J’ai toujours eu pour Pierre Drieu La Rochelle un mélange de fascination et de dégoût. Fascination pour le décadent qui a su si bien peindre et analyser la décadence.[access capability= »lire_inedits »]
Fascination pour le guerrier d’idéal qui, parmi les premiers, a compris où nous menait l’univers technique et qui, face aux hécatombes idiotes et sans panache de la Première Guerre mondiale, en est venu à prôner la désertion. Fascination pour l’écrivain qui, envers et contre tout, entendait tirer sa puissance de la déliquescence généralisée.
Mais Drieu me dégoûte aussi un peu, en raison notamment de l’interférence délirante de sa sexualité avec à peu près tout ce qui le constitue. Sa hantise des vierges, son amour de la saleté pour la saleté, son désir de chef à bite, tout le bazar du traumatisé, en contradiction avec la « santé » qu’il réclamait pour la société ; il y a chez lui une névrose post-chrétienne un peu lourde.
« Je bande toujours mais je ne jouis jamais », disait-il à ses amis. C’est un langage d’anachorète, du genre à se percher sur une colonne pendant cinquante ans et à y grignoter des lézards.
Il y a en lui une énergie gaspillée, une force stérile. À côté de ça, Drieu est évidemment un immense écrivain.[/access]
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