Seul comme un électeur UMP dans le Doubs


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Moi, je n’aimerais pas être électeur UMP dans la 4ème circonscription du Doubs.  J’aime bien le Doubs, et même ce coin 6à du Doubs où la désindustrialisation a frappé avec une férocité les rare amis où j’ai pu croiser, au cours de mes pérégrinations d’écrivain itinérant, des gens plein de bonne volonté dans les librairies, les médiathèques et les MJC qui tentaient toujours de mobiliser des citoyens plus préoccupés par une survie immédiate que par l’émancipation et le luxe que peut représenter la culture quand, précisément, on n’a plus rien, ou presque.

C’était en novembre et comme les clichés reposent toujours sur un fond de vérité, sinon ils ne seraient pas des clichés, du côté de Valentigney, ces libraires, ces bibliothécaires ou ces animateurs étaient plutôt de gauche, voire très à gauche et craignaient, pour cette cette élection partielle, le score du Front national. Ils avaient évidemment raison. Il n’y a plus besoin d’être grand clerc pour savoir que dans des circonscriptions ouvrières laissées à l’abandon, les gens ne votent plus pour la gauche ni pour la droite mais pour le Front national. Il faut les comprendre, les gens, dans ces coins-là. Ils n’ont plus tellement envie de voter pour la gauche, parce que la gauche, elle les a laissé tomber.

Surtout que le PS, en plus, a pris la sale habitude d’envoyer dans ces coins-là des handicapés du suffrage universel, comme Pierre Moscovici, en se disant que là, même pour des sous-doués des campagnes électorales, c’est gagné d’avance. C’est un peu, si vous voulez, la logique qui a consisté à envoyer des écolos ou des socialistes tailler des croupières aux élus communistes dans l’ancienne ceinture rouge ; façon Dominique Voynet à Montreuil, et on a vu ce que ça a donné.

Si en plus, dans cette 4ème du Doubs, on ajoute que Moscovici est apparu avec le temps aux valeurs de la gauche ce que l’aspartam est au sucre candi, c’est sûr que ce n’était pas gagné pour le PS et que l’électeur UMP pouvait enfin espérer voir son candidat qualifié face au FN. En plus, l’électeur UMP, il avait les statistiques pour lui. Ca devenait une habitude de voir la gauche éliminée au premier tour. Pratiquement un carton plein à toutes les partielles. On allait voir ce qu’on allait voir, c’était presque in the pocket puisque la gauche, elle, toujours bonne fille un peu scoute, elle a régulièrement appelé au Front républicain sans barguigner même quand le candidat UMP est légèrement à droite de Tamerlan comme dans le sud de la France.

Mais ce qu’il n’avait pas prévu, l’électeur UMP, c’est qu’il avait un nouvel handicap et que ce nouvel handicap s’appelle Nicolas Sarkozy. Il a suffi que Nicolas Sarkozy revienne à la tête de l’UMP pour, primo, que la belle série de victoires aux partielles s’interrompe et secundo que l’électorat du PS se remobilise, lui qui avait pris l’habitude de rester chez lui en feuilletant mélancoliquement de vieux journaux de la période 1981-83 quand la gauche était de gauche.

Nicolas Sarkozy, comme tous les mauvais joueurs, explique que ce n’est pas de sa faute, que le candidat UMP était nul et chois par le triumvirat des ringards : Fillon, Juppé, Raffarin. En règle générale, rien n’est de la faute de Sarkozy, dans aucun domaine. On ne lui dit jamais rien, à cet homme. Et en tout cas, on ne lui a manifestement pas dit qu’il était toujours  aussi profondément diviseur au sein même de son camp puisqu’il a trouvé utile, après avoir dirigé le pays de revenir pour diriger un…parti. On ne lui a jamais dit, non plus, contrairement à une idée reçue médiatique, qu’il n’était pas très bon pour gagner des élections. À part les présidentielles de 2007, la carrière électorale de Sarkozy est une vaste Bérézina. Il a tout perdu, des européennes face à Pasqua, des présidentielles avec Balladur face à Chirac, des municipales,  des cantonales, des régionales, encore des européennes et pour finir les présidentielles de 2012 alors que les primaires socialistes avaient quand même désigné le plus mauvais candidat possible.

Et voilà que grâce à Sarkozy, l’électeur du Doubs se retrouve plongé vingt ans en arrière quand le principal souci de la droite était de se déterminer en fonction du FN. Peu doué pour la synthèse, Sarkozy s’est retrouvé avec une position tellement alambiquée, « ni ni mais oui mais non faut voir » qu’il a été mis en minorité dans son parti qu’il aurait pourtant dû diriger comme un seigneur et maitre alors qu’il en en est réduit à de pénibles combinazione avec des sensibilités irréconciliables entre lesquelles il refuse de choisir, contrairement à Juppé qui a clairement appelé à voter socialiste quitte à s’attirer les foudres de ces grands esprits et de ces parangons de vertu que sont Morano et Balkany.

Il a d’ailleurs bien fait, Juppé, puisque contrairement à Sarkozy, en cas de duel aux présidentielles contre Marine Le Pen, il attirerait les électeurs de droite et du centre mais aussi ceux de gauche qui se dérangeraient le cœur presque léger puisqu’ils verraient, enfin, clairement la différence entre l’UMP et le FN. Ce qui n’est plus évident, justement depuis que Sarkozy s’obstine à croire que parler comme le FN permet de réduire les scores du FN alors que tout prouve le contraire, et de manière de plus en plus flagrante.

 *Photo : Alain ROBERT/Apercu/SIPA . 00703433_000001.



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