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Coût des catastrophes naturelles: un mensonge de plus

Ce n'est pas une arnaque à l'assurance mais presque...


Coût des catastrophes naturelles: un mensonge de plus
Crue de la Vilaine, au sud de Rennes, dans la commune de Pont Rean, 30 janvier 2025 © Bruno Colliot/SIPA

Rémy Prud’homme dénonce dans cette tribune la mauvaise foi des assureurs quant au coût des dommages des catastrophes naturelles que nous subissons en France


Le Figaro, qui cite l’AFP, qui cite les Assureurs de France explique que le coût des événements climatiques pour les assureurs est trois fois plus élevé en 2024 (5 milliards) qu’en 1984 (1,5 milliard). Ces trois institutions voient là une preuve irréfutable des méfaits croissants du « dérèglement climatique ». Vite, doublons la taxe carbone et les crédits du ministère de la transition écologique ! Il est pourtant facile de voir que la démonstration est quadruplement mensongère.

Des allégations douteuses

Primo, elle compare un coût en euros 1984 avec un coût en euros 2024, une absurdité que l’on ne pardonnerait pas à un étudiant de première année. Secundo, cette présentation ignore le fait qu’en 40 ans, la France s’est développée, qu’il y a davantage de maisons, d’entreprises, de routes, etc. à la merci des phénomènes climatiques, et qu’un ouragan donné détruit plus de biens en 2024 qu’en 1984. Tertio, elle fait l’hypothèse que le taux d’assurancialité (le pourcentage de propriétaires assurés) est resté constant ; on espère pour les assureurs qu’il a augmenté. Quarto, elle postule que les dommages naturels dépendent uniquement de la violence des phénomènes et pas du tout des mesures prises pour les contrôler.

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Il est facile de corriger les deux premiers mensonges. Il suffit de comparer le ratio coût des dommages / PIB (en euros courants) pour les deux dates. En 1984, il était de 0,20%. En 2024, de 0,17%. Rapporté au PIB, le coût pour les assureurs des phénomènes climatiques n’a pas augmenté de 230% (ce qui serait effrayant), il a au contraire diminué de 15% (ce qui est rassurant).

Si l’évolution du coût des dommages pour les assureurs est une mesure de l’évolution des changements climatiques – ce que l’on veut nous faire croire, et qui n’est pas évident – alors les chiffres publiés montrent que le changement climatique a un effet positif. Vite, célébrons le réchauffement, et augmentons nos rejets de CO2 !

« C’est la faute au climat »

L’opération de désinformation des Assureurs, de l’AFP et du Figaro soulève des problèmes qui vont bien au-delà de son sujet. Comment est-elle possible ? Elle ne peut guère s’expliquer par l’ignorance. Les Assureurs, chez qui les statisticiens et les économistes sont nombreux et excellents, savent bien qu’on ne compare pas des euros courants avec des euros constants. Chez eux la tromperie est délibérée. Pour les journalistes (de l’AFP et du Figaro) qui ne sont pas toujours à l’aise avec les chiffres, et qui veulent – et doivent – faire vite et sensationnel, le doute est permis, et la tromperie n’est sans doute pas intentionnelle.

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Pourquoi cette désinformation est-elle engagée ? Pour les Assureurs : parce qu’elle leur profite. Faire croire aux citoyens et aux politiques que le méchant climat augmente considérablement leurs coûts est un bon moyen de faciliter l’augmentation de leurs primes. Ils le font d’autant plus volontiers qu’ils savent que tous les médias vont reprendre la fable de leur triplement des coûts. Pour les journalistes, les pouvoirs publics, et les soi-disant fact-checkers : parce qu’elle s’accorde avec la doxa officielle et dominante, et avec leurs convictions vagues et profondes. Les dommages de Mayotte ou des inondations n’ont rien à voir avec les constructions illégales ou les permis de construire en zones inondables. Pas besoin de chercher si loin quand on a sous la main un bon coupable : c’est « la faute au climat ».

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Rémy Prud’homme est professeur d’économie émérite à Paris XII. Ancien directeur de l’environnement à l’OCDE, il a enseigné au MIT et à l’Université de Venise. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont très récemment Les vrais responsables de la crise énergétique (L‘Artilleur, 2022).

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