Loin d’être des organismes de réflexion sur des questions de mœurs, les comités d’éthique sont bien souvent des instruments de validation des décisions politiques. La preuve par la PMA et la GPA…
Les instances publiques chargées de bioéthique seraient-elles en délicatesse avec leurs missions-mêmes ? Quelques mois après que Jean-François Delfraissy, président du Conseil consultatif National d’Éthique (CCNE), a déclaré : « Je ne sais pas ce que sont le bien et le mal », c’est au tour du Conseil national de l’Ordre des Médecins d’affirmer : « L’Ordre ne doit pas être une instance moralisatrice face à une demande sociétale. » Il semblerait que le bien et le mal, la morale, la déontologie (du grec deon – ontos : ce qu’il faut faire), soient devenus des sujets trop difficiles pour les comités qui ont la charge officielle d’y réfléchir. On parle de « sujets clivants » et tout est dit. Devant tant de modestie affichée, le citoyen qui finance ces organismes n’est-il pas en droit de se demander à quoi ils servent ?
« La bioéthique est une gigantesque escroquerie »
En cause, les débats autour de l’ouverture de la PMA aux femmes célibataires et homosexuelles. Un sujet qui va bien au-delà des libertés individuelles puisqu’il promeut un modèle de famille d’où le père est délibérément exclu. Et qui annonce l’acceptation à court terme de l’évolution symétrique, la GPA, où c’est la mère qui sera rayée de la généalogie des enfants à naître – des enfants créés pour le bon plaisir d’adultes plus attentifs à leurs propres « souffrances » qu’aux besoins élémentaires de ces rejetons si fort désirés. Dans notre société, la violence du désir des adultes arrache toutes les autorisations à tous les soi-disant comités d’éthique.
En vérité, il ne faut pas attendre de ces « comités ad hoc », nommés par le pouvoir politique pour entériner ses décisions, qu’ils défendent la morale commune. Comme le dit le mathématicien et philosophe Olivier Rey, « la bioéthique est une gigantesque escroquerie dont la fonction est d’approuver ce que l’éthique normale réprouve ».
L’historienne Nadine Fresco l’avait compris il y a près de vingt ans : « La bioéthique [est] un processus discursif d’intégration anticipée, une sorte de ‘jardin d’acclimatation’ dans lequel les condamnations ne remplissent fondamentalement pas d’autre fonction que les commentaires favorables aux innovations concernées. La condamnation de la dernière avancée biologique en date va de pair avec l’intégration d’une avancée précédente. »
Argent trop chair
Derrière cette complaisance pour l’innovation technoscientifique quelle qu’elle soit, de la plus anodine à la plus dangereuse, il y a des intérêts économiques, pour ne pas dire des lobbies. C’est parce que certains spécialistes voient dans l’extension de la PMA à des personnes nullement infertiles un « créneau » pour leur discipline que l’Ordre ne veut pas prendre parti contre une pratique qui dénature pourtant la médecine en tant qu’art du soin aux malades. C’est parce qu’il est la caution sociétale d’un gouvernement aux orientations libérales que le CCNE applaudit à la PMA « pour toutes »… en attendant de se féliciter de ce que la GPA « pour tous » abolira les dernières « discriminations » dont sont victimes les homosexuels masculins. Nulle éthique dans tout cela, nulle morale, nulle prise en compte de l’intérêt commun. Business as usual.
Médecine technique, médecine tragique: Sens et destin de la médecine moderne
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