Aux portes de la mort, Eastwood sauve un ado mal parti dans son ultime « Cry Macho ». Le film de trop ?
Pour trois films testamentaires, un 4ème offert : ça se passe comme ça chez Clint Eastwood. Après « Million dollar baby », « Gran Torino » et « The Mule », de qualité décroissante, voici encore plus bas « Cry Macho » où l’acteur-réalisateur, vieillard à verdeur éprouvée, remet dans le droit chemin un ado à moitié mexicain et le ramène chez son père, une canaille mais qu’importe.
Déjà vu mille fois en beaucoup mieux (« Honkytonk man ») ou en moins pire (« Un monde parfait »), l’affrontement de deux âges de la vie est rendu inédit et délirant ici par le fait qu’Eastwood, qui a 90 ans, joue un personnage simplement sexagénaire. Il se bat, dompte les chevaux et séduit les femmes comme s’il jouait toujours dans « Les Proies » (Don Siegel, 1971).
Vieillard masqué sans masque
La sexualité est rendue de façon presque gênante dans « Cry Macho ». Toutes les femmes du film se pâment, sitôt qu’Eastwood apparaît – hormis les adolescentes, qui ne savent pas ce qu’elles perdent. Une Mexicaine nymphomane abouchée avec des brigands lui fait le grand jeu dans sa chambre d’hacienda bien mal acquise, mais Clint ne mange pas de ce pain-là. Il aime garder le contrôle. Dans « Chasseur blanc cœur noir », son personnage se plaignait qu’une soupirante délurée lui ait fait subir le traitement d’une machine à laver sur programme essorage. Aucun risque ici, les prostituées qui font des bruits de bouche à son passage en seront pour leur frais. Seule une veuve non bilingue saura le conquérir par sa chaste pudeur (l’actrice mexicaine, Natalia Traven, d’un âge indéfini entre 40 et 60 ans.)
Si le féminisme revient à séparer les femmes en deux catégories, les mamans et les putains, Eastwood est assurément féministe. Dans l’un des trois sketchs du « Plaisir » (Max Ophüls, 1952), un vieillard masqué fait la noce dans des bals avant de s’effondrer, frappé par une attaque. Le masque était la condition sine qua non de la séduction. Eastwood, dans « Cry Macho », a oublié le sien, considérant qu’il n’en avait nul besoin. La légende se suffit à elle-même, croit-il. A tort, et le spectateur aura bien du mal à voir autre chose qu’un Nosferatu à patte traînante, pseudo grand frère jouant au joli cœur.
Tout ça – 1h44 d’inepties – pour dire qu’à 90 ans, Eastwood bande encore ! On est ravi de l’apprendre, mais on s’en serait bien passé, tout comme du film, le pire de sa carrière, et de fort loin.
En salles depuis le 10 novembre