Sur le papier, le dédoublement des classes des CP en zone d’éducation prioritaire est une mesure salutaire pour combler les inégalités entre établissements. Mais son application se heurte à deux réalités de terrain: le manque de salles et d’enseignants.
Durant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s’était engagé, en matière d’éducation, à donner la priorité aux écoles maternelles et élémentaires. C’est dans cet esprit qu’il a chargé le ministre Jean-Michel Blanquer de créer le dispositif « 100 % de réussite en CP ». Avec un objectif fort louable, précisé sur le site de l’Éducation nationale : « Pour combattre la difficulté scolaire dès les premières années des apprentissages fondamentaux et soutenir les élèves les plus fragiles, les classes de CP en REP et REP+, et les classes de CE1 en REP+ seront dédoublées à la rentrée 2018. L’objectif global dans lequel s’inscrit cette mesure est “100 % de réussite en CP” : garantir, pour chaque élève, l’acquisition des savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter, respecter autrui) », précise le site officiel de l’Éducation nationale.
Une mesure salutaire…
Tout le monde s’accorde sur le constat : certains élèves arrivent en 6e sans maîtriser les savoirs de base et éprouvent d’énormes difficultés à suivre les cours. La faute incombe entre autres aux passages quasi systématiques d’une classe à l’autre sans réel contrôle de connaissances, le redoublement ayant pratiquement disparu.
Les moyens engagés pour renforcer l’ « acquisition des fondamentaux », comme on dit Rue de Grenelle, sont énormes, mais si mal employés qu’ils ne produisent aucun résultat. D’où le dédoublement des classes de CP puis de CE1 dans les écoles situées en REP+ (réseau d’éducation prioritaire renforcé). Concrètement, il s’agit de constituer des classes de 12 élèves ou d’affecter un second enseignant aux classes existantes.
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A priori, le dédoublement des classes est une mesure salutaire afin de combler les inégalités entre établissements. Mais son application se heurte à deux réalités de terrain : le manque de salles de classe et de professeurs des écoles.
…mais l’intendance ne suit pas
L’an dernier, le dédoublement, limité aux 2 500 classes situées en REP+, a pu être géré tant bien que mal par les communes, mais les choses vont se compliquer alors que le dispositif doit être étendu aux 5 600 classes de CP situées en REP et REP+, ainsi qu’à une partie des CE1 en REP+. Or, la création de nouvelles classes requiert la recherche de foncier, la réalisation des études techniques, le financement dans le cadre de marchés publics, tout cela étant peu compatible avec l’urgence.
Autre obstacle que le gouvernement n’avait pas prévu : le nombre d’enseignants nécessaires aux dédoublements. Faute de pouvoir créer des postes, on déshabille Paul pour habiller Pierre, l’augmentation du nombre de classes en REP et REP+ amenant à la fermeture de classes dans les académies en zone dite « banale ».
Péchant par naïveté ou optimisme, le gouvernement misait sur une baisse de la démographie dans certains territoires. Ainsi, malgré le solde naturel positif des départements de petite couronne francilienne qui concentrent un grand nombre de zones REP et REP+, 420 classes y ferment à la rentrée.
Au détriment des classes moyennes
Ainsi, en favorisant certaines zones très en difficulté, on lèse des territoires qui ne sont guère mieux lotis. Il faut désormais dépasser 30 élèves en moyenne par classe pour justifier une ouverture de classe de maternelle ; 27 élèves pour une classe de primaire. S’il existait jusqu’à présent une certaine souplesse, les ratios sont aujourd’hui strictement appliqués. Afin de ne pas subir une fermeture de classe pour un élève en moins, les maires auront, d’autre part, plus de réticence à accorder des demandes de dérogations à la carte scolaire.
Le dispositif « 100 % de réussite » mobilise 6 200 postes. De sorte qu’il manquera 1 200 professeurs des écoles à la rentrée.
Bref, alors qu’on prétend faire mieux sans s’en donner les moyens budgétaires et humains, ce sont comme souvent les classes moyennes qui paieront les pots cassés, ou plutôt leurs enfants entassés dans des classes dirigées par des enseignants débordés.
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