gens traumatisés par 6, 8 millions d’électeurs FN veuillent se faire des mamours en parlant de Front républicain à toutes les sauces? Raffarin veut que tout ce gentil monde se mette autour d’une table et fasse de gentilles propositions pour lutter contre le chômage en cassant le code du travail, par exemple. Ou alors c’est Xavier Bertrand, touché par la Grâce depuis qu’il est devenu président de région avec des voix de gauche, qui rencontre François Hollande à Neuville Saint-Vaast (Pas de Calais) pour rentre hommage aux soldats allemands, français et anglais qui fraternisèrent à Noël 14 entre deux carnages. Le symbole est lourdingue, en plus il indique bien les rapports défaitistes et masochistes que l’on entretient avec notre histoire. On ne parlera plus de la guerre que pour en souligner l’absurdité, la même absurdité sans doute qui force des gens aussi responsables et courtois que les socialistes, les centristes et la droite modérée à se détester alors qu’ils pensent la même chose, en fait. C’est la revanche tardive de Giscard qui rêvait, en son temps de rassembler deux français sur trois sous le signe du libéralisme avancé. Je ne sais pas si cette mollesse dangereuse est due au climat particulièrement douceâtre pour la saison, mais c’est franchement étouffant, cette guimauve de la réconciliation.

Heureusement, Marine Le Pen, Wauquiez et Sarkozy ne tombent pas dans ce piège-là. Ils nous rappellent que la politique, c’est moche, c’est violent, c’est machiavélien, c’est méchant. On ne va pas faire semblant de s’aimer alors que ce qu’on veut c’est le pouvoir. Si on est un grand homme, on veut le pouvoir pour changer la société et si on est moins grand, on veut le pouvoir, parce que le pouvoir, c’est jouissif. Alors Marine Le Pen, Wauquiez et Sarkozy cognent. On compare Marine Le Pen à Daech, elle twitte des photos de décapitations. C’est dégueulasse ? Pas plus que cette comparaison et dieu sait que je n’aime pas le FN. Sarkozy recommande le ni-ni et vire NKM qui dit le contraire ? Il est chef  de parti et un chef de parti n’est plus un chef s’il ne sait plus  donner la punition. Quant à Wauquiez, lui, il n’a pas hésité à diffuser des tracts pendant sa campagne qui étaient de purs démarquages de ceux du FN ? Et alors, ce qui compte, en politique, c’est de gagner.  Les belles défaites sont vite oubliées tandis qu’un vainqueur détestable reste un vainqueur. C’est en ce sens qu’un Jean-Pierre Masseret, pourtant socialiste, en se maintenant au second tour au risque de faire passer Philippot a bien eu raison : il continuait à faire de la politique, pas de la morale.

C’est dégoûtant ? Ça encourage l’abstention ? Et alors, les hommes politiques conséquents savent qu’un abstentionniste a au moins un avantage, et pas des moindres,  il ne vote pas contre eux. Et c’est bien le problème de mon camp, la gauche de la gauche, ces temps-ci : elle est inaudible parce qu’elle n’est pas assez méchante, au fond. Il est temps pour nous, camarades,  en vérité, je vous le dis, de remettre le couteau entre les dents. Comme ceux d’en face.

*Photo: Sipa. Numéro de reportage : 00734380_000006.



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