L’Élysée a profité de la pandémie mondiale qui s’est abattue sur la planète entière, touchant les cinq continents sans exception, quasi de manière universelle, pour dépêcher ses espions incognito au Kremlin, ni vus ni connus, au cœur de la fournaise. Les agents simples et a fortiori les agents doubles craignent généralement d’arpenter les steppes de Russie, non parce qu’il y fait froid l’hiver, puisqu’il y fait chaud l’été, mais parce qu’ils redoutent par-dessus tout d’être aspergés par le terrible novichok. C’est pourquoi nous savons si peu de choses sur ce territoire à peine civilisé, où d’obscures péninsules ont pour nom “Kamchatka”, et dont le chef porte le nom d’un plat traditionnel québécois. Mais le coronavirus est venu à point nommé, et a fourni une occasion inespérée de se promener en scaphandre sans attirer l’œil de Moscou, en toute tranquillité et à l’abri du poison mortel, qui n’est pas de la poudre de perlimpinpin. Depuis le 15 mars, nos professionnels du renseignement sont de retour, fin du port du masque oblige. Nous avons mené l’enquête et avons pu les rencontrer en toute discrétion, dans une célèbre brasserie parisienne où, comme chacun sait, les employés de la Dégéesseue ont leurs habitudes.
Mais vous êtes fou. Oh oui !
Les nouvelles valaient le déplacement. Les héros de l’ombre sont formels, et unanimes : Vladimir est fou. Et ce que nos espions racontent est à peine croyable. Le maître du Kremlin prend tous les matins un bain de lait de chèvres élevées par des paysans des anciens kolkhozes de Staline. C’est à ce moment qu’il relit les épreuves des articles de RT France (il ne prend pas la peine de corriger les fautes de syntaxe et d’orthographe, sachant qu’il y en a dans tous les journaux en ligne de France et de Navarre ; d’ailleurs il ne parle pas un mot de français, et ne sait que bredouiller “boniour Emmanuel” avec un accent mal défini). Pendant qu’il s’habille, il fait défiler devant lui un à un ses ministres et ses généraux à quatre pattes, et les oblige à réciter par cœur et sans se tromper la liste des maternités ukrainiennes. C’est qu’il n’a qu’une idée en tête : récupérer la recette du bortsch à la mode de Kiev. Et pour cela, il est prêt à tout. L’extension de l’Otan à l’est n’est qu’un prétexte, une carabistouille brandie pour amuser les complotistes, ces sinistres individus qui croient que la terre est plate et de forme triangulaire. Ce ne sont certes pas les Américains qui iraient bombarder un pays après avoir inventé un motif aussi mensonger.
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Il est fou mais attention, avertissent nos espions : Vladimir est malin. Ce n’est pas pour rien qu’il a placé notre Macron tout au bout d’une très longue table. Notre Emmanuel n’a pas voulu le dévoiler officiellement, et a fait circuler cette histoire d’adéenne présidentiel par modestie, pour ne pas éventer un “truc” diplomatique, pour le coup vraiment jupitérien. Mais la vérité est que Poutine (et pas seulement Poutine, mais bien des dirigeants de pays étrangers) craignent par-dessus tout le froncement de sourcils de notre président. Comme, en plus d’être fou, l’autocrate russe est myope, il a imaginé cet ingénieux stratagème qui consistait à maintenir constamment son interlocuteur français à six mètres, distance au-delà de laquelle Vladimir voit complètement flou. On comprend mieux dès lors pourquoi, malgré de très beaux froncements de sourcils, la mission diplomatique d’Emmanuel Macron n’a pas complètement réussi – pas complètement, mais néanmoins, cependant, elle n’a pas non plus échoué à moitié, puisque celles et ceux qui logent à la starteupe nécheune peuvent désormais s’endormir en murmurant “plan de résilience”.
Narcissisme pervers, paranoïa aigüe, psychose maniaque ?
S’il est parfaitement avéré que Vladimir est un fou dangereux et sanguinaire, nos espions toutefois hésitent encore sur le diagnostic exact de la maladie mentale qui ravage le cerveau poutinien, au péril du nouvel ordre mondial européen. Narcissisme pervers, paranoïa aigüe, psychose maniaque ? En l’absence de test PCR sûr et en bonne et due forme, il est difficile de se prononcer avec certitude et sans aucun doute. Mais une autre hypothèse circule, qui n’est guère plus rassurante : un de nos agents du renseignement évoque l’existence d’une IRM cérébrale au nom de Poutine V., qui ferait apparaître des lésions de type Alzheimer, comparables à celles provoquées par le Covid chez les enfants malades de notre république. Vladimir, qui aurait été élevé par une grand-mère qui le gavait de bortsch, même s’il ne l’a pas épousée pour autant, serait-il resté un grand enfant, désormais frappé de sénilité précoce ? Les regards, autour de la table de la brasserie, se font graves, et les voix plus sombres. On murmure que cette abominable dégénérescence toucherait également les danseurs du Bolchoï et même, à titre posthume, des écrivains russes autrefois considérés.
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Emmanuel Macron a tout fait pour éviter la guerre, absolument tout, et même son contraire, qui n’est pas rien. Et demain matin, tout est possible. L’optimisme peut se transformer en pessimisme, et vice et versa, ou même l’opposé, comme c’est le plus probable. Heureusement le gouvernement est là pour accompagner main dans la main celles et ceux qui cellezéceussent vers le pire qui est à venir, et qui ne saurait tarder dans une république en marche où les alcooliques sont analphabètes, et où des gens qui ne sont rien se promènent dans les gares sans même penser à traverser la rue pour trouver un costume. Heureusement, l’art français, on ne l’a jamais vu, et nous avons toujours ce privilège national d’un ministère de la Culture qui n’existe pas. Si nous voulons sortir de cette crise, il est important d’y entrer d’abord. Soyons sûrs que nous serons plus forts une fois que nous serons mal en point.
Et la Chine, dans tout ça ? n’aurait pas manqué de demander Jacques Chancel.