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Donald Trump: le punching ball des élites mondialisées rebondira

Il est à parier qu'il faudra encore compter avec Donald Trump ces prochaines années


Donald Trump: le punching ball des élites mondialisées rebondira
Donald Trump en mars 2019 © Carolyn Kaster/AP/SIPA Numéro de reportage: AP22308675_000001

Quand Joe Biden sera finalement confirmé Président des Etats-Unis le 20 janvier, le « trumpisme » n’en sera pas pour autant mort.


Bien que Joe Biden ait été désigné président élu par le Collège électoral des Grands électeurs lundi 14 décembre, Donald Trump semble décidé à continuer ses actions en justice dans plusieurs états-clés et à marteler que les élections ont été « truquées ». Les Républicains ont envoyé, comme en 1876, un « set » d’environ 60 Grands électeurs « parallèles » au Congrès afin que celui-ci puisse, si certaines actions sont soutenues par des juges, les certifier et élire Donald Trump président le 6 janvier lorsque le Sénat se réunira pour approuver le Collège. Stratégie sérieuse ou simple coup de théâtre ?

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Défaite de Trump…

La seule victoire concrète et indirecte de Trump est l’accord d’un juge du Michigan de publier une enquête indépendante d’un groupe cyberspécialisé, le « Allied Security Operation Group ». Ces experts auraient découvert qu’une Dominion Voting Machine, dans le comté d’Antrim, affichait un taux d’erreur « inacceptable » de 68,05% alors que la Commission électorale fédérale n’admet qu’un taux de 0,0008%. C’est dans ce comté du Michigan qu’un recomptage à la main avait mis le doigt sur un basculement de 6.000 voix en faveur de Biden, basculement vite corrigé en faveur de Trump. Cités par le Washington Examiner, les experts prétendent avoir découvert une « erreur significative et fatale sur l’intégrité des élections » et non, comme les officiels du Michigan l’ont assuré, une « erreur humaine ». L’extrapolation de cette découverte aux milliers d’appareils de ce type utilisés dans 28 États a toutefois peu de chance d’aboutir à une décision de justice d’autant que la firme Dominion nie toute fraude.

Donald Trump a fait signer aux Émirats arabes unis, au Soudan et au Maroc, avec le concours de son gendre, Jared Kushner, des accords de paix historiques avec Israël. Il aurait reçu le prix Nobel de la Paix s’il s’était appelé Hillary Clinton. Même Joe Biden et Barack Obama l’ont salué

L’avocat de Donald Trump, Rudy Giuliani, disposerait d’un millier de témoignages sous serment alléguant des fraudes mais aucun juge n’a voulu les entendre pour le moment.

Vendredi 11 décembre, Donald Trump a subi un revers important lorsque la Cour suprême – y compris les trois juges nommés par Trump ! – a refusé d’examiner une plainte du Texas, alléguant que quatre états-clés avaient modifié les modalités du vote par correspondance de manière anti-constitutionnelle. Selon l’avocat constitutionnaliste, Alan Dershowitz, professeur émérite à Harvard, la Cour suprême a lancé un signal clair qu’elle n’interviendra pas dans le processus électoral.

Donald Trump peut encore actionner « sa » Loi de 2018 portant sur la manipulation des élections par des puissances étrangères et qui lui permet d’instituer un état d’urgence mais il est peu probable qu’il ira aussi loin. Le conspirationnisme est inhérent à l’Amérique : pendant près de trois ans (2017-2019), le procureur Mueller a enquêté, en pure perte, sur les collusions entre Donald Trump et le pouvoir russe quant à une éventuelle manipulation des élections de 2016. Les grands médias mainstream (CNN en tête) ont endossé cette théorie du complot ad nauseam, Hillary Clinton répétant qu’on lui avait « volé son élection. »

…mais non du trumpisme

Taxé de fanfaron, inepte et raciste dès le début de son mandat, Donald Trump a pourtant imprimé sa marque sur l’Amérique. Il s’est créé, dans son combat contre l’Establishment, un noyau dur de fervents supporters à travers le pays. Mais aussi d’irréductibles ennemis, les GAFAM en tête. Qu’on se souvienne de l’enquête du New York Post sur l’ordinateur portable compromettant de Hunter Biden, censurée par Twitter et qui réapparaît maintenant que l’élection est pliée.

« Milliardaire proche du peuple », Donald Trump a pour marque de fabrique d’appeler un chat un chat. Il a ainsi identifié rapidement le nouvel adversaire des États-Unis : le régime communiste chinois. Comblant peu à peu le déficit commercial de 350 milliards de dollars avec l’Empire du milieu, il a aussi mis le holà aux tentatives hégémoniques de la Chine en matière de 5G, refusant la mainmise de Huawei. Dans la continuité de Barack Obama, il s’est tourné vers le Pacifique et accepté le combat pour le leadership mondial, refusant de s’agenouiller devant l’hydre totalitaire chinoise. Même Joe Biden a d’ores et déjà averti qu’il entendait maintenir les droits de douane punitifs sur les produits chinois mis en place à partir de 2018 par son prédécesseur. Ce faisant, Trump a volontairement secoué les « pacifiques » Européens, en leur rappelant qu’il ne paierait pas indéfiniment pour leur défense à travers l’OTAN, et les a pressés d’augmenter leurs contributions financières.

Trump a retiré les États-Unis de plusieurs agences onusiennes stipendiées par l’Amérique mais qui lui sont systématiquement hostiles et il est sorti de l’Accord de Paris, constatant son inefficacité dans la lutte contre le réchauffement climatique (dont il nie d’ailleurs la dimension anthropique), choqué aussi de constater que la Chine y bénéficiait d’un statut d’exception jusqu’en 2030.

Pour celui qu’on voyait, dès son entrée en fonction, pousser sur le bouton nucléaire comme le Dr Folamour, Trump n’a, en fait, déclenché aucune guerre. Au Moyen-Orient, il a choisi, à tort ou à raison, les Sunnites (Arabie saoudite, Émirats Arabes Unis) conte les Chiites (l’Iran qui n’a pas respecté l’Accord nucléaire). Mais ce choix lui a permis de faire signer aux Émirats arabes unis, au Soudan et au Maroc, avec le concours de son gendre, Jared Kushner, des accords de paix historiques avec Israël. Il aurait reçu le prix Nobel de la Paix s’il s’était appelé Hillary Clinton. Même Joe Biden et Barack Obama l’ont salué. Il a préalablement appliqué l’« Embassy Act », à savoir le déplacement logique de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem-Ouest, capitale non-disputée des Israéliens juifs.

Du point de vue intérieur, Donald Trump a tenté, comme peu d’hommes politiques, d’appliquer son programme ou de créer les conditions pour l’appliquer, qu’on le déteste ou qu’on l’apprécie: diminution de l’immigration clandestine et construction partielle du mur à la frontière mexicaine dans une Amérique en panne d’intégration (11 à 15 millions d’illégaux, selon les sources), relocalisation industrielle aux États-Unis, moratoire pour les personnes arrivant de pays partiellement occupés par l’État islamique, création d’emplois record notamment au sein des minorités ethniques, Wall Street en hausse continue, baisses d’impôts, etc. Il a redonné une raison de vivre au petit peuple américain, raflant tout de même 73 millions de voix alors que certains sondages donnaient Biden gagnant avec une très large majorité.

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Entrepreneur, Trump sait, contrairement à beaucoup d’hommes politiques « professionnels », ce que c’est que créer de la valeur. Il a donc géré les États-Unis comme une entreprise. À l’abri du besoin, il n’a pas l’obligation de s’assurer une retraite. Le « Trumpisme », en rupture avec l’approche post-nationale des principaux dirigeants occidentaux, laissera probablement de profondes traces dans la sociologie étasunienne et au sein du Parti républicain. Et ce n’est pas fini : « Président bulldozer », Trump, qui martèle à ses troupes que Joe Biden a massivement triché, annonce la création d’un puissant média et son retour en 2024. Pourquoi pas ? En pleine santé après avoir attrapé le Covid, le punching-ball des élites mondialisées affiche un bilan très honorable.



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est écrivain, journaliste et romancier belge. Dernière publication : "Tout doit disparaître", Edilivre (2021)

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