Le professeur Didier Raoult prétend avoir trouvé un remède miracle au Covid-19 : l’hydroxychloroquine. Trop précoces, les résultats de ses expériences n’autorisent aucune conclusion hâtive. Mais le grand infectiologue marseillais pourrait avoir raison contre ses pairs trop prudents.
Un Provençal, des provinciaux
C’est un fait bien romanesque pour la France que de découvrir inopinément, à la faveur du maléfice, qu’un savant d’envergure se cachait en son sein, déjà largement connu à l’étranger. Didier Raoult n’en est pas moins un homme habitué aux railleries. Critiqué tantôt pour son arrogance et ses allures de druide phocéen, tantôt pour le nombre de ses publications, critiqué surtout parce qu’il ne rentre pas dans le rang.
La primauté marseillaise en matière d’infectiologie n’est pourtant pas nouvelle. Antique nœud commercial et grand port colonial, Marseille a reçu dans ses hôpitaux des générations d’aventuriers et de voyageurs y déposant par leurs cloaques et leurs souliers les germes les plus exotiques – sanies import-export. Qui ne sait que Rimbaud, de retour d’Afrique la jambe noircie par les bacilles de Harar, y est mort – recouvrant la foi à défaut de la santé – à l’hôpital de la Conception ? Marseille a connu les miasmes avant même que Paris n’existe. Elle a connu la dernière épidémie française de peste en 1720. Elle a survécu au crépuscule de deux civilisations, la grecque et la romaine.
Hydroxychloroquine : gin pour tous, tous toniques
Dès le mois de janvier, et avant même la tournure dramatique qu’elle a prise depuis, Raoult propose une solution ancienne à cette peste nouvelle : l’hydroxychloroquine. Ce dérivé synthétique de la quinine, que tous ont sur les lèvres à défaut de l’avaler encore, aurait fait la preuve de son efficacité en Chine. Nous étions, pour ainsi dire, assis dessus : « Le coronavirus ne fera pas plus de morts que la trottinette », affirme le Marseillais.
La quinine, issue de l’écorce d’un arbuste américain du genre Cinchona, est utilisée depuis le xviie siècle pour traiter le paludisme. Avalée quotidiennement par les coloniaux sous forme d’eau tonique (le tonic du gin), elle était responsable d’une intoxication, le cinchonisme. Son substitut synthétique l’a supplantée depuis : la chloroquine (Nivaquine). Structure différente, même noyau actif. Une hydroxylation de ce noyau engendre l’hydroxychloroquine (Plaquenil). Effet semblable, meilleure tolérance, indications élargies. C’est le traitement de référence du lupus et de certaines infections, grâce aux recherches déjà menées par Raoult.
Primum non nocere
L’hydroxychloroquine n’échappe
