A la découverte du cinéma formosan


A la découverte du cinéma formosan

cinéma Formose La cité des douleurs

Il y a des préfaces décourageantes : concises et parfaites, elles mériteraient d’être citées intégralement pour commenter un livre. De quoi mettre les blogueuses au chômage ! C’est le cas de l’introduction que Wafa Ghermani a rédigée pour « le livre d’un film » La Cité des douleurs 「悲情城市」. C’est une lecture que je recommande à tous ceux qui n’ont pas été à La Rochelle pour le récent festival cinématographique et sa sélection des films de Hou HsiaoHsien「侯孝賢」, autant qu’à ceux qui ont eu le plaisir d’assister à cette rétrospective.

La Cité des douleurs
Ce festival a eu la bonne idée de programmer également le documentaire de Hsieh ChinLin 「謝慶鈴」, sans doute la meilleure passerelle vers la découverte de la « nouvelle vague » des cinéastes formosans, dont Hou HsiaoHsien, précisément, est l’un des plus célèbres représentants, avec Edouard Yang「楊德昌」. Alors qu’il a été produit d’emblée en français, anglais et chinois, ce DVD n’est pas encore distribué en France et c’est bien dommage. Je reviendrai sur ce documentaire qui mérite une tranche de blog à lui seul : Flowers of Taipei, Taiwan New Cinema 「光陰的故事 – 台灣新電影」.

Flowers of Taipei
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Hou HsiaoHsien, né en 1947. Son film le plus fameux, tourné en 1989, est Une ville de douleur, ou La Cité des douleurs 「悲情城市」BēiQíng ChéngShì, premier volet d’un tryptique sur Formose et son histoire après la Deuxième guerre mondiale, avec Le Montreur de marionnettes 「戲夢人生」Xì Mèng RénShēng (1993) et Bons garçons et bonne filles 「好男好女」 HǎoNán HǎoNǚ (1995).

Le livre dont je veux parler ici, en laissant ensuite la parole au traducteur français Gwennaël Gaffric 「關首奇」, est le scénario original et sa continuité dialoguée, par les deux scénaristes Chu TienWen 「朱天文」 et Wu NienJen 「吳念真」. Pas de précisions techniques superflues : le livre se lit très agréablement.

Chu TienWen est une femme de lettres taiwanaise, souvent mentionnée avec sa sœur Chu TienXin「朱天心」, elle même romancière , et leur père Chu HsiNing「朱西甯」. Une troisième sœur, Chu TienYi「朱天衣」, est également connue, tout comme leur mère Liu MuSha 「劉慕沙」, essayiste, et célèbre traductrice des classiques du japonais vers le chinois.

famille Chu
En haut à gauche, Liu MuSha ; à droite, Chu HsiNing.
En bas, Chu TienWen, Chu TienYi et Chu TienXin.
 

Chu TienWen est l’auteur d’une dizaine de romans et de nouvelles, dont Splendeur fin de siècle 「世紀末的華麗」ShìJìMòDe HuáLì , le prix Newman pour la littérature chinoise 2015. En France, elle est déjà publiée chez Christian Bourgois. Anthologie de la famille Chu et chez «Bleu de Chine» dans le recueil A mes frères du villages de garnison, anthologie de nouvelles taiwanaises contemporaines.

Wu NienJen 「吳念真」, l’autre auteur du film, c’est soixante-dix scénarios de films depuis 1979, une quinzaine de livres, un documentariste célèbre et le fondateur d’une troupe théâtrale, un comédien et un auteur de chansons. Bref, un personnage considérable à Formose.

Retenons au passage qu’il a contribué à l’adaptation cinématographique de 「殺夫」 Tuer son mari, également connu sous le titre français La femme du boucher (traduction française d’Alain Peyraube et HuaFang Vizcarra), le livre le plus connu en France de mon amie Li Ang 「李昂」et l’un des premiers romans taiwanais traduit en français, en 1980.

Tuer son mari
Citer son nom me fait penser à l’un de ses textes, une brève et dure nouvelle 「牛肉麵」 Un bol de nouilles au boeuf, traduit par André Lévy qui re-raconte en fait (mais Li Ang ne le dit pas : je suis une blogueuse indiscrète) ce que Shih MingTeh 「施明德」 , un opposant célèbre qui a passé de nombreuses années en prison, a vécu en 1964 dans le couloir des condamnés à mort du TGC, le « Département de la loi martiale » de la Garnison de Taiwan (Taiwan Garrison Command’ Martial Law Directorate) 「臺灣警備軍法處」TáiWān JǐngBèi JūnFǎChù, la gestapo du régime KMT qui ne sera formellement dissoute qu’en 1992, mais moins terrifiante à partir de 1965. Tout Français étudiant l’histoire de Taiwan doit connaître cette abréviation « TGC ».

Cette nouvelle, publiée initialement en 2007, est en fait l’histoire du bol de soupe de nouilles au bœuf que n’a pas mangé Huang ZuYao「黃祖堯」, un agent secret communiste, envoyé par le PCC à HongKong pour éliminer des anti-communistes mais qui fut retourné par une belle espionne taiwanaise et convaincu de passer du coté du KMT 「國民黨」GuóMínDǎng.

Une fois le détroit de Formose franchi, la prise du contre-espionnage taiwanais avait perdu de sa valeur et le TGC (ou des taupes communistes au sein du TGC, peut-être pour décourager de telles vocations) décida qu’il valait mieux une exécution pour faire un exemple plutôt que mettre en valeur un retournement pour attirer plus de communistes à passer chez les nationalistes. Ou bien peut-être le contre-espionnage taiwanais pensa que Huang était un faux-retourné et une vrai-future-taupe. Un demi-siècle plus tard, les communistes chinois post-maoistes faisant les yeux doux aux Taiwanais et l’un (au moins) des chefs de l’espionnage taiwanais à la retraite vivant à ShangHai, la question est difficile à élucider. Elle peut même paraître futile, sauf que demeure, pour comprendre une époque, la remarquable nouvelle de Li Ang, qu’on la lise dans le texte chinois ou dans l’excellente traduction d’André Lévy.

Si un jour je contribue à un manuel de littérature taiwanaise, bilingue, je donnerai le texte original et la traduction française de la nouvelle, mais en les faisant précéder de ce qu’en avait expliqué Shih MingTeh en 2002 Délires d’un révolutionnaire dévoué et bénévole「無私的奉獻者/狂熱的革命者」WúSīDe FèngXiànZhě /KuángRèDe GéMìngZhě et qui inspira Li Ang, comme je viens de le faire ci-dessus.

C’est peut-être cette nouvelle qui peut le mieux donner le ton et le parfum de ma tranche de blog ce matin, ce qui n’est jamais facile car l’encre d’imprimerie est noire et le papier blanc, comme mon texte sur écran, alors que je voudrais mettre un peu de couleurs, et d’odeurs :

Le rouge-brun est celui du ragoût「紅燒」HóngShāo de boeuf braisé, si possible du flanchet「牛腩」NiúNǎn, avec les « nerfs » i.e. des tendons「牛筋」NiúJīn devenus fondants à la cuisson et qui donnent une grande onctuosité à la viande et au bouillon. Mouillé par les nouilles avec un peu de leur eau de cuisson, c’est d’un rouge particulier que n’a pas la soupe claire de nouilles au bœuf 「清燉牛肉麵」QīngDùn NiúRòuMiàn des musulmans de l’ouest chinois, les Hui(s) ou Donganes, préparées sans braiser la viande de bœuf au préalable.

Comment faire transpirer du papier (et de l’écran d’ordinateur) l’odeur de cette soupe de nouilles au bœuf, devenue le plat emblématique de Taiwan ? Pourtant, à Formose les habitants ne mangeaient pas de viande de bœuf, puisqu’il n’y avait pas de bœufs, seulement des buffles considérés comme les compagnons et amis des paysans dans leur rizière ; et les Formosans cultivaient peu le blé, mangeant surtout du riz.

La soupe de nouilles au bœuf — claire chez les musulmans — rougeâtre braisée, ou « roussie » comme traduit habilement André Lévy — a été introduite par les soldats venus du continent chinois, de la garnison du sud de Formose : c’ était l’ordinaire, facile à cuire, de ces célibataires.

Paradoxe donc : c’est ce détail culinaire de l’immigration massive (deux millions) de réfugiés, dont un grand nombre de soldats, fuyant l’avance des troupes communistes avec le gouvernement nationaliste en déroute qui est devenu le plat national (ou peu s’en faut) des Taiwanais indépendantistes (puisque la majorité des Formosans ne veulent pas entendre parler de réunification avec le continent post-maoïste). Il faut se souvenir ici que les enfants taiwanais désormais boivent du lait (donc les vaches finissent… dans la soupe) et mangent beaucoup plus de nouilles (de blé) et de pain, inconnus pendant les trois siècles précédents.

Dans une ruelle très modeste du centre de Taipei, de l’autre coté du carrefour du bureau du Premier ministre, il y avait un « bain shanghaien » 「 快樂池上海澡堂」KuàiLèChí ShàngHǎi ZǎoTáng. L’endroit a fermé voici une dizaine d’années. S’y retrouvaient en milieu de journée des clients assez disparates (dont l’ami qui m’a raconté, à la manière de Lao She) se trempant collectivement les fesses dans une piscine peu profonde, avant de se faire gratter les peaux mortes avec un gant de crin (en fait une courge séchée dont la fibre est le gant de crin des Taiwanais 「絲瓜布」SīGuāBù ). Ensuite, après un léger massage des orteils et des cuisses, dans une grande salle commune, chacun mangeait un bol de soupe de nouilles au bœuf après la sieste. C’était une soupe « claire » « mi-flanchet mi-tendons », donc fournie par les musulmans d’une échoppe voisine.

Le secrétaire général du KMT Tsiang YenShih 「蔣彥士」 y avait ses habitudes, de même qu’un ancien colonel devenu patron d’un bordel voisin, et quelques petits vieux qui étaient comme un répertoire, banquettes serrées les unes contre les autres, recouvertes de serviettes éponge, de l’histoire de Taiwan.

C’est après l’une de ses siestes dans ce bain public que cet ami porta des oranges à Shih MingTeh, le jour de 1979 où il fut arrêté après les « incidents de KaoHsiung ». Ne manquait ce jour-là que Hou HsiaoHsien pour filmer et le bain, et le portail de la prison de ChingMei.

Mais Li Ang dans tout cela ? Et le couloir des condamnés à mort du TGC à Taipei ?

Les prisonniers politiques avaient droit à leurs modestes trois repas par jour mais pouvaient quelquefois par faveur « cantiner », leur famille étant autorisée à leur passer un peu d’argent. Le plus simple était alors de commander à 17h un bol de soupe de nouilles au bœuf livré à 21h, par des petites gargotes sur les trottoirs à proximité des bâtiments officiels, casernes et prisons.

Shih MingTeh avait ainsi droit à un bol de nouilles que son voisin de détention, de l’autre coté du couloir, Huang ZuYao, faute de famille, ne pouvait se payer. Shih se promit de lui offrir un bol de nouilles sur son pécule. Mais – fatalité ! – c’est le lendemain matin que Huang fut sorti de sa cellule et fusillé. Shih s’en souvient toujours.

Que dire de plus pour fixer le cadre, pour restituer l’atmosphère, donner envie aux lecteurs de ce blog de visionner le film et de lire le livre ? Peut-être redonner l’essentiel d’un texte que j’avais préparé pour annoncer un colloque de l’Association française d’études taiwanaises à l’ENS sur le « 2-28 », en février 2015.

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Formose, la République de Chine ramenée à la seule île de Taiwan, est aujourd’hui une démocratie de 23 millions d’habitants, mais a vécu de 1945 à 1964 une vingtaine d’années de « terreur blanche » sous le régime du parti KMT après les massacres du printemps 1947.

Le 28 février 1947, à Taipei, dans le vieux quartier de TaTaoCheng 「大稻埕」, au coin de NingHsia Road et de NanKing West Road 「寧夏路南京東路口」, une pauvre femme, vendant des cigarettes au marché noir, fut sauvagement battue par des sbires du Taiwan Tobacco Monopoly Bureau et laissée pour morte devant ses deux enfants.

L’incident dégénéra en protestations dans toute l’île de Formose contre la corruption et la gabegie de la garnison du parti KMT qui avait pris possession de l’île après 50 années d’annexion par le Japon (de la fin de la guerre sino-japonaise en 1895 jusqu’à la victoire des Alliés en 1945). Le gouverneur Chen Yi 「陳儀」 (qui n’est pas le chef communiste 「陳毅」dont le nom est homonyme mais s’écrit avec des caractères différents), affolé devant cette révolte populaire et pacifique, joua un peu la comédie du dialogue et des réformes mais demanda des renforts à Chiang KaiShek「蔣介石」Jiǎng JièShí, alors en train de perdre pied devant les communistes sur le continent chinois.

Dès que les troupes du KMT arrivèrent, en mars 1947, ce fut le carnage, avec un massacre systématique – qui durera près de trois mois – de l’élite intellectuelle et culturelle de Formose. Les chiffres restent controversés, mais au moins dix mille Formosans, sur une population de quatre millions de personnes, périrent pendant cette courte période. Et sans doute autant pendant la période de la « terreur blanche » des années suivantes. Sur le continent, le Generalissimo Chiang perdait la guerre civile contre les communistes. Il se repliera à Taiwan, en 1949, avec près de deux millions de réfugiés et de soldats en déroute.

Ce massacre du printemps 1947 est encore vivant dans les mémoires. Il a constamment partagé la population de Taiwan en deux moitiés opposées. Au fil du temps, cette animosité s’est un peu atténuée, mais elle a repris vigueur avec la politique de Ma Ying-jeou 「馬英九」- l’actuel Président de la République – de rapprochement accéléré dans tous les domaines entre Taiwan (la République de Chine) et le continent (la République populaire de Chine).

L’événement « 2-28 » est désormais bien connu grâce à diverses publications américaines et taiwanaises. En langue française, avec deux remarquables couvertures, nous disposons des livres de deux importants témoins : Formose trahie, par George H. Kerr, un diplomate américain, et Le goût de la liberté, l’autobiographie de Peng MingMin 「彭明敏」, le patriarche de la démocratie à Taiwan, qui fut le premier Taiwanais à obtenir un doctorat à la Sorbonne et dont le livre est le tout premier ouvrage à lire pour quiconque s’intéresse à l’histoire moderne de Taiwan. Ces deux livres sont diffusés par l’Association française d’études taïwanaises (secretaire@etudes-taiwanaises.fr).

Formose trahieLe goût de la liberté
Le 28 février est désormais férié à Taiwan, 和平紀念日, le « Jour de la paix ». Depuis cette initiative du Président Lee Teng-hui「李登輝」, les chefs de l’Etat successifs, y compris l’actuel Président Ma YingJeou, s’inclinent en ce jour anniversaire devant les victimes et les martyrs de 1947. Deux « musées du 2-28 » ont été créés à Taiwan.

Pour les Taiwanais de mon jeune âge, le sujet des massacres de 1947 reste presque incompréhensible et d’autant plus sensible que ma génération a grandi dans un pays agréable, démocratique, policé et non plus policier, qui fait l’unanimité pour sa douceur de vivre et ses relations sociales harmonieuses.

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Ce contexte étant ainsi dressé, il est temps de revenir au film de Hou HsiaoHsien, La Cité des douleurs, l’œuvre artistique qui, par sa diffusion mondiale, a le plus contribué à faire connaître cette époque du massacre du printemps 1947, à travers l’histoire tragique de la famille Lim pendant la période de la « terreur blanche », au livre du film, et à son traducteur, directeur de la collection, auquel je donne la parole :

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Pourquoi avez-vous choisi La Cité des douleurs comme premier titre de votre collection ?

Le choix de ce premier ouvrage est le fruit de réflexions menées par Philippe Thiollier, directeur de L’Asiathèque et moi-même.

En France et sans doute un peu partout ailleurs, les arts taïwanais sont surtout connus à travers les maîtres incontestés du cinéma que sont Hou HsiaoHsien, Tsai MingLiang「蔡明亮」 ou Edward Yang「楊德昌」. Pour lancer notre collection « Taiwan Fiction », nous souhaitions créer un pont entre l’image et l’écriture en publiant un scénario co-écrit par deux figures majeures de la scène littéraire à Taïwan que sont Chu TienWen et Wu NienJen et attirer ainsi l’attention sur les échanges fertiles qui existent entre ces deux média à Taïwan.

Cette publication intervient aussi dans un moment particulier, alors qu’une grande rétrospective a lieu à la Cinémathèque de Bruxelles sur le cinéma taïwanais et sur Hou HsiaoHsien en particulier. La palme de la mise en scène reçue il y a peu à Cannes par HHH pour son dernier long-métrage The Assassin 「聶隱娘」, est aussi l’occasion idéale de redécouvrir ses films antérieurs comme La Cité des douleurs, Lion d’Or à la Mostra de Venise en 1989.

Le choix de traduire La Cité des douleurs s’est aussi cristallisé sur notre souhait de faire connaître à travers ce scénario une période charnière de l’histoire de Taïwan, entre 1945 et 1949, au lendemain de la fin de l’administration coloniale japonaise et au début de la prise de pouvoir sur l’île du gouvernement nationaliste chinois.

Quelle orientation comptez-vous donner à celle-ci ?

La publication de La Cité des douleurs inaugure la nouvelle collection littéraire « Taiwan Fiction », que j’ai l’ai honneur de diriger. Cette collection se donne comme ambition de faire découvrir des œuvres littéraires taïwanaises contemporaines audacieuses et originales qui abordent, au prisme de l’île de Taiwan, des problèmes cruciaux de notre temps : environnement, identité des cultures et des langues locales, impact du colonialisme sur les mémoires, incidence de la globalisation économique sur les manières de vivre, genre et sexualité, etc. Nous souhaitons surprendre nos lecteurs en présentant des œuvres qui, même si elles sont sont profondément enracinées dans l’archipel de Formose, entreprennent de questionner le monde avec lequel elles entrent en dialogue.

Quels seront les prochains titres ?

En octobre, nous publierons Membrane 「膜」Mó de Chi TaWei「紀大偉」, un roman de science-fiction profond et subversif qui tourne autour de la question des corps et des identités. L’auteur sera d’ailleurs de passage dans plusieurs villes françaises fin octobre à l’occasion de cette parution.

Nos prochaines publications accorderont aussi une grande place à la ville de Taipei, à la diversité de sa population, à ses trajectoires historiques, ses mythes, ses lumières mais aussi ses ténèbres…

Pour revenir à La Cité des douleurs, est-ce que la traduction du taiwanais vers le français a posé des difficultés ?

Le scénario de La Cité des douleurs se divise en réalité en deux parties, qui se complètent et s’enrichissent l’une l’autre : tout d’abord le « traitement » – c’est-à-dire la trame principale de l’histoire – né des discussions entre Hou HsiaoHsien et sa scénariste de toujours, Chu TienWen, qui en assuré l’écriture. Puis ensuite la continuité dialoguée, développée par Wu NienJen afin d’étoffer l’intrigue et la psychologie des personnages.

Dans la continuité dialoguée de Wu NienJen, l’immense majorité des dialogues est écrite en taiwanais (hokkien), la langue la plus parlée par les habitants nés à Taiwan au moment où se situe l’histoire. La traduction demandait donc une attention particulière, car même si le taïwanais est retranscrit en sinogrammes dans le texte original, de nombreux mots, expressions et mêmes tournures grammaticales diffèrent radicalement du chinois mandarin. En tant que traducteur, ce n’était pas la première fois que j’étais confronté à des passages originellement en taïwanais, mais c’était certainement celle où ces passages étaient les plus nombreux. La difficulté était cependant moins la compréhension des dialogues que la stratégie de traduction à adopter. Pour essayer de rester fidèle à l’esprit du scénario et du film, nous avons choisi de retranscrire le nom des personnages nés à Taïwan (comme par exemple Lim HuanTshing 「林煥清」, le personnage joué par Tony Leung ChiuWai 「梁朝偉」) avec le système de transcription du taiwanais et non du chinois.

Envisagez-vous de publier d’autres scénarios de films ?

Pas à court terme, la vocation première de cette collection étant davantage de publier des romans et des nouvelles, mais nous souhaitons cependant prolonger ce dialogue si fort qui existe à Taiwan entre cinéma et littérature.

Pourriez-vous dire quelques mots de l’Asiathèque ?

L’Asiathèque – Maison des Langues du Monde -est une maison d’édition créée au début des années 1970, par Alain et Christiane Thiollier, à partir d’une librairie orientaliste. Son catalogue porte surtout sur l’Asie et le Moyen-Orient, leurs langues, leurs civilisations et leurs littératures, à la fois classiques et contemporaines. Depuis plusieurs années, L’Asiathèque s’intéresse également aux points de vue asiatiques sur le monde et ses mutations d’aujourd’hui.

L’Asiathèque
11, rue Boussingault, 75013 Paris
+33 1 42 62 04 00
philippe.thiollier@asiatheque.com
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est une photographe taïwanaise installée en France.

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