On connaissait l’islamogauchisme où quelques marxistes égarés ont cru bien à tort guérir leur culpabilité occidentale en trouvant dans l’islamisme un communisme de substitution. On parle beaucoup moins de l’islamolibéralisme qui a mis sur le devant de la scène, à l’occasion de la mort du roi Abdallah d’Arabie Saoudite (pays islamiste, certes, mais islamiste allié et pétrolifère), l’islamolibéralisme en la personne de Christine Lagarde, actuelle présidente du FMI. Certes, on savait que le libéralisme, contrairement à ce qu’il prétend, n’entretient que des liens lointains et plutôt lâches avec la démocratie. Du putsch de Pinochet en 1973 avec des Chicago Boys dans la remorque des chars d’assaut aux referendums pour l’Europe rejoués jusqu’à ce que les peuples daignent voter dans l’intérêt de l’UE, c’est à dire des marchés, la stratégie du choc telle que l’a définie Naomi Klein a depuis longtemps balayé nos illusions sur la question.
Le FMI de Christine Lagarde, d’ailleurs, l’a bien montré dans sa gestion au hachoir des crises de la zone euro en soumettant de force des populations entières à un recul social sans précédent. Cependant, on n’imaginait tout de même pas que cela puisse aller jusqu’à un éloge de la politique d’égalité des sexes du défunt Abdallah présenté comme un parangon du féminisme .
Ce côté inimitable et très Marie-Antoinette de Christine Lagarde ne date pas d’hier : elle conseillait naguère aux Français, devant l’augmentation des prix du carburant, de prendre leur vélo et elle eut cette phrase inoubliable alors qu’elle venait d’être nommée ministre des Finances par Sarkozy en 2007 : « C’est pourquoi j’aimerais vous dire : assez pensé maintenant. Retroussons nos manches. »
Elle a donc dû, de fait, très moyennement penser en invoquant la mémoire d’Abdallah défenseur des femmes dans un pays qui pointe à la 130ème place sur 142 pour la parité et où ces dernières ne peuvent pas aller à l’école, travailler ou ouvrir un compte en banque sans une autorisation masculine mais, en revanche, peuvent assez facilement se faire décapiter en public. Bon, ne soyons pas trop sévère, Christine Lagarde a sans doute songé aux garagistes saoudiennes qui ne se trouvent pas surchargées en réparations de carrosserie puisque les femmes ne pouvant pas non plus conduire, il y a évidemment beaucoup moins d’accidents au royaume du défunt Abdallah.
*Photo : Pablo Martinez Monsivais/AP/SIPA. AP21678816_000002.
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