Le 7 mai, les citoyens britanniques se rendront aux urnes. Ils éliront directement dans 650 circonscriptions leurs représentants à la Chambre des communes et désigneront donc indirectement le parti qui dirigera la coalition gouvernementale ainsi que le prochain locataire du 10 Downing Street. Selon les sondages, à une semaine du scrutin, les deux grands partis – les travaillistes et les conservateurs – et leurs leaders respectifs – Ed Miliband et David Cameron – sont au coude à coude. Globalement, les rapports de forces au sein du prochain parlement sont plus que jamais difficiles à prévoir. La raison principale d’une telle incertitude est la transformation du traditionnel bipartisme britannique en un système multipartisan. Certes, dès 2010, les libéraux-démocrates de Nick Clegg, forts de 22% des suffrages, avaient permis aux conservateurs dirigés par David Cameron de former un gouvernement de coalition. Mais cette fois-ci, pas moins de trois autres formations – les souverainistes de l’UKIP, le Scottish National Party (SNP) et les Verts – sont susceptibles de faire élire quelques députés (un exploit dans un système majoritaire comparable à celui de la France), ou à tout le moins de fortement perturber la bataille entre travaillistes et conservateurs dans des dizaines de circonscriptions, y compris dans certains fiefs de l’un ou l’autre parti.
Les libéraux-démocrates, aujourd’hui alliés des conservateurs, pourraient changer de partenaires dans le cas – probable – où Nick Clegg perdrait son siège de député, laissant ainsi la tête du parti au très croyant et plus à gauche Tim Farron. L’UKIP et son chef Nigel Farage pourraient séduire des eurosceptiques tandis que le SNP – qui rassemble 4% des intentions de vote, naturellement concentrées dans les 59 circonscriptions écossaises – risquent d’infliger un coup très dur aux travaillistes, traditionnellement bien implantés dans ces contrées. Si on ajoute à ce tableau les Verts et la singularité de l’Irlande du Nord, on peine à y voir clair. Cependant, pour beaucoup, l’enjeu du scrutin se réduit à sa dimension personnelle : Miliband ou Cameron. Or, quand les sondeurs interrogent les Britanniques sur les compétences respectives de ces deux leaders à gouverner le pays, l’actuel Premier ministre jouit de la prime au sortant. Ed Miliband souffre en revanche de son image d’un homme un peu distant qui a du mal à communiquer avec les autres.
Puisqu’il faut une guerre mondiale pour constituer un gouvernement d’union nationale avec du sang, de la peine, des larmes et de la sueur, on ne peut pas exclure la répétition du scénario de 1974. Il y a quarante ans, après que l’indécision des électeurs eût produit une chambre introuvable en février, le travailliste Harold Wilson dirigea pendant quelques mois un gouvernement minoritaire… jusqu’à ce que des élections anticipées en octobre ne lui accordent une très courte majorité.
Et devinez quel était le grand débat à l’époque, outre-Manche ? Je vous le donne en mille : la tenue d’un referendum sur l’intégration du Royaume Uni à la CEE, ancêtre de l’Union européenne. Qui a dit que l’histoire ne repassait jamais les plats?
*Photo : wikicommons.
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