Entre les deux tours de l’élection présidentielle, un décret a entériné l’extinction progressive de deux corps d’encadrement supérieur du ministère des Affaires étrangères. Cette décision suit la disparition du corps de la préféctorale.
Le corps des Affaires étrangères a été supprimé officiellement entre les deux tours de la présidentielle. Adieu les diplomates de profession, bonjour les managers de l’État. Mes collègues se sont émus. Des journalistes charitables ont fait écho à leur émoi. Gérard Araud, diplomate-Twitter mondain du régime, a versé sa larme électronique. J’ai beau être membre de ce corps depuis plus de trente ans, cette nouvelle ne m’empêche pas de dormir. Moi, c’est la disparition de notre politique étrangère qui me réveille la nuit depuis quinze ans.
Cette disparition est seulement la conséquence des choix que des diplomates ont cautionnés, mis en œuvre, voire conçus pour certains. Notre diplomatie était indépendante, nationale, souveraine. Elle avait besoin de professionnels qualifiés et expérimentés. Elle est aujourd’hui européenne, écrite à Bruxelles, consensuelle à 27, compatible avec l’Allemagne, première de la classe, et les États-Unis, protecteurs de toute la bande. La diplomatie est devenue un potage mixte. Fini le terroir. Une cuillère à soupe pour Berlin, une cuillère à café pour Madrid, une louche pour Washington et la vingtaine de capitales de l’UE alignées derrière. Enfin, une pincée de sel français pour relever l’ensemble.
A lire aussi : De l’Ukraine au Caucase : l’”européanisation” de la politique étrangère de la France et ses conséquences
Plus besoin de diplomates chevronnés pour ça. Alors, que les diplos ne se plaignent pas. Ce n’est pas quand le fruit sec tombe à terre qu’il faut regretter que l’arbre se soit asséché depuis un bon nombre d’années. Le vrai scandale est la disparition du corps de la « préfectorale ». Là, c’est sérieux. Il s’agit de la bataille de France. Nos préfets doivent connaître intimement lois, jurisprudences et répartition des pouvoirs dans notre millefeuille administratif afin de gérer au mieux les problèmes du moment : pauvreté, immigration, violence, terrorisme. Alors que le pays s’enflamme pour un rien, pourquoi faire exploser ce corps de professionnels du respect de la loi et de l’unité du pays ? Incompréhensible.