Becassine s’en va t-en guerre…
Lors d’une émission de CNews, « Punchline », animée par Laurence Ferrari, un psychologue, le Dr. Doridot s’est exprimé sur la violence des adolescents. Ce thème était introduit par l’assassinat d’une professeur d’espagnol à Saint-Jean-de-Luz par un de ses élèves âgé de 16 ans et cette tragédie avait mené les débatteurs à s’interroger sur la violence actuelle des adolescents: le harcèlement via les réseaux sociaux ou pas, les agressions au couteau, les morts d’un coup de couteau… Comme si, de tout temps, les adolescents s’étaient promenés avec un couteau de cuisine à la main. C’est alors que le Dr. Doridot a pris la parole pour dire que « la violence chez les adolescents a toujours existé depuis la Guerre des boutons » et que « l’école sait de moins en moins canaliser cette violence. »
Deux choses ont frappé Bécassine dans cette phrase. La première concerne cette violence qui existe depuis toujours, voir la fameuse « guerre des boutons ». Bah justement, elle l’a vu, ce film, et la différence qui existe entre les canifs des enfants des deux bandes et les couteaux que les garçons d’aujourd’hui utilisent, ne tient pas seulement à une différence de taille, mais aussi et surtout à une autre fonction. Car dans le film en question, les canifs servent à couper les fils des boutons et pas à entrer dans le corps de « l’adversaire ». Ces boutons sont donc les médiateurs fondamentaux de la violence ici symbolique et non réelle. Certes, violence il y a: l’humiliation de rentrer en tenant son pantalon à deux mains, la colère parentale qui ne comprend rien à la disparition systématique de ces boutons, les effets de cette colère, etc. Mais il n’empêche que le couteau ou canif jamais n’attaque l’autre directement et que la situation est à tout moment réversible. Une fois c’est une bande qui a le dessus, une fois c’est l’autre et cela peut recommencer à l’infini.
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Le bouton est ainsi devenu dans cette histoire le médiateur intelligent qui permet de « canaliser la violence » comme dit le monsieur ; de la ritualiser.
Quant à l’école qui ne saurait plus « canaliser » cette violence, Bécassine en a assez de l’entendre. Non qu’elle souscrive au renoncement à la Loi que l’École dans son étrange christianisation inconsciente a intégré au nom de la compréhension et de la fausse charité qui va avec; loin s’en faut et elle s’est assez battue à ce sujet avec ses collègues (symboliquement s’entend puisqu’elle sait parler; autre médiation fondamentale entre l’autre et moi, et l’extrême pauvreté linguistique des élèves explique autant que l’absence de Loi les passages à l’acte pour cause de dé-symbolisation fatale), mais elle fatigue devant le refus de voir que l’École n’est pas déliée de l’histoire et que notre époque n’offre plus aux adolescents en question la moindre initiation qui leur permettrait d’intégrer leurs pulsions. Et qu’elle favorise même cette violence que les professeurs devraient « canaliser » !
Un canal manque, c’est certain. Il s’appelle le symbolique et sa disparition signera la nôtre.
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