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Européennes: un débat pour (presque) rien

La campagne débute trop tôt pour concerner les Français et livrer des enseignements


Européennes: un débat pour (presque) rien
Jacques Witt/SIPA / 00902113_000076

S’il a permis de révéler l’état de forme des douze têtes de listes et mis en lumière les contradictions internes de certains partis, le premier débat de la campagne des européennes est arrivé trop tôt pour livrer de véritables enseignements.


France 2 et France Inter organisaient hier soir le premier débat télévisé et radiophonique de la campagne des élections européennes. Même si, c’est probable, une bonne partie des futurs électeurs ne sont pas encore réellement dans la campagne – les taux d’audience devraient en témoigner ce matin -, cette confrontation entre douze têtes de listes devait nous donner un aperçu de la capacité des unes et des autres à peser dans le scrutin.

Loiseau et Bellamy, unis par la diversité… 

Sur le fond d’abord, deux personnalités ont été mises en difficulté.

Nathalie Loiseau d’abord, l’a été à propos de l’appartenance des futurs parlementaires de sa liste LREM au Parlement européen. Elle a eu beau nier toute volonté d’intégrer le groupe libéral ALDE (Alliance des Démocrates et des Libéraux pour l’Europe), ses contradicteurs lui ont rappelé les déclarations de son président Guy Verhofstadt et l’appartenance à ce groupe déjà acquise d’un parlementaire actuel, M. Arthuis, adhérent de LREM. Ils auraient pu lui rappeler aussi la présence et le discours d’une représentante du parti macroniste au congrès de cette même ALDE. La question de cette appartenance lui sera encore sans doute posée pendant la campagne et risque de devenir comme le sparadrap du capitaine Haddock.

La seconde personnalité mise en difficulté sur le fond fut François-Xavier Bellamy (LR) lorsque l’élargissement de l’Union européenne (UE) à la Serbie fut l’objet d’une question des animateurs. Après s’être opposé à cette dernière, il lui fut demandé par Nicolas Dupont-Aignan (DLF) de se positionner par rapport aux positions de deux de ses colistiers, Arnaud Danjean et Brice Hortefeux, lesquels s’étaient prononcés pour l’adhésion de la Serbie à l’UE, par des votes officiels à Strasbourg. La tête de liste payait là non sa position personnelle mais celle du parti qu’il a reçu la mission de représenter.

Entre le noniste Bellamy et certains colistiers, avec lesquels il dit pourtant bien s’entendre sur le terrain, il y a des différences de fond qu’une campagne européenne de plus en plus active mettra en lumière et qui pourraient freiner le bel élan entrevu jusqu’ici.

Le représentant de l’UDI, M. Lagarde, aurait pu, a contrario, donner une image de cohérence au service d’un européisme assumé s’il n’avait pas critiqué en fin d’émission la directive « travailleurs détachés » tel un souverainiste couteau entre les dents, directive qui demeure un des symboles les plus frappants de l’UE du XXIe siècle. Finalement, à ce jeu-là, ce sont Messieurs Asselineau et Philippot qui s’en sont le mieux sortis. Ils ont eu le mérite de la cohérence parfaite, assumant de vouloir quitter un ensemble qu’ils critiquaient de toutes leurs forces.

La rentrée les classe

Sur la forme, Nathalie Loiseau a paru – comme face à Marine Le Pen – réciter sa leçon. Les petits nouveaux Manon Aubry (FI), François-Xavier Bellamy (LR) et Raphaël Glucksmann (PS), ont paru en demi-teinte. Benoît Hamon et Nicolas Dupont-Aignan ont fait du Hamon et du Dupont-Aignan, avec un air de déjà vu dont on saura dans les prochaines semaines s’il lassera ou pas les sondés. Deux autres nouveaux ont, c’est une surprise, plutôt bien réussi leur examen de passage: le communiste Ian Brossat et la tête de liste RN Jordan Bardella, même si le second a pu agacer en début d’émission en tentant un mano a mano avec Nathalie Loiseau. Mais c’est finalement François Asselineau qui a semblé le plus en verve. Le candidat de l’UPR a tiré les leçons de la présidentielle de 2017 et compris que le principe d’un débat ne consistait pas à réciter des articles de traités. Hier soir, il fut pugnace, parfois drôle, jouant à la fois sur la raison et l’émotion et apparaissant finalement plus adroit que son concurrent « frexitien » Florian Philippot, pourtant davantage expérimenté à la télévision.

Il sera intéressant d’examiner si ce premier débat aura des implications sur la courbe des sondages et notamment l’excellent outil de l’IFOP, le « rolling » qui enregistre les dynamiques et qui avait fait ses preuves en 2014 et 2017. Il faudra aussi attendre le prochain débat à un moment où la campagne sera davantage dans la tête, à défaut d’être dans le cœur, des futurs électeurs. Celui-là sera à coup sûr bien plus décisif que celui d’hier soir.

Dérapage

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