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Danser le slow: de Napoléon à George Michael


Danser le slow: de Napoléon à George Michael
Couple de retraités dansant le slow au Festival de Goodwood, Angleterre, 27/7/2021 David Hartley/Shutterstock/SIPA Shutterstock40870162_000005

« Dis si ce soir, on dansait le dernier slow? » chantait Joe Dassin en 1980. Prémonition ? Quand avons-nous dansé notre dernier slow ? Il y a un an ? Un siècle ? Une éternité ?


Danser un slow, avec les nouvelles règles imposées par la distanciation sociale semble effectivement une pratique qui appartient dorénavant à un autre monde, même si cela ne date pas d’hier. On trouve, sur internet, un nombre impressionnant d’articles sur la disparition du slow, du Monde à 20 Minutes, ainsi que des sites qui répertorient les photos représentant les frotti-frotta les plus torrides. Cela montre à quel point cette danse, ou plutôt cette parade amoureuse, a marqué ceux qui, comme moi, furent adolescents dans les années 80. L’âge d’or du slow et des boums, symbolisé, évidemment par le film du même nom. « J’aurais pu jouer à la Sophie Marceau, j’aurais pu tomber dans tes bras pour un slow, mais je ne suis pas comme ça » chantait en 2013 l’interprète du groupe Granville de sa voix acidulée, des jeunes gens nostalgiques pour qui le slow devait déjà être vintage.

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Lorsque j’ai décidé d’écrire cet article, comme pour m’administrer un shoot supplémentaire de nostalgie, afin d’échapper pour quelques instants à cette époque délétère, j’ai demandé à mes contacts sur Facebook de me raconter des expériences de slows de leur jeunesse. Je fus vite submergée de témoignages plein de larmes contenues. Les souvenirs de la première « pelle » évidemment, car le slow ne servait finalement qu’à cela, mais aussi d’humiliation, pour ceux qui faisaient tapisserie, qui n’arrivaient pas à « emballer ». Ainsi notre collaborateur Pierre Cormary : « Panique, trac, maladresse, échec, envie de mourir, renonciation au slow », ceci est bien sûr un peu exagéré, mais nous ne mesurons pas à quel point le slow pouvait s’apparenter à de la torture pour ceux qui n’étaient pas choisis, pour ma part je n’attendais pas le quart d’heure américain pour inviter le garçon qui me plaisait, à mes risques et périls. Il y eut bien sûr des témoignages énamourés tout en sensualité suggérée :  « Douze ans, sur « La maladie d’amour », je posais pour la première fois mes mains sur les hanches d’une fille, l’addiction fut immédiate ». Quant aux chansons de nos premiers émois, ce sont évidemment toujours les mêmes qui reviennent : « Hotel California » des Eagles, « Still loving you »des Scorpions, et bien sûr, l’ineffable « Reality » de La Boum. Mention spéciale me concernant pour « Careless Whispers » de George Michael, premier de l’an 84, et visage de mon cavalier barbouillé de mon rouge à lèvres.

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Les propos des DJs de mes amis sont également précieux, car ils donnent des pistes qui peuvent expliquer la disparition de cette pratique, qui, étonnamment, daterait de 1809, lorsque Napoléon qui revient victorieux de la campagne d’Autriche, enlaça Joséphine lors d’une valse torride. Dis, si on inventait le premier slow ?

Disparition donc, mais aussi pratique qui perdura jusqu’aux années 2000, ainsi raconte le DJ François Dieudonné : « Je me rappelle bien du nouvel an 2000, à la fin d’un set très orienté techno, j’avais conclu avec une version live de 20 minutes de « Purple Rain » de Prince, j’ai vu 150 personnes enlacées comme si leur vie en dépendait. » Cependant, d’après lui, la ringardisation du slow survenue au cours des années 90, dans le sillage de la techno et du grunge, a rendu le jeu de la drague plus brutal. Finie l’approche codifiée aux étapes implicites, guidées par la fille qui décidait, si, oui ou non, son cavalier pouvait promener ses mains au-dessus de ses  fesses alors qu’elle mettait son visage dans son cou. Lumières tamisées. Moments d’éternité.

Quant à Mathieu Alterman, journaliste et ex producteur dans la musique, il nous livre un scoop : « Le plan marketing de la lambada était basé sur l’explosion des cas de sida : comme faire une chorégraphie sexy mais pas trop collée ». Je vous laisse imaginer ce que pourrait donner une danse « covidesque » : le masque que l’on enlèverait telle Rita Hayworth ses gants, la distanciation chorégraphiée, tout en tenant le passe sanitaire à la main.

Bedos et Sophie Daumier en auraient fait un sketch certainement hilarant. « La drague et le covid ». Perdue dans ma rêverie et mes souvenirs, je donnerai aujourd’hui quelques heures de ma vie pour danser un dernier slow.




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est enseignante.

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