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David Sylvian, ovni pop


David Sylvian, ovni pop

Alliant sa voix de soul à un raffinement musical et à une élégance des textes, mariant musiques populaire et expérimentale, David Sylvian est un ovni de la pop.

En 1976, au beau milieu de la période punk, le groupe de David Sylvian (Japan), bricolé avec son frère cadet et trois autres lycéens, est repéré par Hansa Records, découvreur de Boney M. La maison de disque allemande a besoin d’un groupe local, pour pénétrer le marché britannique. Japan participe aux auditions, mais un groupe mieux looké lui souffle la première place : The Cure.

[access capability= »lire_inedits »]Hansa Records lâche The Cure après avoir écouter la maquette de Killing an Arab : « Ça ne marchera jamais ! » Le producteur investit alors sur Japan. Le groupe se cherche et glisse du glam rock de David Bowie vers la sophistication de Roxy Music, des guitares vers les synthétiseurs. Les ventes ne décollent toujours pas. Le label tente un dernier coup (y a de ces génies !)  : sortir un album de Japan au Japon ! Et il se débarrasse du groupe.

Virgin Records récupère alors Japan. La rencontre avec le public et la critique musical se fait avec le titre épuré Ghost, extrait du cinquième album, un immense succès commercial. La presse qui démolissait Japan, l’encense maintenant. Mais quand tout va bien, il faut chercher la femme. Une photographe japonaise, Yuka Fujii, qui sortait avec le bassiste, se met à flirter avec Sylvian. Japan se sépare en 1982.

David Sylvian collabore, alors, avec le compositeur japonais Ryuichi Sakamoto à la bande originale du film Furyo, mettant en scène David Bowie, Takeshi Kitano et Ryuichi Sakamoto. Naît ainsi leur titre le plus connu à ce jour : Forbidden Colours. Fort de ce succès, Virgin propose un contrat à David Sylvian. En 1984, il sort son premier album solo, Brilliant Trees, empruntant l’inspiration de certains de ces morceaux aux romans de Milan Kundera, de Jean Cocteau ou de Jean-Paul Sartre. La presse est unanime. Sylvian a enfin trouvé sa voie : seul, il est excellent. Enfin, seul c’est beaucoup dire quand on voit le nombre de pointures qui contribuent à ses albums.

Sylvian est assez déstabilisant pour sa maison de disque. Un délai de six à douze ans peut s’écouler avant qu’il ne sorte un album solo ou se mette en tête de travailler sous un autre nom ou en collaboration avec d’autres musiciens. C’est pas comme ça qu’on se fait un nom auprès du public. Il vient même avec des projets d’albums instrumentaux. En 1991, quand il retrouve ses comparses de Japan, il enregistre sous le nom de Rain Tree Crow. La division marketing de Virgin devait être contente. En 2003, d’un commun accord, David Sylvian quitte la major pour créer son propre label, Samadhi Sound.

Dégagé des conventions, David Sylvian livre des albums plus personnels et radicaux. Les sorties du label ne se cantonnent pas aux projets du Britannique. Les signatures du label sont éclectiques : le compositeur américain Harold Budd, un jeune chanteur suédois Thomas Feiner, le groupe folk anglais Sweet Billy Pilgrim. Terriblement bien produits, les disques de Samadhi Sound bénéficient tous d’un évident souci du détail. Le catalogue ne peut être écouter d’un oreille distraite, il demande du temps pour être apprécié, mais offre à qui veut l’entendre une musique toute en délicatesse.

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Janvier 2010 · N° 19

Article extrait du Magazine Causeur



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