C’est le printemps! Bonjour bonjour, les hirondelles! Le printemps gouvernemental étale en France son coming out. Sophie de Menthon se régale en lisant Playboy, Pif Gadget, Paris Match ou Têtu.
On ne peut quand même pas passer son temps à ne penser qu’aux seules préoccupations moroses des Français: les retraites, le pouvoir d’achat, le ramassage des poubelles, les guerres, etc… Heureusement, les membres du gouvernement ne se laissent pas aller à cette morosité ambiante. Le président de la République n’a-t-il pas dit à ses ministres de passer à autre chose ? Peut-être n’ont-ils pas tout à fait compris comment. Cela se traduit ces derniers jours par une sorte de coming out généralisé, censé nous changer les idées, avec en particulier le récit de la vie privée des uns et des autres, en toute transparence. De ce point de vue-là, on n’en demandait peut-être pas tant !
Playboy s’attend à des ventes record
La presse magazine n’en revient toujours pas de l’aubaine « Marlène Schiappa ». Cette façon très singulière de la subventionner est probablement due à une forme « d’économie sociale et solidaire », politique que prône par ailleurs son ministère… On est créative ou on ne l’est pas, et Playboy, c’est aussi de l’associatif, en quelque sorte. Le magazine de charme, qui frisait le dépôt de bilan, va voir cette semaine ses scores de vente battre tous les records. « Vous me le gardez, hein ? », demande-t-on à son buraliste. C’est qu’elle est sexy, Marlène Schiappa, et elle fait la une…
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Dans les années 2000 déjà, les hommes prétendaient acheter Playboy pour les articles de fond… Ce n’était pas leur faute si ces articles étaient encadrés et noyés dans des photos de starlettes (c’est comme ça qu’on disait) dénudées, mais certainement intellectuelles. C’était l’heureux temps où la gent masculine s’en réjouissait sans être accusée de machisme effronté et d’exploitation visuelle du corps de la femme. En plus, concernant Schiappa, nous avions déjà appris par un autre titre qu’elle était amoureuse et qu’elle assumait… De quoi nous donner chaud au cœur. Amoureuse, et coup de bol, son chéri gagne des photos sublimes d’un très grand photographe ! Très habillée sur les photos, avec des poses relativement lascives, la Secrétaire d’État est surtout drapée dans un drapeau français. Que demander de mieux pour nous réconcilier avec la Ve République ? Voilà en tout cas de quoi faire déprimer le RN qui s’était un peu accaparé le drapeau. Et tant pis si ce n’est pas le genre de beauté d’Elisabeth Borne ! On est très sévère avec Lili Marlène.
Marlène dans Playboy, moi j’aime bien !
Les femmes s’assument et je suis d’accord: ras-le-bol qu’on nous réduise à la gestion des barbecues et à nos règles douloureuses dans les entreprises! Pour une fois qu’une femme est sexy, consentante et sans complexes, il faut s’en réjouir. Alors, il paraît que ce n’est pas le bon moment. Mais on nous dit aussi que ce n’est jamais le bon moment. Et puis, en plein été sur les plages, cela aurait été un peu torride, et peut-être préjudiciable à notre lutte contre le réchauffement climatique ! Mais attention, Marlène a de la concurrence, avec le coming out d’une playmate élue à la CGT, jolie de surcroît. Pas sûr en revanche qu’elle nous réserve des défilés sexy dans les cortèges. Sur France inter, Sophie Binet a refusé, assez sèchement, de commenter la une de Playboy. Pas mal joué non plus, le magazine Têtu, qui aborde de son côté la vie sexuelle du ministre du Travail (je n’ai pas dit « au travail »). Il faut de la biodiversité, et les homosexuels s’épanouissent d’évidence en nombre au sein du gouvernement… Il faut s’en réjouir aussi, et si Olivier Dussopt a eu besoin de nous dire qu’il était gay, c’est probablement que la loi travail qu’il nous réserve ne va pas l’être?
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Et puis, on aime tant les médias, qu’on ne devra pas s’étonner si le préfet de police, Laurent Nunēz fait bientôt son coming out dans l’émission de Cyril Hanouna. C’est forcément l’endroit où se montrer, encouragé par le ministre de l’Intérieur.
Pif Gadget, c’était aussi une forme de coming out. Le président de la République nous a avoué implicitement qu’il avait gardé une âme d’enfant (et vlan !, pour tous ceux qui méchamment l’accusaient d’immaturité politique).
L’euthanasie, un sacré coming out
C’est en revanche moins gai pour le coming out (c’est le cas de le dire)… des mourants. Le débat sur la fin de vie – dont le président, tel Ponce Pilate, s’est saisi en s’en lavant les mains puisque la décision revient à un comité d’experts – peut nous étonner : les mutuelles ont donné gaîment leur accord pour abréger la question, et on sait que ce sont les toutes dernières années qui leur coûtent une fortune. En voilà de la bonne gestion économique ! Les mutuelles ont fait leur coming out, à leur façon. Mais on apprend aussi que ce sera une fin de vie « à la française », sur un modèle inédit… Youpi ! L’exception française jusqu’à la mort. Coming out, enfin, des trottinettes en location, exit les trottinettes, bonjour l’allégresse! Il paraît que ce fut un exercice de démocratie formidable: 7% de votants seulement, majoritairement âgés de plus de 60 ans – la meilleure manière de ne pas faire voter les jeunes, c’est quand même d’interdire le vote via internet. Mais, de toute façon, reconnaissons qu’on en avait marre de toutes ces sales trottinettes jetées par terre. Et comme on ne fait pas respecter les lois, on interdit, c’est bien plus facile.
Rassurez-vous, il y a quand même des come-backs, par exemple: les taxes sur les superprofits avaient été un peu oubliées, mais on nous les a ressorties, en les recyclant. Il s’agit désormais de taxer les superdividendes… Nouveau et intéressant ! Comment, en matière d’impôts, faire du neuf avec du vieux… Et puis, on va avoir d’autres surprises, car comme le printemps, c’est plein de promesses, une loi travail. Un peu comme celle sur l’immigration qui assurément nous promet des… « going out » ?
Pardon pour tout ce franglais cool, apprécié du gouvernement et du président lui-même, mais qui désespère des académiciens comme Jean-Marie Rouart ou nombre de lecteurs de Causeur, qui me pardonneront peut-être…
Mais comme on l’a vu, c’est la tendance: tout le monde se lâche !
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