Notre chroniqueur continue sa tournée des lectures d’été. Autant dire que la rédaction de Causeur, qui a pour la vertu une admiration sans bornes, se désolidarise complètement de ces affriolantes considérations sur les grandes courtisanes — en l’occurrence Doris Delevingne, vicomtesse Castlerosse.
La langue de la prostitution est incroyablement riche et colorée, des « pierreuses » qui tapinaient entre les blocs amassés au bas des « fortifs », dans les années 1880, jusqu’aux michetonneuses qui, à l’exemple de l’héroïne de Francis Leroi (1972), bouclent les fins de mois en vendant deux jambons pour une andouille.
Ce n’est pas de ces prolétaires du tapin que je veux vous parler ici, mais des grandes prêtresses de l’amour tarifé — au moins celles de l’époque moderne, étant entendu que les prostituées sacrées de l’Egypte antique obéissaient à des contraintes culturelles fort éloignées de nous. Si vous avez des trous dans votre culture antique, lisez donc l’Aphrodite de Pierre Louÿs (1896).
La lecture (instructive et passionnante, c’est délicieusement écrit par une femme experte en biographies de femmes libérées) du livre de Stéphanie des Horts, Doris, le secret de Churchill, qui vient de sortir, m’a donné l’idée de revenir sur ces grandes hétaïres, cocottes et autres demi-mondaines inventées par le XIXe siècle bourgeois, et qui ont disparu avec lui — un peu après-guerre. Doris Delevingne est l’une des dernières de ces gourgandines flamboyantes qui contribuèrent si puissamment
