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Les copains écrivains d’abord !

François Jonquères et Christian Laborde ont tiré la fève


Les copains écrivains d’abord !
Christian Laborde et François Jonquères. Sipa. Numéro de reportage : 10001137_000002.

Les douze coups de minuit viennent de sonner. A peine remis des excès du réveillon que déjà, le critique littéraire croule sous la mitraille éditoriale. Ça ne s’arrêtera donc jamais cette spirale infernale ! En flux continu, un jet incessant de livres vient obstruer ma boîte aux lettres, dès le matin du 2 janvier. Ils arrivent par douzaines, emmaillotés dans leurs grosses enveloppes à bulles, dodus et déjà fourbus par leur harassant voyage postal. Epreuves non corrigées, feuilles volantes, manuscrits dont la sortie est programmée dans plus de six mois, toujours cette même rengaine qui demande des nerfs et de la concentration. Chaque professionnel du secteur opère sa sélection selon sa propre déontologie et ses intérêts particuliers. Il fait donc son jugement avec sa grille de lecture.

Humour, amour, pudeur

Je reprends à mon compte la théorie de Frédéric Berthet, j’y souscris même entièrement. Un livre me plaît quand il est composé des ingrédients suivants : « un peu d’insolence, de l’humour, l’amour du style et une certaine pudeur ». Je ne prétends pas à l’objectivité, j’essaye juste de ne pas me laisser trop emporter par ma subjectivité. Pour évaluer un roman, je dois à la fois garder la tête froide et avoir les mains moites. Ce contretemps biologique n’est pas sans conséquence sur ma santé mentale.  A Causeur, le style prime. Juge de paix infaillible, il permet de trancher net. La qualité d’un texte emporte tout sur son passage. Elle laisse finalement peu de place aux doutes. Chacun a ses marottes, j’ai tendance à préférer les petites structures aux armadas commerciales, les fantaisistes aux moralistes, les polémistes aux progressistes et les tempétueux aux calmes. Se pose alors le dilemme quand un ami, une relation ou même une vague connaissance publie un livre. S’il est mauvais, la politesse impose de se taire. S’il est bon, ne pas en parler est un crime.

Jonquères, le bretteur du Roussillon

En ce début d’année, j’ai choisi deux ouvrages dont je connais les auteurs. Je connais personnellement leur tempérament, leur terreau, leurs lubies, leur moteur, j’oserais presque dire leur voix intérieure. François Jonquères, le bretteur du Roussillon, le pharmacien zélé, cet avocat et scientifique manie la plume comme il se joue de la jurisprudence, avec gourmandise et brio. Amoureux fou des livres et des écrivains réprouvés, il passe ses week-ends sur la table de travail. Jadis, le barreau recueillait les meilleures plumes du pays. Aujourd’hui, le goût pour les belles lettres semble avoir déserté cette profession. François nous avait saisi en 2016 avec sa « Révolution buissonnière », potacherie historico-sentimentale tordante et érudite. Il revient avec un conte, Voix de fées aux éditions de la Thébaïde, soutenu par une préface à la hussarde du fougueux Philibert Humm. C’est osé, irrévérencieux, plein de références oniriques, de jeux de mots et de mains aux fesses.

Laborde brosse un portrait de femme

Délirant et malicieux, retors et débordant de toutes parts, ce texte mené à la baguette magique navigue entre les genres. Le raconter est quasi-impossible, savourez-le comme un mille-feuille bien crémeux. Cet homme sérieux comme un pape se laisse aller à toutes les gamineries et les élucubrations à la manière de son maître vénéré, Marcel Aymé. En cette rentrée, un autre camarade, Christian Laborde sort Tina aux éditions du Rocher. Tout juste auréolé du Prix Jacques Lacroix de l’Académie française pour son essai La Cause des vaches, le pistard des Pyrénées revient avec un splendide portrait de femme sur fond d’Occupation et de Libération dans la région de Toulouse. Christian a le verbe chantant et la prose sensuelle. Ce spécialiste du cycle et de Nougaro ne tombe jamais dans la caricature. Il excelle dans la longue nouvelle charmeuse, sinueuse et vipérine. Peu d’écrivains en France parle aussi bien des corps enchevêtrés et du désir sourd. François et Christian sont des amis et ils ont écrit deux livres de belle tenue.

Voix de fées, François Jonquères, Éditions La Thébaïde, 2017.

Tina, Christian Laborde, Éditions du Rocher, 2018.

Tina

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La Cause des vaches: La France contre les robots de l'agro

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Journaliste et écrivain. À paraître : "Tendre est la province", Éditions Equateurs, 2024

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