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Twitter/X: l’ignominie au quotidien

Le billet de Philippe Bilger


Twitter/X: l’ignominie au quotidien
L'adjudant-chef Éric Comyn, 54 ans, a été tué à Mougins suite à un refus d'obtempérer, le 26 août 2024. DR.

Parce qu’elle a osé affirmer que la France avait tué son mari « par son insuffisance, son laxisme et son excès de tolérance », Harmonie Comyn est victime de propos odieux. Diligentée par le parquet de Draguignan, une enquête pour cyberharcèlement est ouverte, annonce l’AFP. Mais sur Twitter, l’anonymat rend compliquée l’identification des misérables qui s’en rendent coupables.


Face à l’ignominie au quotidien de X (ex-Twitter), fuir ou résister ? Pour moi, la réponse a toujours été claire : il ne faut pas laisser le champ libre à la grossièreté et à l’abjection d’une minorité qui dégrade et déshonore ce réseau social au point que parfois on passe plus de temps à bloquer qu’à discuter. Les insultes, les vulgarités qui me sont destinées, pour ne pas parler des attaques indignes – les références, par exemple, à mon père de la part souvent d’incultes historiques – me touchent peu puisqu’elles émanent de trop bas et j’ai la ressource, y répliquant, de les faire disparaître et de chasser ces twittos de mon compte.

Twitter, un cloaque ?

Deux exemples : Le député LFI Sébastien Delogu s’était vu reprocher de circuler à contresens à Marseille. Il avait mis en cause la police à cette occasion. Je m’étais contenté de demander si oui ou non il avait circulé à contresens. J’ai subi de la part de certains de ses soutiens sur X une série d’immondices dont l’élu n’était pas responsable mais qui donnaient une image très peu reluisante de LFI. J’avais tweeté sur la députée LFI Ersilia Soudais et elle m’avait répondu en laissant croire que je l’avais critiquée sur son apparence physique. Alors que j’ai pu démontrer par la suite, malgré les inepties multipliées à mon encontre, que ma bonne foi était entière. Alors, face à l’insupportable, ne jamais s’effacer mais se battre ; ou bloquer si on n’a pas le choix.

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En revanche ce n’est pas la même chose quand la veuve d’un adjudant de gendarmerie exemplaire, tué à la suite du comportement criminel d’un Cap-Verdien condamné à plusieurs reprises, mis en examen et en détention provisoire, est traitée sur X sur un mode qui défie l’entendement. Il relève plus d’abjections que de propos articulés. Une enquête, d’ailleurs, a été ordonnée tant la mesure était dépassée. Cette femme digne et courageuse a eu le grand tort, pour ces voyous du réseau social, d’intervenir après la mort de son époux qui va la laisser, avec ses deux enfants, dans un chagrin durable, en mettant en cause la France qui n’avait pas su prendre les mesures pénales pour empêcher un tel individu de nuire. Un discours émouvant, fier et lucide, dont les citoyens de bonne foi n’auraient pas eu un mot à retirer. Même si je commençais à avoir une certaine habitude de ce cloaque, j’ai tout de même été saisi par l’intensité des horreurs déversées sur l’épouse de l’adjudant Comyn.

Des dérives permises par l’anonymat

De la même manière que dans l’affaire de la soumission chimique de sa femme actuellement au tribunal, je cherche à comprendre les ressorts sombres et pervers de Dominique P, il faut que je tente de découvrir ce qui, dans l’humanité de ces brebis galeuses, est différent de celle de la majorité des gens. Ceux-ci éprouvent en effet le plus grand respect pour cette veuve parvenant à poser les bonnes questions face à la tragédie qui la frappe. Ces twittos, quel fond, quel caractère est donc le leur ? Sont-ils dénués de toute sensibilité ? N’ont-ils que des pulsions négatives qui les conduisent à cracher sur la noblesse de certaines personnalités ? Sont-ils tellement pauvres dans l’usage du langage qu’ils en sont réduits à l’insulte ? Se rendent-ils compte de leur ignominie ou leur rapport avec autrui n’est-il fait que de mépris et d’un défaut radical d’empathie ? Est-il trop tard pour leur apprendre les bases minimales du respect de l’autre et les règles les plus élémentaires de la vie en société ?

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L’anonymat qui sévit sur X permet-il à quelques-uns d’exprimer leur part mauvaise, implacablement mauvaise, qui a besoin de s’extérioriser quel que soit le sujet, qu’il soit tragique ou non ? Comme s’il y avait des humains qui, mélangeant sans doute un terrain psychologique et intellectuel défaillant avec des conditions sociales modestes, avaient plaisir à s’abandonner, par une sorte de sadisme les rassurant sur eux-mêmes, aux pires instincts, à des dévastations gratuites, au mal pour le mal ? Quand on désire appréhender le crime ou des ignominies d’une autre sorte, on n’échappe jamais à cette question fondamentale : le mal est-il en nous ou l’a-t-on hérité ?

Malgré le tableau très sombre que j’ai dressé de X et qui a culminé, dans l’ignoble, contre Harmonie Comyn, il faut pourtant y rester. Il n’est pas nécessaire d’espérer pour tweeter. La résistance est à elle-même sa belle et éclatante finalité. Comme la stigmatisation des voyous. C’est peu mais c’est déjà cela.



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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