Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique, Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. «J’aime qu’on me contredise!» pourrait être sa devise.
Il est un moment où il m’est impossible d’interrompre Élisabeth Lévy, c’est quand je lis son éditorial dans Causeur. À la différence des débats sur CNews où nos échanges peuvent être vifs, car l’un comme l’autre nous n’aimons pas l’eau tiède, je dois accepter, ou à tout le moins entendre, ses commentaires et analyses sans mot dire. Et sans maudire, car j’ai la passion de la disputatio, des confrontations politiques où il ne s’agit pas d’effacer les clivages, les ancrages, mais de les assumer crânement pour contribuer à notre vie démocratique. Macron et les siens, à commencer par les forces de l’argent, ont-ils réellement cru atteindre leur objectif ? Réduire un horizon humain à un tableur Excel ? En finir avec le débat et le désir d’imaginaire ?
Alors, quand Élisabeth Lévy m’a proposé cette chronique, « Coup de rouge », j’ai accepté avec la garantie d’une expression totalement libre. Au regard de ma sensibilité politique, l’alliance du drapeau rouge et du drapeau tricolore, de Ferrat et de Fréhel, je viens ici pour être lu… sans être interrompu et avec mon tempérament de Gascon : « On trouve des mots quand on monte à l’assaut ! » (Cyrano de Bergerac).
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Par quoi commencer ? Le travail !
Justement, c’est le thème de ce numéro, et sans l’avoir lu, je subodore que notre désaccord sera frontal…
Si l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite et celui de la durée de cotisation est à ce point rejeté, et de manière écrasante, par les salariés, du public et du privé, les plus exposés aux travaux pénibles, c’est qu’il est déjà impossible d’atteindre une carrière complète. Voilà la première défaite idéologique de Macron-Borne-Ciotti. Les premiers de corvée, les éclopés qui n’ont cessé d’« attaquer une journée de travail » pendant de longues années en espérant partir le plus tôt possible à la retraite pour en profiter un peu, leur disent : « Deux ans de plus, non merci !» Il faut donc changer le travail, sa nature, son sens. Il y a tant à faire dans ce domaine, à l’usine et au bureau, avec une véritable sécurisation des parcours professionnels, avec, de la fin du lycée jusqu’à 60 ans, l’alternance de périodes d’activités et de formation, pour s’épanouir au travail avant de profiter des plus belles années à la retraite, celles en bonne santé.
Voilà pourquoi ceux qui pensent que la « gauche du travail » ne devrait pas encourager les « feignasses » qui manifestent et ne veulent pas donner deux ans de plus pour « équilibrer les comptes » sont ou des ignorants ou des cyniques.
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Par quoi poursuivre ? Le capital !
Si le monde du travail est le plus opposé à cette réforme injuste, c’est que la pédagogie gouvernementale a échoué à rendre acceptable ce qui ne l’est plus. Alors que les entreprises du CAC 40 ont distribué 80 milliards à leurs actionnaires en 2022, dont 56,5 milliards de dividendes, un pognon de dingue pour un record historique, la réforme ne leur impose que la publication d’un index sur l’activité des seniors. Rien sur une nécessaire mise à contribution des revenus du capital comme le sont les revenus du travail pour le financement des retraites. Une question d’efficacité économique et de justice. Pour les Léon Dessertine/Bernard Blier –Un idiot à Paris – d’aujourd’hui, la fête continue avec des salariés qui restent les « êtres les plus vulnérables du monde capitaliste ».
Changer le travail et en finir avec le dieu argent. Les deux pour une retraite heureuse.