Dans le journal Le Monde, Gérald Darmanin affirme qu’il est «important que l’empathie et la compréhension soient aussi fortes que la raison et la technique. N’être que dans l’émotion, c’est démagogique. Mais n’être que dans la rationalité, c’est parfois être éloigné de ce qui fait le principal de la politique». Il refuse toutefois toute idée d’alliance avec les puissants groupes du RN ou de LFI.
Dans une récente interview, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, donne au gouvernement la tâche de « parler aux tripes des Français ».
Le vocabulaire choisi est curieux : le ministre entend-il par là une sortie de la raison et un discours de l’émotion alors que ce qui est justement demandé par les Français, c’est plutôt une action décisive et raisonnable dans les deux domaines qui leur importent – les fins de mois difficiles et pour certains impossibles, et l’insécurité qui a largement dépassé le seuil du fameux sentiment d’insécurité pour devenir une préoccupation quotidienne, une cause d’angoisse terrifiante ? La centaine d’agressions au couteau par jour, les attaques contre les policiers, censés protéger les citoyens, et désormais victimes quotidiennes comme tout un chacun, sont la preuve d’une situation qui devient dramatique et incontrôlable.
La France a peur
Le ministre reprend cette antienne de la peur de l’autre qui serait, selon lui, le couplet des extrêmes. Comme il le dit, nous devrons être dans l’émotion positive, l’écoute, l’empathie et non pas comme les extrêmes dans la division et la peur. Or, qu’est-ce que la division sinon le conflit souhaitable en démocratie, le conflit qui permet d’exprimer la richesse et l’intérêt de tous les points de vue même les moins orthodoxes ? Or qu’est-ce que la peur si ce n’est l’émotion qui permet de se protéger du danger ? Bien évidemment, il existe des conflits destructifs et nuisibles ; bien évidemment il existe des peurs de dangers imaginaires et fantasmés, mais n’est-ce pas justement le rôle d’un gouvernement de transformer la violence des divisions irréductibles en conflits créateurs d’intelligence collective et de solutions concrètes, et d’accepter la réalité des peurs des Français qui demandent qu’on les protège des dangers réels ? Le besoin des Français, aujourd’hui, c’est un besoin de protection et une demande d’intelligence des situations douloureuses qu’ils vivent quotidiennement.
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Accuser d’extrémisme ces millions de Français qui ont peur d’un lendemain chaotique et dangereux, c’est courir le risque de désordres civils et d’un refus catégorique d’un gouvernement dirigé par des technocrates qui ont accumulé les décisions hasardeuses et maladroites dans la guerre en Ukraine, la gestion de la crise sanitaire, le traitement de l’immigration de masse et de l’insécurité.
Car comment devient-on « facho » de nos jours ?
En ne supportant plus les naïvetés, les mensonges, les dénis de réalité des bonnes âmes sur l’immigration, l’insécurité, le multiculturalisme, l’islamisme, l’éducation, l’écologie, en refusant d’être en permanence culpabilisés sur la colonisation, l’esclavage, la dégradation et le pourrissement des « quartiers populaires », en constatant l’hypocrisie des nantis qui prétendent défendre le peuple sans le connaître ni le fréquenter réellement, en dehors du peuple exotique qui les sert en denrées variées, et qui parlent de justice et d’égalité tout en validant les lois qui créent l’injustice et l’inégalité.
Être « facho » de nos jours, c’est être lucide sur l’état réel de la société et savoir résister à des propagandes qui diffusent la novlangue de la pensée correcte.
Être « facho » c’est avoir le courage de supporter le fardeau de l’esprit critique et de la liberté d’expression qui se paye trop souvent par la marginalisation et l’ostracisme. Alors être « facho », est-ce vraiment être facho ou bien est-ce combattre de nouveaux fascismes qui comme les précédents veulent se présenter comme l’émanation de la pure vérité qui ne peut être critiquée, débattue et même blasphémée ? de nouveaux fascismes qui ne profitent pas de peurs imaginaires mais qui sont au contraire à l’origine de peurs réelles contre lesquelles le citoyen ordinaire est laissé sans protection véritable.