Pierre Drieu la Rochelle est une personnalité difficile à décrypter. Un écrivain au talent immense, un homme pétri de contradictions, un cousin européen de Fitzgerald devenu, selon Borges, « fasciste par indifférence ». Gallimard publie Jouer Dantzig sur un match de football, ses carnets inédits (1909-1942), et L’Homme à cheval, l’un de ses grands romans.
« Si l’on veut tenir un peu de terre dans ses bras, il faut faire naufrage et se résigner à devenir le Robinson de quelque île perdue. » Pierre Drieu la Rochelle, « Deuxième lettre aux surréalistes », 15 février 1927.
Il y a une façon imparable de déceler le lecteur de peu de Drieu la Rochelle (1893-1945), lecteur superficiel, pavlovien – qui ne lit que pour (re)trouver ce qu’il cherche. Son mantra ? Trois « mots » : Le Feu follet, Louis Malle (le film), Maurice Ronet (le rôle principal). Et puis ? Et puis rien. Il a livré sa caricature, dénoncé sa complaisance, il est content, cela lui évite de lire Drieu : il en a fait une posture (décadence, goût (vénal) des femmes, de la drogue, haine de soi, suicide). Il l’a dénaturé, simplifié (il ajoute parfois un mot sur la collaboration, Doriot, L’Émancipation nationale).
On ne se fait pas à cette image, cette idée – ce slogan. C’est tellement plus intéressant et compliqué et intelligent (et parfois abject) Drieu. Et si remarquablement « écrit » (grande précision lexicale mise au service d’une extrême finesse psychologique, par exemple ) – Malraux parle de « styliste de premier ordre » (« rien de ce qu’il a écrit n’est indifférent ») : ce que l’on ne souligne jamais assez,
