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Conseil constitutionnel: la planète des Sages

Coup de force de Laurent Fabius : la nation française réduite à un hall d’aéroport


Conseil constitutionnel: la planète des Sages
Le président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius, dans son bureau, décembre 2023 © CHINE NOUVELLE/SIPA

L’institution présidée par Laurent Fabius accorde l’aide juridictionnelle aux étrangers en situation irrégulière au nom du « principe d’égalité devant la justice ».


Ça se sait dans les coins les plus reculés de notre ancien empire. La France est bonne poire. Non seulement ce n’est plus un délit de s’installer sur son territoire sans y être autorisé (“délit” c’est méchant), mais quand on invite quelqu’un à bien vouloir partir s’il vous plait, on lui offre de multiples possibilités de contourner la décision ou de la contester en justice.

Le contribuable paiera pour la défense des clandestins

Mais pour nos prétendus sages (bien fol qui s’y fie), ce n’est jamais assez. Le Conseil constitutionnel vient de décider que les immigrés clandestins auraient désormais le droit à l’aide juridictionnelle (en l’occurrence, il censure une loi de 1991 qui réservait son bénéfice aux seuls Français et étrangers en situation régulière). Foin de ces distinctions oiseuses entre ceux qui respectent nos lois et ceux qui s’assoient dessus. Désormais, si un sans-papier veut intenter une action en justice, le contribuable français paiera. Ne remarquons pas que ledit contribuable doit débourser de coquettes sommes pour régler un conflit de voisinage ou un contentieux fiscal. Ce serait populiste.

Il est vrai que, dans le cas qui a abouti à la décision de l’institution présidée par Laurent Fabius, des sans-papiers qui poursuivaient des patrons-voyous, il n’est pas scandaleux qu’ils bénéficient de cette aide. Si on accepte que ces gens travaillent, préparent nos repas et nettoient nos bureaux, ils doivent pouvoir se défendre. Le scandale c’est qu’on laisse faire et que les patrons soient rarement sanctionnés.

Alambic infernal

Reste qu’à partir d’un cas particulier, pour lequel on pouvait trouver une solution (faire payer les patrons par exemple, me suggère l’ami Jean-Baptiste Roques), le Conseil inscrit une règle générale dans le marbre constitutionnel. Cet alambic infernal s’appelle l’Etat de droit. Je vous épargne les détails mais cela passe par une Question préalable de Constitutionnalité : on demande aux sages de trancher un point de principe soulevé au cours d’un procès. Ensuite, ce principe s’impose à tous.

A lire aussi, Jean-Eric Schoettl: Loi immigration : désaveu d’échec

Le raisonnement du Conseil est un sophisme géant. S’autorisant de la Déclaration des droits de l’homme et du Citoyen de 1798, qui affirme que la loi « doit être la même pour tous », les Sages de la Rue Montpensier estiment que les étrangers ne résidant pas régulièrement en France doivent bénéficier de garanties égales à celles des autres justiciables. On ne saurait donc admettre la moindre discrimination entre le clandestin et l’immigré en situation régulière.

Toujours plus loin

On peut aller plus loin en appliquant ce raisonnement à la lettre. Pour commencer, on dira que tous les gens se trouvant sur le sol français doivent avoir les mêmes droits : Français, immigrés légaux, clandestins. Il suffira d’être là. La nation réduite à un hall d’aéroport. D’ailleurs, pourquoi s’arrêter en si bon chemin  et exclure de nos droits et aides sociales l’étranger resté au village, celui qui n’a pas tenté l’aventure migratoire ? La France est un droit de l’homme. Universel.

Laurent Fabius a récemment déclaré au Monde que la préférence nationale systématique était anticonstitutionnelle1. Si l’on suit sa logique, le fait de réserver le droit de vote aux seuls Français devrait donc être vu comme une intolérable préférence nationale systématique qu’il convient d’accorder sans délai aux Chinois et Soudanais (pour commencer). Pour l’ancien Premier ministre de François Mitterrand, c’est en somme la France elle-même qui est anticonstitutionnelle. Sous prétexte de ce fichu État de droit, il promeut une idéologie sans-frontiériste rejetée par les Français (sans quoi il serait au pouvoir). En nous imposant sa lecture idéologique de nos textes fondateurs, Laurent Fabius se livre tout simplement à un coup de force judiciaire.

  1. https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/05/06/laurent-fabius-la-preference-nationale-appliquee-de-facon-systematique-est-contraire-a-la-constitution_6231839_823448.html ↩︎



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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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