Colin Field est aussi légendaire que le bar Hemingway qu’il a ressuscité au Ritz il y a vingt-huit ans. Ce barman de génie a donné ses lettres de noblesse à la confection des cocktails et défend un savoir-faire que l’esprit du temps cherche à vulgariser.
Comme son compatriote David Ridgway, légendaire sommelier de la Tour d’Argent depuis 1981, Colin Field appartient à cette catégorie d’Anglais amoureux de la France qui s’étonnent que les Français ne soient pas davantage fiers de leur drapeau qui rassemble la couleur de la royauté (le blanc) et celles de la ville de Paris (le bleu et le rouge) : « Je viens à l’instant d’obtenir ma naturalisation française, j’en suis très fier, et en mars j’aurai ma carte d’électeur ! » Cet enthousiasme qui fait chaud au cœur nous rappelle à quel point les Anglais ont joué un rôle essentiel dans le développement de notre art de vivre. Historiquement, c’est grâce à l’aristocratie anglaise que le vignoble de Bordeaux est devenu le plus célèbre du monde : au XVIIIe siècle, les navires remontaient la Garonne à destination de Londres chargés de tonneaux de château Latour, Margaux et Haut-Brion… Sans ce marché crucial, jamais ces propriétés n’auraient pu prospérer ! On doit aussi aux négociants anglais l’invention du champagne effervescent que nos vignerons champenois s’efforçaient depuis des siècles de maintenir « tranquille » et sans bulles jusqu’à ce que les lords leur fassent dire : « Nous, on adore les bulles ! » Et les premières bouteilles en verre capable de résister à la pression du champagne ont été fabriquées en Angleterre. Aujourd’hui encore, la vaisselle du palais de Buckingham date de Louis XVI et provient de la manufacture de Sèvres, les menus y sont écrits en français et la cave abrite les plus grands Bordeaux. En 1996, lorsque le buveur de bière Jacques Chirac est allé à Londres en visite officielle, la reine lui a servi un fabuleux Mouton-Rothschild 1961.
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