Emmanuel Leclercq a une trajectoire peu commune. L’animateur de Devenir pour agir, enseignant, essayiste et philosophe, raconte son parcours et répond aux questions de Philippe Bilger.
Si j’ai soumis à la question Emmanuel Leclercq, c’est pour sortir, me sortir des dialogues trop confortablement médiatiques.
Ce jeune philosophe de 41 ans a eu des origines extraordinaires et son parcours exceptionnel montre à quel point il ne faut jamais sous-estimer les hasards miraculeux de la vie et de la générosité humaine. Abandonné en Inde dans une poubelle à l’âge de 10 jours, il a été recueilli par Mère Thérésa puis adopté par des parents catholiques qui, en plus de lui, ont accueilli quatre autres enfants de diverses nationalités.
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Personne de cette progéniture n’a mal tourné en raison des valeurs transmises et de l’éducation reçue. Une très belle et éclairante histoire humaine qui méritait bien un coup de projecteur sur elle.
Causeur vous propose de visionner cet entretien, enregistré dans le studio de Fréquence Protestante (100.7 FM Paris).
Sur les difficultés scolaires : « J’ai toujours eu des difficultés intellectuelles. J’ai souffert étant très petit de malnutrition, ce qui m’a procuré des carences. J’avais des mauvaises notes à l’école, je travaillais et je n’y arrivais pas. Mon prof principal me proposait d’arrêter les cours et de devenir groom. Ça ne m’a pas empêché de faire 16 ans d’études par la suite. »
Activités périphériques : « Ma passion est de démocratiser la philosophie, de la rendre accessible. J’ai donc fondé ‘Devenir pour Agir’, la première émission française d’interview philosophique. »
Conscience d’une destinée exceptionnelle : « Non, toute vie est singulière, particulière, toute vie est unique. J’ai conscience de la chance d’avoir été sauvé. Je veux qu’aujourd’hui ma vie, soit un cadeau pour mes parents qui m’ont donné la vie, même si je ne les connais pas. »
Sur l’éducation et la nouvelle génération : « J’aurais pu mal tourner. J’ai eu la chance de grandir dans une famille croyante, pratiquante et soudée. Nous sommes arrivés dans une nouvelle génération, et aujourd’hui, il faudrait rééduquer les parents, les remettre à leur place. »
« Certains élèves me racontent leur vie de famille. Ils sont accablés. L’école, le lycée, est un sas de respiration pour ces jeunes. »
Sur la délinquance : « ‘Mais Ms’ieur, vous foutez quoi ici ? ’ m’a déjà lancé un élève perturbateur, avec les ricanements de toute la classe. Je lui ai répondu après un instant de silence : ’Merci d’exister’. Il a été marqué et m’en a parlé en fin d’année, jamais ses parents ne lui avaient dit ça. »
« Il faut comprendre les jeunes, dans toute leur histoire, c’est l’une des clés pour aider les plus violents. Il ne faut pas leur demander pourquoi ils font ça, on peut facilement le savoir. Il faut leur dire : qu’est-ce que ça t’apporte ? Je dis souvent aux jeunes qu’ils sont des cadeaux pour l’humanité. »
Conception de la vie et de la société : « La vie est un combat, on n’a rien sans rien. Si on veut réussir, il faut travailler. Beaucoup de nos professeurs veulent faire réussir les élèves, je suis contre. J’essaye de les aider à s’épanouir. C’est parce qu’ils s’épanouissent qu’ils réussiront. »
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