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Délivrez-nous du mâle !


Délivrez-nous du mâle !
Image extraite du documentaire La domination masculine
Image extraite du documentaire La domination masculine
Image extraite du documentaire La domination masculine

Je suis allé voir au cinéma un documentaire titré La domination masculine. Curieux, je me suis assis dans le noir pour découvrir des spécimens de mâles dominants comme on va au musée ou au zoo. Autant vous le dire tout de suite, je suis sorti déçu.

Depuis que je regarde les couples autour de moi, j’ai du mal à distinguer quoique ce soit qui ressemble à une domination du masculin et parfois même à distinguer quelque chose qui ressemble à du masculin et depuis que je regarde les gens dans la rue, j’ai vu plus d’hommes promenant des chihuahuas que de femmes portant sur le dos des fagots de bois. Dans nos sociétés modernes, je croyais l’espèce pratiquement disparue.

En apercevant ces derniers temps quelques silhouettes bâchées, j’en ai déduit qu’il restait quelques individus sous nos latitudes mais la question n’est pas abordée dans le film. On ne fait pas du cinéma engagé pour sombrer dans l’islamophobie archéo-réac comme on dit aux Inrocks.

Dans sa traque du machisme, l’auteur nous emmène en France, en Belgique et au Canada en omettant de faire apparaitre des mâles issus de minorités visibles. Que fait la HALDE ?

Il est difficile et donc plus méritoire de trouver une aiguille dans une meule de foin. Est-ce pour cela que le documentariste a cantonné son exploration aux sociétés occidentales modernes et aux mâles blancs ? Je l’ignore mais à la fin du film, après avoir vu ces hommes plutôt civilisés, on se demande bien ce qu’ils dominent.

La première scène nous entraine dans le cabinet d’un chirurgien où un patient explique que pour se sentir plus fort, plus fier et plus homme, il a besoin qu’on augmente la taille de son pénis. On peut penser ce qu’on veut de cette entreprise pitoyable, l’auteur ne tire qu’une conclusion: notre société patriarcale et phallocrate impose ses standards, vénère le phallus et lui prête des pouvoirs magiques.

Il me semble portant que dans un contexte vraiment machiste, les hommes ne passent pas sur le billard pour qu’on allonge leur sexe quand il leur suffit d’allonger une torgnole pour imposer le respect à celle qui aura ri devant l’apparition d’un trop petit oiseau.

Le cinéaste se penche ensuite pour étayer sa thèse sur les comportements qui distinguent les hommes des femmes. Le commentaire ironise dans un magasin de jouets que les filles préfèrent les poupées et les garçons les armes de guerre, on filme des hommes qui salivent au spectacle d’un strip-tease, on recueille les confidences de femmes qui préfèrent que dans l’intimité de leur couple, le masculin l’emporte.

Ces attitudes qui caractérisent l’espèce depuis que nous sommes des singes n’ont, d’après la voix off qui nous apprend la vie, rien de naturel. On nous le répète, ces constructions purement culturelles sont la preuve d’une domination d’un sexe sur l’autre.

Il faut échapper à ces archaïsmes et dépasser ces stéréotypes. Certains ne s’en privent pas. Des femmes guerrières j’en connais ! Par ailleurs, les enfants de familles homoparentales qui pourront désormais choisir pour Noël entre le fer à repasser comme papa et le tractopelle comme papa pourraient bien montrer l’exemple. Encore faut-il que des deux papas, l’un ne porte pas une casquette en cuir et l’autre des talons hauts car tout serait à recommencer.

Après sa visite du monde à l’abri du réel, le film aborde la douloureuse question du retour de bâton, backlash aux USA, ressac au Canada. On entend les témoignages d’hommes canadiens, peut être pas assez latins pour avoir su se défendre, qui râlent de se réveiller après des décennies de vent féministe, dans un monde ou John Wayne a été remplacé par les papas pampers au panthéon des modèles masculins. De là, on fourre dans un vaste sac les femmes battues par leur maris, le discours d’Eric Zemmour et un fait divers meurtrier. Sur un campus canadien, un déséquilibré ouvrit le feu sur quatorze femmes en les accusant d’être des féministes après avoir éloigné et épargné les hommes avant de retourner son arme contre lui.

Ce rapprochement entre ces meurtres et l’auteur de La féminisation insinue qu’un vaste mouvement dont l’un serait la fraction armée et l’autre la branche politique travaille au retour de la domination masculine. Si une réaction masculine pointe son nez, personne ne veut supprimer le droit de vote pour les femmes pour les renvoyer derrière les fourneaux. Les acquis de civilisation qui ont étendu l’égalité et la liberté à tous les sexes font les délices des relations entre hommes et femmes de ce côté-ci de la planète. Ils sont gravés dans le marbre de notre identité nationale, européenne et occidentale et ce ne sont pas les petits mâles blancs « revanchards » qui les remettent en cause.

On peut dénoncer les dérives de la féminisation sans caresser des rêves de domination. Nous ne voulons pas régner sans partage sur nos femelles, nous cherchons simplement à ne pas décevoir les femmes qui préfèrent nous voir jouer les « Jean Gabin » plutôt que les « Jean Cocteau ».

Nous ne progresserons pas en faisant table rase du passé, en vidant nos personnages de toute substance masculine. Ne cessons pas de rouler des mécaniques pour raser les murs ou rouler des fesses, appliquons-nous à jouer les hommes avec toute la subtilité que cela exige pour plaire. Ne renonçons pas aux caractères de notre genre, sublimons-les. Pour être plus aimables, éduquons le macho qui sommeille en nous sans lui retirer ses attributs, donnons-lui de la profondeur, de la distance et de l’humour. Ainsi, nous ne serons pas moins hommes, nous le serons autant que nous le pourrons, c’est ainsi que nous serons aimés et récompensés.

Quand aux féministes mâles qui travaillent à l’avènement d’un monde désolé et désolant, en gommant la plus précieuse des différences tout en gardant sur la burqa un silence prudent et assourdissant, qu’ils fassent des films avec des œillères ou des documentaires de science-fiction, on s’en fout. Pendant qu’ils occupent leurs congés paternels à changer des couches, nous nous occuperons des femmes qui ont du goût pour les hommes.

Février 2010 · N° 20

Article extrait du Magazine Causeur



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Cyril Bennasar, anarcho-réactionnaire, est menuisier. Il est également écrivain. Son dernier livre est sorti en février 2021 : "L'arnaque antiraciste expliquée à ma soeur, réponse à Rokhaya Diallo" aux Éditions Mordicus.

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